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RÉGINON DE PRUM — REGIS (PIERRE)


sacerdotal que s’intercale un long passage, n. 288324 (W. 292-328), sur la manière de traiter les pénitents. L’ordre des matières n’est pas toujours aussi logique qu’on le désirerait, mais la plupart des questions relatives à la vie du prêtre sont néanmoins touchées. Le 1. II est consacré aux fautes principales sur lesquelles doit être attirée l’attention des pasteurs : homicide, coups et violences ; adultère et fornication ; vol et rapine ; fautes contre la religion, parjures, enchantements, maléfices et sortilèges. Comme beaucoup des textes cités prévoient les pénitences à infliger aux coupables, les derniers chapitres traitent des « rédemptions », c’est-à-dire du rachat des pénitences prescrites par d’autres œuvres de piété et de miséricorde. L. II, n. 438-446 (W. 446-454). Voir l’art. Pénitence, t. xii, col. 850, 873 sq. Deux (ou trois) appendices terminent l’ouvrage dans les mss. Il semble qu’ils soient postérieurs à Réginon.

Comme l’analyse ci-dessus l’a montré, nous avons affaire avec une collection canonique, compilée selon un plan méthodique, répondant à un dessein précis. L’auteur n’a pas plaint sa peine, et s’est efforcé de trouver dans les textes, soit dispersés, soit déjà groupés en d’autres recueils, les éléments de réponse aux questions qui se posaient. Il a pris soin d’indiquer ses sources et fournit ordinairement des références exactes. Les historiens modernes du droit canonique, Wasserschleben, il y a un siècle, et tout récemment M. P. Fournier ont étudié avec minutie les procédés de travail de Réginon. Leurs conclusions sont favorables, au moins dans l’ensemble, à l’exactitude de l’abbé de Prùm. Sans.doute il a retouché, de ci, de là, pas mal de textes employés ; sans doute encore il a mis en circulation un petit nombre de textes dont l’authenticité n’est pas certaine, quelques-uns même apocryphes ; mais son œuvre ne laisse pas d'être honorable, et ceci est d’importance, car c’est d’elle que s’inspirera, un siècle plus tard, Burchard de Worms, dont dépendent à leur tour les canonistes de l'âge suivant. Le théologien a tout intérêt à relever dans les Libri synodales les très nombreuses indications relatives à l’histoire des sacrements, tout spécialement à l’histoire de la pénitence ; le moraliste y trouvera, pour sa part, des indications précieuses et qui ne paraissent pas avoir été suffisamment exploitées.

La Chronique rédigée par Réginon, terminée peu après les Libri synodales et dédiée en 908 à l'évêque d’Augsbourg, Adalbéron, comble, pour l’historien, une lacune importante à la fin du ixe et au début du xe siècle. Ce n’est pas un chef d'œuvre. Le t. I, intitulé De lemporibus dominicæ incarnationis, commence avec la naissance du Christ et ordonne, sous les différentes « années de l’incarnation » les événements de l’histoire sacrée et profane jusqu'à la mort de Charles Martel. La computation de l’abbé de Priim est d’ailleurs fort inexacte et, dès le début du iie siècle, sa chronologie est en déroute ; il s’en est d’ailleurs aperçu et s’en explique loyalement à la fin du livre ; l’addition des chiffres des pontificats des papes (fournis par le Liber pontificalis)hi donne jusqu'à la mort de Grégoire III, 747 ans depuis l’incarnation, tandis que les dates des empereurs lui donnent 29 ans de moins ; chiffres inexacts tous les deux, il le sait bien, puisque, selon l'ère dionysienne, la mort du pape Grégoire, qui coïncide sensiblement avec celle de Charles.Martel, se place en 741. Mais Réginon, qui s’inspirait de la Chronique de Bède (De temporum ratione, VI a wtas, cf. P. L., t. xc, col. 515-571), se déclarait incapable d’amender ses chiffres. Le 1. II porte comme titre : Liber de geslis regum Francorum et donne l’histoire, suivant le mode annalistiquc, de la monarchie franque, de la mort de Charles Martel (741) à l’année 906. Jusqu’en 813, l’auteur s’est contenté, ou à peu près, d’abréger et de

