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RÉPARATION DE L’ADULTÈRE


en stricte justice, ne serait donc tenu à rien, bien que la complice ait apporté sa part. Voir S. Alphonse, t. III, n. 712 ; Gousset, Théologie morale, Paris, 1845, n. 1015 ; Prùncr. Bibliothèque catholique, t. ii, Paris, 1880, p. 76.

Mais si la promesse du mariage a été posée comme condition sine qua non et que l’action criminelle ait été accomplie, le séducteur doit s’exécuter. Voir S. Thomas, Supplem., q. xlvi, a. 2, ad 4° m ; S. Alphonse, t. III, n. 642 ; Homo aposlol., De seplimo pra’cepto Decalogi, punct. 6, n. 93 ; Yermeersch, op. cit., t. ii, n. 632 ; Wouters, op. cit.. n. 1040, 3.

Des raisons légitimes excusent parfois cependant de l’accomplissement de ce devoir. Par exemple le trop grand écart de fortune ou de situation sociale, ou le fait que l’homme a été trompé par la femme, soit qu’elle ait affirmé être vierge alors qu’elle était déjà corrompue, S. Alphonse, t. III, n. 646, soit qu’elle ait manqué à la parole donnée en péchant avec un autre, ibid., n. 644 ; ou de graves difficultés opposées par les familles à cause de l’honneur, de la dignité, ibid., n. 647 ; ou s’il est prévu que le mariage ne sera pas heureux. Le vœu de chasteté et tout autre empêchement canonique pour lequel des dispenses sont accordées ne sont pas des motifs suffisants pour refuser le mariage promis. S. Alphonse, t. III, n. 649-650 ; Homo aposlol., n. 97.

Ainsi donc, semble-t-il, le mariage n’est pas toujours exigible. Si celui-ci ne se fait pas, le dommage doit être compensé par une dotation. La dot à fournir varie suivant les qualités du délinquant et de sa complice, compte tenu de leur culpabilité respective et des circonstances concrètes de temps et de lieu. Toutefois le fornicateur ne sera tenu à rien ou seulement à une compensation partielle, si la jeune fille qu’il a corrompue fait un aussi bon mariage que si elle était demeurée vierge, ou si elle n’avait jamais pu ni voulu se marier. S. Alphonse, t. III, n. 641 ; Vermeersch, t. ii, n. 632.

2. A l’égard de l’enfant.

Quand la faute est coin mune, l’entretien, l’éducation et l’instruction de l’enfant incombent solidairement au père et à la mère. Certaines dispositions législatives imposent parfois cette obligation d’abord au père et subsidiairement à la mère. Mais, exceptionnellement, la femme qui s’adonne à la prostitution, doit réparer avant l’homme, vu qu’elle est censée, en recevant le paiement de sa complicité, prendre sur soi tous les dommages qui surgiraient. Lorsque l’homme est le coupable principal, son devoir est de subvenir aux frais.

3. A l’égard de la famille.

Le viol a souvent de graves répercussions sur l’honneur et la fortune de la famille des délinquants. S’il y a un seul coupable, celui-ci est obligé en justice de réparer. Si, au contraire, il y a eu accord et plein consentement entre les deux complices, aucune partie n’est lésée dans son droit strict. Bien qu’il y ait faute contre le respect, l’amour et l’obéissance, on ne saurait parler de restitution proprement dite, car il n’y a pas eu violation de la justice. Cela n’empêche pas d’apporter aux parents les satisfactions désirables et de compenser le mieux possible. S. Alphonse, t. III, n. 640 sq.

4. A l’égard des établissements hospitaliers.

Y a-t-il lieu de réparer, lorsque l’enfant a été déposé dans un institut hospitalier ? Saint Alphonse, t. III, n. 656, le nie, car selon lui, ces établissements ont été fondés non seulement pour venir en aide aux pauvres, mais aussi pour permettre aux riches, exposés à l’infamie, de ne pas donner dans les crimes de l’avortement et de l’infanticide.

