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    1. PROTESTANTISME##


PROTESTANTISME. LES DIVERSES CONFESSIONS

déclarent que ce sont de simple nuances qui séparent les groupements. Nous savons qui © sont parfois « les fossés, que l’on n’a pas encore comblés après tanl d’efforts de concentration et d’appel I o cuménisme.

l u Chez les luthériens, les sectes avaient été fort nombreuses et lori irritées les unes contre les antres, du vivant même de Luther et pendant tout le xvie siècle. La scolastique luthérienne du icvir 3 siècle avait multiplié encore davantage les dissidences. Mais, après la victoire de la pensée de Lessing, le luthéranisme a abandonné les thèmes scolastiques ou théologiques qui le divisaient et s’est trouvé comme transformé, dans une nouvelle manière d’être.

Nous ne parlerons pas des sectes issues du luthéranisme : il n’y a aujourd’hui que des formes politiquement plus ou moins fidèles à la notion ecclésiologique de Luther, où se meuvent des fidèles partagés entre des multitudes de systèmes religieux. Ceux-ci, ou bien se réfèrent à la doctrine originelle de Luther, qu’ils tâchent de conserver, même s’ils la déforment, et ils constituent l’aile droite ou orthodoxe du luthéranisme ; ou bien se livrent à toutes les hardiesses de l’exégèse moderne, sans souci de la pensée de Luther ; ils constituent l’aile gauche ou libérale ou libre penseuse. Cela pour la doctrine. Quant au type ecclésiastique, il varie avec les traditions politiques de chaque pays. En Suède, le luthéranisme est resté très conservateur : Gustave Vasa n’en voulait pas au culte romain, à son rite, à sa hiérarchie. En Suisse, il a subi l’influence démocratique et zvdnglienne ; il est devenu asacramentaire et très laïque. En Allemagne, il est fort mêlé ; là où le calvinisme ne l’a pas imprégné, il est encore særamentaire et ritualiste ; ailleurs, fort voisin du calvinisme.

C’est là l’aspect général dont nous analyserons bientôt les détails.

2° Quant au calvinisme, les schismes les plus terribles n’ont pas tardé à le déchirer. Nous ne rappellerons, pour le passé, que la scission voulue par Castellion, le véritable ancêtre du calvinisme actuel ; le schisme des sociniens ; le schisme arminien, aux Pays-Bas ; le schisme des latitudinaires, qui déchirèrent l’Église calviniste pendant les xvir 8 et xviiie siècles ; le schisme de l’unitarianisme au xixe siècle, qui est, en somme, une résurrection des thèses sociniennes.- Ce dernier schisme affaiblit surtout les Églises calvinistes hongroises, anglaises, américaines.

Plus près de nous, le calvinisme a été profondément divisé par la querelle qui, en France, mit aux prises orthodoxes et libéraux. Commencée vers 1840, arrivée à sa phase critique vers 1880, relancée sur une voie nouvelle vers 1890, elle n’a cessé de provoquer les discordes parmi les adeptes de Calvin, qui se proclament orthodoxes quand ils conservent la doctrine de l’inspiration biblique, de la divinité du Christ, de la rédemption par la mort du Christ ; ou libéraux, quand ils abandonnent tous les points doctrinaux à la science rationaliste, en affirmant l’entière liberté du chrétien en matière de dogme. Il y a donc autant de sectes libérales qu’il se produit de manières d’expliquer le contenu dogmatique du christianisme. Et même se déclarent réformés libéraux certains théologiens qui, sans croyance positive au contenu traditionnel de l’Évangile, estiment suffisant de se dire du Christ. C’est plus une attitude qu’une foi ; une adhésion pleine de réticences qu’un abandon de disciple croyant.

Cette séparation théorique des orthodoxes et des libéraux dans le calvinisme actuel date des événements suivants. Au milieu du xix° siècle, les éléments libéraux ou latitudinaires menaient une campagne fort vive contre les orthodoxes. Pour se protéger, ceux-ci invoquèrent la constitution même du calvinisme français, qui remettait au pouvoir séculier le droit et la charge de punir les trublions. Les libéraux, ainsi mena cés, prirent le parti de dénoncer l’ingérence de l’État et réclamèrent la liberté, par la formation d’Églises libres. Vinet, Frédéric Monod et le comte de Gasparin

commencèrent une campagne de presse, qui aboutit.

