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QUESNEL. LA BULLE VINEAM DOM1NI


en matière de dogme, le pape, comme chef visible de l’Église, prononce à la tête des évêques, mais avec les évêques et que le vicaire de Jésus-Christ sur la terre règne avec l’Église et non pas sur l’Église ». On ne dit cela d’ailleurs que « comme une précaution innocente, mais utile… » Les lettres patentes disent que le roi a demandé au pape cette nouvelle constitution, que l’assemblée du clergé a approuvée. Procès-verbaux de 1705, recueil de pièces, p. cviii-cxi.

Dès le 30 août, le roi avait envoyé à la Sorbonne une lettre « pour que, dans les lectures de théologie et dans les thèses qui seront proposées, il ne soit avancé ou enseigné aucune proposition contraire aux décisions contenues dans cette bulle : des délégués de la Sorbonne vinrent remercier le roi, le 9 septembre ». Hist. du cas de conscience, t. vu. p. 88-90.

Restait à rédiger les lettres au pape et aux évêques de France ; l’archevêque de Rouen fut chargé de les présenter. Le 7 septembre, l’archevêque lut à l’assemblée la lettre au pape. Procès-verbaux de 1705, p. 2612(53, et Hist. du cas de conscience, t. vil, p. 62-67. On y fait l’éloge de l’archevêque de Paris, qui a condamné des libelles, avec l’approbation de tous les évêques du royaume ; mais on est heureux de constater que le pape a condamné toutes les subtilités qu’on avait imaginées pour défendre l’erreur déjà condamnée par Innocent X et par Alexandre VII ; le roi a communiqué cette constitution à l’assemblée du clergé, qui l’a approuvée.

La lettre circulaire aux évêques fut approuvée le 14 septembre. Procès-verbaux de 1705, p. 292-291, et Hist. du cas de conscience, t. vii, p. 68-70. lïlle contient des principes qui devaient déplaire à Rome : on rappelle que la bulle a été sollicitée par le roi et que celui-ci l’a envoyée à l’assemblée. « Nous avons donné tout le temps et toute l’application que demandait l’examen d’une affaire si importante, dans laquelle nous savons que nous n’agissons pas en simples exécuteurs des décrets apostoliques, mais que nous jugeons et prononçons véritablement avec le pape… Pour procurer plus efficacement le bien de l’Église, nous sommes tous convenus d’ordonner la publication de l’exécution de la bulle dans nos diocèses par des mandements simples et uniformes autant que possible. » On joignait le modèle du mandement, dont les évêques de Marseille et de Vence avaient suggéré l’idée, sans cependant imposer de s’en servir.

A Rome, l’acceptation de la bulle par l’assemblée du clergé provoqua quelque déception. Sans doute la bulle était reçue, mais avec des considérants qui en compromettaient les résultats. Les maximes que les prélats de l’assemblée avaient établies ruinaient l’autorité du Saint-Siège, car elles affirmaient ouvertement que les constitutions des papes obligeaient toute l’Église seulement lorsqu’elles étaient acceptées par le corps des pasteurs, d’une manière solennelle, par voie de jugement et après mùr examen. Ces maximes se retrouvaient partout, dans les discours de l’archevêque de Paris et de l’archevêque de Rouen, dans la lettre circulaire aux évêques du royaume et dans le discours de Portail. Aussi le cardinal Fabroni, qui avait inspiré et peut-être rédigé la bulle, confident de Clément XI, ne manqua pas d’exciter le mécontentement du pape ; d’ailleurs celui-ci, dans sa réponse à la lettre de Noailles, le 20 octobre, ne fait pas allusion à l’approbation des évêques et. le même jour, il écrivait au cardinal d’Estrées, une réponse à la lettre que celui-ci lui avait envoyée le 7 septembre. Hist. du cas de conscience, t. vii, p. 73-77, 79-80.

