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RATIONALISME — RATISBONNE


contre elles, au nom de la raison, de la science, de l’histoire. F. Le Dantec (1869-1917), par exemple, soutient toujours le matérialisme. Tous les phénomènes biologiques se ramènent à des phénomènes physico-chimiques et les phénomènes dits intellectuels se ramènent aux biologiques. Un combat se livre toujours autour des Livres saints, à propos surtout de la question des origines, cela se comprend, tout le reste est suspendu à cette question ; cf. Houtin, La question biblique chez les catholiques de France au XIXe siècle, 1902 ; des évangiles et de la personne du Christ : ainsi Ch. Guignebert qui réduit à très peu de chose les données de l’histoire sur la personne de Jésus et laisse à ses disciples le soin de l’auréoler, cf. Ch. Guignebert, Jésus, 1933, et le D r Couchoud, qui, au nom de l’histoire, refuse à Jésus l’existence, 1926, tandis qu’autour de lui l’Union rationaliste soumet à la critique « scientifique « les thèses des origines chrétiennes. Une histoire des religions a été entreprise qui essaie de faire rentrer le christianisme dans le cadre des religions les plus humaines. Une réaction s’est produite cependant. Non seulement les apologistes maintiennent leurs positions ; mais du dehors, on a secoué le joug de la raison et de la science et revendiqué les droits de l'âme humaine qui ne saurait se limiter à la raison, montré que la science dépassait de beaucoup, dans ses affirmations ou ses négations, ses conclusions légitimes et affirmé l’irréductibilité de la conscience et de la liberté. Et pour atteindre Dieu on a cherché d’autres voies, fidéisme, pragmatisme. Cf. les œuvres de Lachelier, Boutroux, Bergson, Blondel, James. Le modernisme enfin a essayé une conciliation malheureuse entre les doctrines qui se réclamaient de la raison et de la science et les doctrines révélées, sacrifiant celles-ci à celles-là. Cf. Modernisme.

Conclusion. — C’est tout le traité De vera religione qu’il faudrait exposer en l’adaptant à chaque époque pour réfuter les doctrines rationalistes. En tous cas l'Église n’a cessé de les condamner. Sans parler des œuvres mises à l’Index et des condamnations particulières qui ont frappé telle ou telle doctrine, il faut remarquer que le Syllabus, dans ses quatre premiers paragraphes : i. Panthéisme, naturalisme et rationalisme absolu, ii. Rationalisme modéré, ni. lndifjérentisme, latiludinarisme. iv. Socialisme, communisme, rappelle les condamnations solennelles faites par les papes des principes et des théories du rationalisme. Enfin, la Constitutio dogmatica de fide catholica du Concile du Vatican, et les canons qui la suivent : i. De Deo, rerum omnium créature, u. De reuelatione. m. De flde.iw De ratione et fide portent exclusivement sur le rationalisme.

On a cité, à propos tics principaux auteurs ou des principales périodes, les ouvrages les plus récents. D’ailleurs bon nombre des écrivains signalés ont eu ou auront leur article spécial dans le Dictionnaire. Le lecteur y est renvoyé.

Il y a peu d’ouvrages a citer sur l’ensemble de la question. Voir cependant : Ollé-Laprune, La raison ei l< rationalisme, Paris. 1906 ; A. Bremond, S. J., Nationalisme et religion, cahier 4, du volume xi des Archives de philosophie ; Bartholmess, Histoire critique des doctrines religieuses de la philosophie moderne, Paris, 1895, 2 vol. ; VigOUIOUX, Les Livres saints et la critique rationaliste, 1 rc édit., 188t>1890, 4 vol. ; 3e édit. revue et augmentée, 1880-1891,."> vol., t. i et u ; Lange, op. cit. ; Cournot, op. cit. ; Lecky, op. cit. ; dans ce Dictionnaire les articles Apologétique, t. i, col. 1511-1580 ; Athéisme, t. i, col. 2190-2210 ; Du i. t. iv. col. 755-1300 ; Matérialisme, t.. col. 282-X54 ; Panthéisme, t. xi. col. 1858-1874 ; dans le Dictionnaire apologétique d’A. d’Alés, les articles Déterminisme, Évolution, Monisme, Libre pensée. Panthéisme, Providence.

