Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 13.2.djvu/105

Cette page n’a pas encore été corrigée
1623
1624
RABBOULA


capitale. Mais le discours ne serait-il pas un faux ? Cf. E. Schwartz, Konzilstudien, Strasbourg, 1914, p. 23, n. 1.

Mais, dans l’hiver de 430-431, Rabboula va être amené à prendre plus catégoriquement position. An die de Samosate vient, sur l’ordre de Jean d’Antioche, de composer sa réfutation des anathématisines cyrilliens. Rabboula s’en émeut et écrit à son voisin une Ici Ire partiellement conservée. Overbeck, op. cit., p. 222. La doctrine soutenue par André lui paraît inquiétante, pour ne pas dire plus. La distinction des natures, après l’union, risque, dit-il, d’introduire la vieille distinction (déjà condamnée) des deux fils. A la suite de cette lettre, Overbeck publie un fragment d’une missive d’André à Rabboula, ibid., p. 223, mais ce ne peut être une réponse à la lettre précédente ; il y est fait allusion à une condamnation publique que Rabboula aurait prononcée contre son collègue de Samosate, geste certainement prématuré à cette date.

Cependant le concile qui, dans la pensée de Théodose, devait dirimer le conflit entre Nestorius et Cyrille se réunissait à Éphèse, à la Pentecôte. Rabboula s’y rendit avec les autres évoques « orientaux », conduits par Jean d’Antioche. On sait que la représentation antiochienne arriva avec du retard, alors que la condamnation de Nestorius avait déjà été prononcée par la majorité groupée autour de Cyrille. Art. Nestorius, col. 114. Les « Orientaux » se forment eux-mêmes en un concile rival qui condamne l'œuvre de l’assemblée cyrillienne. Or, il semble bien que Rabboula, dans l’occurrence, ait suivi son chef, le patriarche d’Antioche. Cela résulte du fait que sa signature se lit, avec celle de ses collègues d’Orient, au bas de deux lettres adressées par le concile de Jean, l’une au peuple de Hiérapolis, l’autre aux délégués qui avaient été envoyés à Constantinople. Voir Synodicon Casinense, n. 96, 116, dans Schwartz, Acla concil. œcum., t. i, vol. iv, p. 45 et 67. Il n’y a pas lieu de s’arrêter à une conjecture faite, il y a longtemps déjà, par M.-J. Lafrange, selon laquelle le nom de Rabboula aurait été indûment ajouté à la liste des signataires. Mélanges d’histoire religieuse, p. 214.

Quoi qu’il en soit d’ailleurs, Rabboula, qui ne semble pas avoir eu d’hésitation au point de vue doctrinal, ne tarderait pas à se rallier complètement à la personne même de Cyrille. Si l’autorité de Jean d’Antioche avait pu le retenir, à Éphèse, dans le groupe des « Orientaux », à peine fut-il rentré à Édesse qu’il changea brusquement d’attitude. Cf. Wright, A short history of syriac lileralure, p. 47. Très vite, il fut considéré dans la Syrie euphratésienne comme le grand défenseur de Cyrille, le grand adversaire de la théologie antiochienne. Dans une lettre adressée par André de Samosate à Alexandre de Hiérapolis, un peu avant Pâques 432, Rabboula est dénoncé comme ayant cédé à des sollicitations venues de Constantinople, et comme s'étant déclaré ouvertement contre la doctrine antiochienne. Syn. Cas., n. 132 (43), Act. conc. œcum., loc. cit., p. 86 ; P. G., t. lxxxiv, col. 649. (Le texte fourni par Schwartz supprime une difficulté que Laissait le texte revu : il faut lire non pas in Constantinopoli suscipiens lilteras, ce qui supposerait un voyage de Rabboula à la capitale, mais a Conslantinopolim (sic) suscipiens lilteras). Dans les milieux « orientaux « on envisagea même L’hypothèse de rompre la communion avec l'évêque d'Édessc ; cf. Syn. Cas., n. 133(44), ibid., p. 87 et col. 650 ; n. 189 (101), ibid., p. 136 et col. 71(5. Les négociations qui se nouèrent alors autour de « l’Acte d’union » calmèrent un instant les esprits.