D’autres moralistes, avec plus de raison, semble-t-il font aux parents, à moins que ceux-ci ne soient pauvres, un devoir de restituer aux établissements

hospitaliers les frais nécessités par l’enfant jusqu’à l’âge où celui-ci se suffit par son travail, ou jusqu’au jour de son décès, s’il est mort prématurément. Pratiquement il est de l’élémentaire équité pour les parents riches de s’acquitter de ces frais. Yo.r la doctrine exposée ici à l’art. Parents (Devoirs des), t. xi, col. 2013.

IV. Réparation de l’adultère. — L’adultère est la violation du droit conjugal, ce qui est irréparable, et une offense injurieuse à l’égard de l’époux demeuré fidèle à ses engagements, ce qui peut être compensé. Ici nous envisagerons surtout la réparation des dommages causés aux enfants et à l’époux légitimes, dans leurs biens de fortune, par l’introduction dans la famille de l’enfant adultérin. A moins que le mari n’ait consenti à l’adultère, il est lésé, car étant présumé le père de l’enfant légitime, il est tenu de l’entretenir et de l’élever. Les enfants légitimes et autres héritiers subissent aussi un dommage dans leur héritage paternel et maternel et dans les donations diverses, vu que leur part est réduite par ce qui est livré au fils illégitime. Ceci étant, nous étudierons : 1° Qui doit réparer ; 2° Ce qu’il faut réparer ; 3° Comment et quand il faut réparer.

1° Qui doit réparer ? — Trois hypothèses sont à envisager : 1. L’enfant est certainement illégitime : 2. Il est doutcusement illégitime ; 3. La paternité de l’enfant illégitime est douteuse.

1. L’enfant est certainement illégitime.

Si l’homme et la femme sont également coupables, et que le péché ait été commis en vertu d’un accord complet, tous les deux sont tenus solidairement et au même degré pour ainsi dire à la réparation des préjudices qu’ils portent en introduisant un enfant illégitime dans la famille. Ils en sont, en effet, causes également principales, efficaces et totales. Si l’un se refuse ; i ses obligations, l’autre est tenu à le suppléer pour le tout, quitte à se faire dédommager par l’intervention du pouvoir judiciaire. S. Alphonse, I. III, n. 651 : Lacroix, t. III, part. il. n. 336 ; Lugo. disp. XIII, n. 11. Mais si un complice a eu recours à la violence ou à la force, supprimant ainsi la culpabilité de l’autre, il est cause principale du dam et le devoir de la réparation lui incombe entièrement. Menus’il fait défaut, l’autre ne doit rien. Ce dernier ne serait obligé de satisfaire aux dommages causés que s’il était intervenu, comme cause seconde, avec une responsabilité certaine, mais diminuée par la crainte ou la fraude, et uniquement dins l’hypothèse où la cause principale se déroberait. S. Alphonse, t. III, n. 659.

Quand il y a deux coupables, il y aurait lieu, dans la théorie, de séparer l’enfant de la famille, mais cela est prat iquement impossible à cause des circonstances, car, il ne faut pas l’oublier, le principe est foimel : Pater est quem nuptise demonstrant. Selon la législation canonique, l’homme marié légitimement est présumé être le père de tous les enfants qui nali sunt saltem post sex menses a die celebrali matrimonii, vel inlra decem menses a die dissolutæ vilæ conjugalis, can. 1115, § 2, à moins que la preuve du contraire ne soit évidente, ce qui est pratiquement très difficile à établir. Can 1115, § 1. Par ailleurs, des aveux faits par la femme entraîneraient des inconvénients graves pour l’honneur de la famille sans écarter les dommages relatifs à la fortune. C’est pourquoi, il est en général imprudent de presser la coupable et son complice de dévoiler leur, faute : il vaut même mieux ne pas le leur permettre.

2. L’origine de l’enfant est douteuse.

Les uns affirment qu’alors l’adultère est tenu à la réparation au prorata du doute, car il n’est pas juste que le mari légitime subisse une charge dont il n’est pas responsable. Carrière, Preelecliones theologicæ majores de justifia et jure. Paris, 1839-1844, t. III, n. 1385. Les