Voir aussi, Haag, La France protestante, 1847-1859, 9 vol. ; 2e édit., 1877-1886 ; Lichtenberger, Encyclopédie des sciences religieuses, 1K77-1882. 13 vol. in-S » ; rîerzog et Hauck, Protestant. Real-Encyclopeedie…, Franck ; Dictionnaire dis sciences philosophiques : les histoires de la philosophie en parti

culier : Renouvier, Philosophie analytique de l’histoire. Les idées, les religions, les systèmes, 18'.17, t. ni et iv, 4 vol. in-8° ; É.Biéhier, op. cit. ; les Histoires de l'Église ; les Histoires des littératures et les Histoires des différentes nations et des xvi 8, xviie, xviiie et xixe siècles. „ _

C. Constantin*.

    1. RATISBONNE (Berthold de)##


RATISBONNE (Berthold de), frère mineur, un des plus grands prédicateurs allemands du Moyen Age, appelé aussi Ruslicanus, nom qu’il s'était donné à lui-même par amour pour le peuple et par humilité. Originaire de Ratisbonne, où il dut naître avant 1210, il fut probablement un des premiers Allemands qui, dans son pays, sont entrés dans l’ordre des mineurs. Malgré de patientes recherches, les données historiques acquises sur la vie de Berthold sont presque nulles avant 1246 et restent rares après cette date. Si les auteurs du Moyen Age ne tarissent pas d'éloges sur sa personne et sur son éloquence, ils oublient de nous renseigner sur ses parents, sur ses premières années de vie religieuse, sur les circonstances dans lesquelles il a vécu, sur le milieu qui l’a formé et dans lequel il a reçu la formation littéraire et la science qui se manifestent dans ses sermons. Pour la plupart de ces détails nous sommes réduits à des conjectures. Entré dans l’ordre, à une date inconnue, à Ratisbonne, il y eut probablement pour maître des novices le célèbre mystique David d’Augsbourg, qui plus tard sera son ami et son compagnon de mission. Fr. M. Henquinet admet qu’il doit avoir été envoyé de bonne heure au Sludium générale de Magdebourg, où il eut pour professeurs Barthélémy l’Anglais, dont il a mis abondamment à profit dans ses sermons le De proprietatibus rerum, et un certain frère Marquardus, qui l’initia au droit. Le même auteur affirme que Berthold fut peut-être lecteur dans le court espace qui va de la fin de ses études jusqu’au début de son ministère, et qu’il aurait composé à cette époque une Expositio super Apocalypsim, non encore retrouvée, mais louée par Salimbene. Toujours d’après le même auteur, Berthold aurait commencé le ministère de la parole vers 1235-1237 en Bavière (Dicl. hist. géogr. ecclés., t. viii, col. 980). La première donnée précise touchant Berthold est une notice d’une chronique d’Augsbourg, qui signale, comme un événement, qu’en 1240 il prêcha dans cette ville. Les archives du monastère de Niedermiinster à Ratisbonne rapportent que, le 31 décembre 1246, Berthold et David d’Augsbourg, avec deux chanoines de Ratisbonne, furent chargés par le légat pontifical Philippe de faire la visite des communautés des nobles moniales de Niedermiinster et d’Obermunster à Ratisbonne. Il faut conclure qu'à cette époque Berthold devait déjà être un homme mûr et que, par conséquent, il a dû naître tout au début du xme siècle, et non en 1220 comme le soutiennent les anciens auteurs.

A partir de cette époque les chroniques fournissent des renseignements sur la date des tournées successives de Berthold. Après 1240, il évangélisa l’Allemagne du Sud et la Suisse ; en 1253, il poussa jusqu’en Bohème. Dès lors les missions lointaines le prennent tout entier et nous le voyons parcourir sans relâche toutes les régions de langue allemande, flagellant le vite et exhortant le peuple à la vie chrétienne intégrale, soutenant les faibles et les pauvres, luttant contre les nombreuses sectes hérétiques, s’efforçant de rétablir la paix et la concorde. En 1254, il est à Spire et, en 1255, des documents authentiques le signalent en Bavière, en Suisse, dans la vallée du Rhin, en Bohème, où il eut fr. Pierre pour interprète. En 12571258, il évangélise la Silésie et, en 1262-1263, il prêche en Hongrie, où il ramena à l'Église un grand nombre de chrétiens déchus et combattit les flagellants et les juifs usuriers. Pendant ses pérégrinations apostoliques Berthold exerça aussi les fonctions de diplomate et