Des communautés lurent organisées, que l’on groupa sous le nom d’Églises évangéliques <lr France (1819). (.’était une pépinière de hardis théologiens par qui la doctrine calviniste fut malmenée et pour ainsi dire pulvérisée. Mais, à travers Calvin, la doctrine chrétienne était, par eux, sensiblement atteinte. En 1872, on essaya, malgré les plus sombres pronostics, de tenir un synode national. Les calvinistes n’y employaient plus la même langue et ils ne s’entendirent sur aucun point ; il fallut clore l’assemblée. Il y eut désormais deux fractions rivales et ennemies : la secte orthodoxe, qui s’appelle aujourd’hui Églises évangéliques et la secte libérale, ou fit/lises réformées.

En 1906, les deux groupes essayèrent, à Jarnac, de trouver un terrain d’entente, mais ils provoquèrent la formation d’une troisième secte qui, n’ayant pu vivre, se fondit en 1912 avec le groupe des libéraux ou Églises réformées.

Cette division entre disciples de Calvin a franchi les frontières de la France. Partout où le calvinisme s’était implanté : en Hongrie, en Bohême, aux Pays-Bas, en certaines parties de l’Allemagne et du nouveau monde, il faut distinguer le fidèle croyant ou orthodoxe et le disciple émancipé ou libéral.

Ces deux cadres abritent d’ailleurs de multiples formes d’orthodoxie et de plus nombreuses espèces de libéralisme libre penseur. On doit y faire entrer, sur la foi de leur parole, de véritables agnostiques, qui n’admettent plus rien du christianisme positif, mais qui se réclament vaguement du Christ de leur conscience, déclaré plus vrai que le Christ de l’histoire. On ne saurait suivre les innombrables degrés par où passe un christianisme de moins en moins consistant.

3° C’est surtout l’anglicanisme qui a produit les sectes les plus hétéroclites.

On sait comment les confessions non conformistes ont apparu dès le règne d’Edouard VI et comment l’inlluence calviniste a peu à peu corrompu la doctrine primitive du Prayer book (éditions de 1549 et de 1552°. Les efforts d’Elisabeth pour organiser V Église établie ne furent pas plus heureux ; les schismes surgirent de tous côtés. Mais c’est surtout aux environs de 1840 que l’anglicanisme subit sa transformation la plus profonde. Le mouvement d’Oxford l’a ébranlé et obligé à se scinder en fractions rivales. Les anglicans qui refusèrent de suivre Newman jusqu’à Borne et restèrent à la suite de Pusey constituèrent bientôt un groupe A’anglo-catholiques, ou ritualistes, ou puseyisfes, que l’on appelle ordinairement aujourd’hui la Haute Église. A l’opposé, la Low Church prétend conserver l’anglicanisme traditionnel. Mais, à sa gauche, s’est constitué un groupe agissant de latitudinaristes, libéraux, modernistes, voire libres penseurs, qui forment la Broad Church. Nous rattacherons à l’Église anglicane l’Église protestante épiscopale des États-Unis, qui date des environs de 1790. Sa constitution intérieure est identique à celle de l’Église anglicane, sauf qu’elle ne connaît pas d’archevêque-primat.

L’Église presbytérienne, fondée en 1560 par J. Knox. de type calviniste, se distingue nettement de l’Église anglicane par sa confession et son organisation démocratique. Cependant, l’anglicanisme y compte une branche, mais qui s’est détachée du tronc principal. Cette Église anglicane est disestablished, ou indépendante de l’État. Reconnu par Guillaume III comme Eglise officielle ou Established Church of Scotland, le presbytérianisme ne tarda pas à donner naissance à de nombreux schismes.

Le premier fut l’œuvre du pasteur Archibald Came-