1° Altitude des évêques. La plupart des évêques publièrent le mandement d’acceptation, dans les derniers mois de 170f> ou au début de 1706, el se conlen tèrent de donner le mandement modèle rédigé par

l’assemblée ; pourtant, quelques-uns firent des remarques que l’Histoire du cas de conscience, t. vii, p. 109-1 14, a soulignées : « Les uns ne parlent pas des désordres causés par le jansénisme (Verdun, Orléans, Saint-Pons, Reims, Toul, Ypres, Arras) ; d’autres sont très vagues sur la question de l’acceptation des constitutions d’Innocent X et d’Alexandre VII par le corps des évêques ; d’autres atténuent les règlements que l’assemblée avait donnés à tous les évêques ; d’autres les exigent et les étendent, au point de défendre la lecture de tous les livres de piété et de science, excepté ceux qui ont les jésuites pour auteurs ou pour approbateurs. »

Mais la bulle fut publiée dans tous les diocèses, sauf à Saint-Pons, dont l’évêque, Percin de Montgaillard, mettait Clément XI en opposition avec Clément IX, dont il prétendait bien connaître la pensée, car il était le dernier survivant des dix-neuf évêques qui, en 1068, avaient signé la lettre en faveur des quatre opposants et par cette intervention avaient obtenu la paix de Clément IX. Par le mandement qu’il donna, l’évêque de Saint-Pons avait voulu contenter tous les prélats et, en fait, il ne satisfit personne, suivant la remarque de d’Aguesseau (op. cit., t. xiir, p. 292) : « Les jansénistes rigoureux trouvèrent mauvais qu’on l’eût fini par l’acceptation de la dernière bulle, l’accusant de détruire ce qu’il avait lui-même édifié, de rejeter le silence respectueux, dont il avait été le zélé défenseur et de préférer la décision obscure de Clément XI sur le silence, à la paix glorieuse de Clément IX, dont le même silence avait été le fondement… Les jésuites, au contraire, contents de la conclusion de l’évêque de Saint-Pons, puisqu’elle tendait à l’acceptation de la bulle, ne pouvaient digérer les principes sur lesquels il l’appuyait ; ils l’opposaient lui-même à lui-même… ; condamnant en apparence le silence respectueux, il le justifiait en efïet… »

Le mandement de Montgaillard, qui était un plaidoyer pour le silence respectueux et qui se terminait par une acceptation de la bulle, provoqua une polémique avec l’archevêque de Cambrai, où les jansénistes ont voulu voir une nouvelle revanche de Fénelon contre le cardinal de Noailles et ses amis. Plusieurs fois pris à partie par l’évêque de Saint-Pons, Fénelon rédigea une lettre où il relevait les inexactitudes et les contradictions renfermées dans le mandement. Œuvres, t. xiii, p. 177-264. Bientôt d’ailleurs, un décret de l’Inquisition du 17 juillet 1709, confirmé par un bref de Clément XI du 18 janvier 1710, condamna la mandement de Montgaillard et les deux lettres que cet évêque avait écrites à Fénelon. Le mandement était condamné comme renfermant « une doctrine et des propositions fausses, scandaleuses, séditieuses, téméraires, schismatiques, erronées, sentant respectivement l’hérésie et tendant manifestement à éluder la dernière constitution du Saint-Siège sur l’hérésie de Jansénius ».

L’Histoire du cas de conscience, t. viii, a publié la plupart des mandements des archevêques et évêques de France. Noailles, dans son mandement du 30 septembre 1705, déclare que les constitutions des papes doivent, après l’acceptation solennelle que le corps des pasteurs en a faite, être regardées comme le jugement et la loi de toute l’Église » ; il reproche aux jansénistes d’avoir inventé des subtilités pour mettre la doctrine de ce livre (Y Augustinus) à couvert des censures de l’Église », et il ajoute que la bulle du 16 juillet a dissipé tous « les vains prétextes auxquels on avait recours pour se dispenser d’obéir aux décisions de l’Église ». L’archevêque de Lyon, le 21 octobre, reproduit le mandement de Noailles. L’archevêque de Reims, le lô octobre, dit qu’à la faveur du silence respectueux chaque particulier se mettrait