Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 13.2.djvu/183

Cette page n’a pas encore été corrigée
1779
1780
RATISBONNE — RAT RAM NE


de pacificateur. En 1253 il travailla à réconcilier avec l'Église le duc Othon de Bavière, qui avait embrassé la cause de l’empereur contre le pape. En 1257, il obtint d’Albert de Saxe le Jeune la restitution de la forteresse de Wartenstein, enlevée à l’abbaye cistercienne de Pfoeffer. En 1258, il opéra la réconciliation de Boleslas, duc de Silésie, avec Thomas, évêque de Breslau, que le duc détenait en prison. En 1259, il servit d’arbitre entre Louis de Lebenzell et Irmengarde, veuve d’Henri IV, margrave de Bade. Par un bref du 21 mars 1263, il fut adjoint par Urbain IV à saint Albert le Grand pour prêcher la croisade pour le recouvrement des Lieux saints. A cette occasion il parcourut de nouveau toute l’Allemagne et la Suisse et poussa même jusqu'à Paris, où il se rencontra avec saint Louis et le roi de Navarre. Berthold semble avoir passé les dernières années de sa vie à Batisbonne, où il mourut le 13 ou le 14 décembre 1272. Le peuple l’honora comme un saint et des pèlerinages de tous les pays allemands se rendaient tous les ans à son tombeau, où d’après la tradition des miracles se seraient opérés. Il fut l’objet d’un culte ininterrompu jusqu'à la sécularisation sous Napoléon, et jouit du nom de bienheureux dans l’ordre des frères mineurs et en Bavière.

La merveilleuse et surprenante prédication de Berthold est conservée dans une multitude de sermons allemands et latins. Les premiers n’ont point été rédigés par Berthold lui-même, ni prononcés tels qu’ils sont conservés, mais ils constituent des notes prises par quelque auditeur, qui a négligé tout ce qui lui semblait pur incident de la vie intérieure et n’a jugé digne de passer à la postérité que les grands mouvements oratoires. Les sermons allemands constituent donc plutôt un florilège. Plusieurs cependant semblent provenir de notes de Berthold lui-même, développées plus tard par des franciscains, qui vraisemblablement appartenaient au groupe mysticolittéraire, sans doute du couvent d’Augsbourg, où se sont élaborés les recueils juridiques Deulschenspiegel et Schwabenspiegel. Cf. I. Frisse, Die Franziskaner und die deulschen Redits biicher des Miltelallers, dans Franziskanische Studien, t. xxi, 1934, p. 185-186. D’autres ne sont que des fragments brillants, cousus tant bien que mal les uns aux autres, des ébauches, de simples plans. Il s’en suit que les sermons allemands semblent amorphes, que les différentes parties sont décousues et disproportionnées, que l’ossature fait défaut. Souvent même le point principal n’est qu’indiqué et la partie doctrinale et instructive est passée sous silence. Cependant, malgré leur état fragmentaire, les interpolations et les mutilations qu’ils ont subies, les sermons allemands sont les plus belles pages de prose populaire du xm° siècle allemand. Ils ont été édités en vieil allemand par F. Pfeilïcr et J. Strobl, en 2 vol., à Vienne, en 1862 et 1880 ; en allemand moderne par F. Gôbel, à Batisbonne, en 1873 (5e éd. en 1929), et par O.-H.Brandt, à Leipzig, en 192 1.

Les sermons latins ont Berthold pour auteur et leur authenticité n’est mise en doute par personne. Il les a mis lui-même par écrit parce que la rédaction, qu’en avaient faite des clercs et des religieux au fur et à mesure de ses voyages, fourmillait d’erreurs. Berthold s’y donne le nom de Ruslicanus et appelle ces sermons ruslicani. D’après G. Jakob, Die laleinischen Reden des sel. B. v. R., Batisbonne, 1880, il y aurait 393 sermons latins, à savoir : 2.">S ruslicani, répartis en trois groupes : Rusticanus de dominicis ou Velus vcl anliquus Ruslicanus (58 sermons) ; Rusticanus de sanctis (125 sermons) ; Ruslicanus de communi (75 sermons) ; 87 sermoncs ad religiosos ; 48 serrnones spéciales ou extravagantes. Les Ruslicani ne sont toutefois pa ; les sermons tels qu’ils furent prononcés par