mettre en un latin meilleur les Annales Laurissenses majores. A partir de 814 sa narration est plus indépendante. Il ne semble avoir connu d’ailleurs ni les Annales de Saint-Bertin, ni les Annales de Fulda. Mais il y avait certainement à Priim des Annales qui ne se sont pas conservées comme telles et qui sont à la base de nos Annales de Stavelo. Réginon en a profité, comme aussi de certains documents particuliers (ceux, par exemple, qui sont relatifs au divorce de Lothaire II) et de traditions orales. Ces dernières donnent un intérêt considérable aux dernières années de la Chronique ; cette narration est d’autant plus précieuse que, pour cette période, les sources sont fort rares, surtout pour ce qui concerne les Francs de l’Ouest. La chronologie de ce IIe livre, principalement de la partie centrale, laisse encore beaucoup à désirer.

En définitive, à une époque où les effets bienfaisants de la renaissance carolingienne commencent à s’atténuer et où l’Europe occidentale glisse à nouveau dans la barbarie, Réginon de Prùm apparaît comme l’un des derniers représentants d’une culture générale dont l’absence allait bientôt se faire douloureusement sentir.

Le texte du De harmonica institulione (au moins de la préface) a été publié par Gerbert, Script, eccl. de musica sacra, t. i, 1784. p. 230-247, reproduit dans P. L., t. cxxxii, col. 483-502 ; il est au complet avec le Tonarius et des facsimilés dans Coussemaker, Script, de musica Medii JEvi, t. H, p. 1-73.

L'étude des Libri synodales montre que cet ouvrage a existé en une double recension ; c’est la moins bonne, défigurée par des transpositions et des interpolations maladroites, qui a été publiée la première, d’abord par Joachim Hildebrand, à Helmstadt, 1659, mais surtout par Baluze en 1671 (texte reproduit dans P. L., t. cxxxii, col. 175483) ; le texte authentique a été donné en 1840 par Wasserschleben, lieginonis, abbatis Prumiensis, libri duo de synodalibus causis et disciplinis ecclesiasticis. C’est sur ce texte qu’ont travaillé les historiens du droit canonique ; état actuel de la question et bibliographie copieuse en un article de P.Fournier, L'œuvre canonique de Réginon de Prûm, dans Bibl. de l'École des Charles, t. lxxxi, 1920, p. 4-44, repris avec diverses modifications dans P. Fournier et G. Le Bras, Hist. des collect. canon, en Occident, t. i, 1931, p. 244-268.

La Chronique a été publiée pour la première fois à Mayence, 1521, par Sébastien de Rotenhan, édition qui a servi de point de départ à toutes les autres, jusqu'à celle de Pertz dans les Mon. Germ. hist.. Script., t. i, 1826, p. 537629 (texte reproduit dans P. L., t. cxxxii, col. 9-150) ; éd. F. Kurze, dans les Scriptores rcr. german., Hanovre, 1890.

La préface de cette édition donnera les renseignements les plus récents sur l'œuvre et la personne de Réginon. Voir aussi A. Ebert, Allgemcine Gesch. der LUI. des M. A. im Abendlande, t. iii, p. 226-231 ; M. Manitius, Gesch. der latein. Literatur des M. A., t. i, 1911, p. 695-701, où l’on trouvera l’essentiel de la bibliographie.

É. AMANN.

    1. REGIS Pierre##


REGIS Pierre, érudit et théologien piémontais. Il naquit le Il juillet 1747, à Roburento, province de Mondovi, fit ses premières études dans le séminaire de son diocèse, d’après Rodriguez ; Hccfer dit : chez les clercs réguliers, dont, tout jeune, il aurait pris l’habit. C’est le premier qui a raison, car il n’y avait pas de couvent de clercs réguliers à Mondovi ; la confusion peut provenir du fait qu'à l'époque de la jeunesse cléricale de Régis, l'évêque était le célèbre Michel Casati, milanais, appartenant à la congrégation des clercs réguliers théatins, qui agrandit son séminaire, s’en occupa avec sollicitude, y fit de sages règlements et ne put manquer de s’intéresser aux débuts déjà remarqués de son jeune clerc de Roburento. Régis fut envoyé à Turin pour y prendre ses grades en théologie, y fut d’abord attache comme répétiteur au collège royal des provinces, et obtint, en 1777, la chaire d'Écriture Sainte à l’université. Il avait acquis une connaissance remarquable des langues orientales ; d’où le grand