S’il était mis de côté par ses collègues de l’Orient, Rabboula se rattachait avec d’autant plus de force à Cyrille. Des relations assez suivies se nouèrent entre

eux dont il nous reste quelques témoignages dans des fragments de lettres. Rabboula signalait au patriarche le regain de faveur que trouvaient en ce moment les écrits des premiers docteurs antiochiens, Diodore et Théodore, que les partisans de Nestorius mettaient en circulation. Fragment dans Overbeck, op. cit., p. 225 ; plus complète dans les Actes du Ve concile. Mansi, Concil., t. ix, col. 247. Cyrille répondit en encourageant les efforts de l'évêque d'Édesse, et en lui adressant son traité De incarnalionc Unigenili, de même qu’il lui avait expédié antérieurement le Ilepl -rîjç op07 ( ç raoTecoç. Une traduction syriaque de ces ouvrages sciait très opportune pour combattre les erreurs des Antiochiens. Overbeck, op. cit., p. 226, texte plus complet que celui qui est donné dans les Actes du Ve concile. Mansi, ibid., col. 245. Au cours des négociations relatives à l’accord avec Jean, Cyrille prit encore l'évêque d'Édesse pour son confident. Voir Syn. Cas., n. 196 (108), Acl. conc. œcum., loc. cit., p. 140 ; P. L., t. lxxxiv, col. 721 ; cf. une autre lettre de Cyrille à Rabboula publiée par I. Guidi d’après le Val. si/r. 107 dans Rendiconli délia li. Accademia dei Lincei, 1886, p. 546, note 2. L'évêque d’Edesse entreprit alors la traduction des œuvres cyrilliennes. Il est certain que la version syriaque du Ilspi tîjç ôpQîjç 7TÎCTTea)ç, contenue dans Vadd. 14 557 du Rritish Muséum, est de lui. Texte publié dans Bedjan, Acla marlyrum et sanctorum, t. v, p. 628-696 ; cf. Wright, Catalogue of syriac mss. in British Muséum, t. ii, p. 719. A. Baumstark est d’avis qu’on pourrait attribuer aussi à Rabboula la traduction d’autres écrits cyrilliens : IIpx roùç tîjç àvaToXîjç èmax<$7rouç ; Hpôç toÙç ToXjxc7jv-aç auvv)Yopsïv toïç Nsaropîou S6y(i.a(Jt.v ; "On elç ô Xpiaxôç ; Ilspl èvxvOpoOTïjascoç toj Movoyevo’jç. Gesch. der syr. Lilcr., p. 72, où l’on trouvera l’indication des mss. contenant ces traductions.

En même temps qu’il diffusait ainsi la « bonne doctrine », Rabboula combattait énergiquement la doctrine opposée. Il faisait aux écrits des Antiochiens une guerre acharnée. Dans sa ville épiscopale même il aurait ordonné la destruction des livres de Théodore. Cf. Assémani, liibl. orient., t. m a, p. 86 ; t. m b, p. 73. Il interdisait à ses moines et à ses prêtres de jamais posséder ces ouvrages, leur ordonnant de s’adonner à l'étude de la vraie foi. Canons 10, 26, 75. Overbeck, op. cit., p. 215 ; cf. Nau, Les canons et résolutions de Rabboula, p. 79-91. André de Samosate, dans sa lettre citée plus haut, .Syn. Cas., n. 132 (43), et adressée à Alexandre de Hiérapolis, déclare qu'à Édesse Rabboula se comporte comme un tyran. Mais son action contre la doctrine antiochienne s’exerce aussi à distance ; il semble bien être, avec Acace de Mélitène, L’instigateur de la lutte contre les écrits des maîtres antiochiens qui se déclenche alors en Arménie. Voir la lettre de Proclus aux Arméniens, dans Mansi, Concil.. t. v, col. 421. Le panégyriste de Rabboula déclare avoir réuni « quarante-six lettres de l'évêque adressées aux prêtres, aux empereurs, aux principaux personnages et aux moines » ; il se proposait de les traduire du grec en syriaque < afin que ceux qui les liront apprennent quelle ardeur enflammait son zèle divin ». Cette collection, qui serait précieuse pour l'étude des origines du monophysisme syrien ne s’est pas conservée comme telle.

Cette action se heurtait d’ailleurs, à Édesse même, à une rude opposition ; 1' « École des Perses » n’entendait pas se laisser déposséder de la théologie à laquelle elle s'était ralliée. Ibas, prêtre de Rabboula, en était alors le docteur le plus en vue. C’est vers ce moment, peu après la conclusion de l’accord de 133, qu’il adressait a Mari le Perse, évêque d’ArdaSir, la fameuse lettre où Cyrille est si malmène et où Uabboula est appelé le tyran d'Édesse ». Voir Mansi, op. cit.,