Berthold, qui d’ordinaire improvisait. Ce ne sont à proprement parler que des plans de sermons admirablement ordonnés et d’une proportion parfaite, riches en citations de l'Écriture et des Pères, des philosophes, surtout d’Aristote, de la liturgie, des poètes latins, des juristes, des scolastiques. Ils abondent en aperçus profonds, en matériaux de toute espèce, en comparaisons bibliques, en détails folkloriques, qui en font une source importante pour l’histoire du peuple allemand au xme siècle. La langue en est châtiée et le style soigné. Les idées toutefois n’y sont indiquées que sommairement et aucune n’est développée. Outre la sainte Écriture, les Pères (surtout saint Augustin et saint Bernard), Alexandre de Halès, Baymond de Penafort, Hugues et Bichard de SaintVictor, Berthold a principalement utilisé le De proprielalibus rerum de Barthélémy l’Anglais. Les Ruslicani auraient été composés entre 1250 et 1256, et des extraits en ont été édités par A. Schônbach, dans Silzungsberichte d. kais. Akademie d. Wissenschaflen in Wien, Philos. hist. Klasse, t. cxlii, 1900 ; t. cxlvii, 1904 ; t. cli-cliii, 1905-1906 ; t. cliv-clv, 1906-1907, et par G. Jakob, op. cil. L'édition critique, commencée par H. Felder,

0. M. cap., et continuée par A. Baumgartner, cap., a été reprise par K. Moser du même ordre à Fribourg en Suisse. Les Serrnones ad religiosos ont été rédigés sur des notes et des canevas de sermons prêches par Berthold. Les Serrnones spéciales dérivent d’esquisses de sermons que Berthold n’a pas corrigées. Bien que d’après A. Schônbach ces derniers sermons y compris les Extravagantes ne méritent pas d'être édités, P. Hoetzl a publié 20 Serrnones ad religiosos (Munich, 1882). Enfin dans plusieurs manuscrits on trouve des sermons qui ont été rédigés à l’aide des Ruslicani, ainsi que des sermonnaires composés, sous l’influence de Berthold, par ses compagnons, ses amis, ses imitateurs, ses continuateurs ; cf. Dict. hist. géogr. ecclés., t. viii, col. 985.

Pour la bibliographie se reporter à l’article Berthold de Ratisbonne, par Fr. Henquinet, dans IJicl. hist. géogr. eccl., t. viii, col. 985-987. Y ajouter la 5e éd. de 41 sermons allemands faite par Fr. Gôbel, Vie Predigten des Franziskancrs Berthold von Regensburg, Ratisbonne, 1929 ; E. W. Keil, Deutsche Siite und Sittlichkeit im 13. Jahrhundert nach den datnaligen deutschen Prcdigern, Dresde, 1931 ; A. Hiibner, VoTsludien zur Ausgabe des Bûches der Kônige in der Deutschspiegelfassung und sàmllichen Schwabenspiegellassungen, dans Abhandlungen d. Gesellschafl d. Wissenschallen z. Goltingen, Philol.-histor. Klasse, sér. III, n. 2, Berlin, 1932 ;

1. Frisse, Die Franziskaner und die deutschen Rechtsbiicher îles Mitlelalters, dans Franziskanische Studien, t. xxi, 1934, p. 181-180.

A. Teetært.

    1. RATRAMNE##


RATRAMNE, moine de Corbie, ixe siècle. I Vie. II. Œuvres.

I. Vie.

Sur la vie de Batramne nous savons fort peu de chose : il fut moine de Corbie où il a dû entrer après 825. Sa profession monastique se place vraisemblablement au temps de l’abbé Adalhard ou de son successeur Wala ; il fut prêtre. Il fut aussi disciple de Paschase Radbert, mais, comme dit dom Grenier, de disciple, il devint son émule et son censeur. Il a enseigné à Corbie, où il eut sans doute Gottschalk comme élève ; il fut en relations avec Loup de Ferrières. Su réputation de théologien était grande : on voit à diverses reprises Charles le Chauve le consulter.

Son nom a été défiguré de plusieurs manières : les uns écrivant Ratram, d’autres, Botram ; d’autres enfin, Bertram ; sans compter diverses modifications orthographiques secondaires. Il a été confondu avec un abbé de Neuviller en Alsace, avec un abbé d’Orbais, avec un moine de Saint-Denis de Paris. A cause de cela un certain nombre de faits lui sont attribués, qui n’ont rien de commun avec lui. En réalité, nous ne