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PRÉDESTINATION. L’AFFAIRE DE GOTESCALC


objectionum Vincentianarum, des passades de Gennade : De ecclesiasticis dogmalibus, presque tout le livre VI de VHypomnesticpn, où est inculquée cette règle qu’il l’ait sienne : Tenenda est igitur inconcusse hujus disputationis regala, peccatores in ihalis propriis, antequam essent in mundo. prsescitos esse tantum, non priedestinatos, pamam autem cis esse prsedestinatam secundum qaod prsescili sunt… Qui oero secundum propositum Dei oivunt, præscitos esse et prædestinalos electione gratuite gratise ejus et regnum eis eœlorum esse prædeslinatum sine dubitationibus dicendum est. Col. 1549-1550.

L’opuscule, presque tout fait de citations, se termine par un résumé de la doctrine de Rhaban ainsi conçu :

Ecce liabes, dilectissime frater, qtiod petisti : Scnsum orthodoxorum atque catholicorum Pat mm breviter in uno libello constructum de prsescientia et prsedestlnatione, de gratia et libero arbitrio : Restât ut credas… Deiim pnescisse bonos et malos tuturos : bonos autem tantum ut vitam eetemam accipiant prédestinasse ; malos vero in aeternum perituros tantum pnescisse, non prædesti nasse. Gratia autem Dei quotquot salvi fièrent salutem adipisci. Libero autem arbitrio, quod per primi hominis lapsum corruption fuerat, cum divina bonitas illud secundum smun placitum regere voluerit, mercedem promereri possc perpetuam. Cum autem homo illo abutitur per superbiam, non gloria ejus, sed pœna dignum esse perpétua. Occulta autem atque sécréta Dei, quasoli patent eognitioni divina’, neminem scrutari debere. ne plus volens sapere quam oportet sapere, pro veritate falsitatem, et pro recta fide maximum errorem sequendo. in interitum décidât sempiternum. P. L., t. c.xii, col. 1553.

A peu près en même temps. Rhaban Maur écrivait au comte Eberhard, accusant Gotescale d’enseigner quod prædeslinalio Dei omnefn hominem ila eonstringal Ut, etiamsi quis velil salvus fieri, et hoc fide recta atque bonis operibus cerlet ut ad vitam leternam per Dei graliam venial, frustra et incassum laboret, si non est pradestinalus ad vitam, quasi Deus prcedesiinalione sua cogal hominem inlcrire, qui auctor est salulis noslrx. Ibid., col. 1554. Le résultat de cette prédication est déplorable. Les gens qui l’entendent se disent : « si je suis prédestiné, je serai sauvé quoi que je fasse. Si je suis prédestiné à lamort, j’ai beau faire, je suis damné », d’où présomption ou désespoir. Gotescale prétend s’appuyer sur saint Augustin. C’est de l’impudence, car saint Augustin défendait la grâce, il ne détruisait pas la vraie foi. Rhaban tait un petit traité au comte, en reproduisant certains passages de Prosper, déjà utilisés en partie dans la lettre de Xoting, mais il ne transcrit pas les extraits de YHypomneslicon. Comme à Xoting, il rappelle à Eberhard combien la discrétion est nécessaire en face d’un si impénétrable mystère, et l’exhorte, car il le tient pour un excellent chrétien, à faire effort pour détourner de l’erreur ceux qu’il trouvera séduits. P. L., t. cxii, col. 1553-1562. Noyée, comme trop souvent, dans les citations patristiques, l’idée personnelle de Rhaban Maur ne parvient pas à émerger ; il est assez malaisé de classer l’abbé de Fulda soit parmi les augustiniens modérés, soit parmi les augustiniens intégraux. Quelques mots sembleraient indiquer qu’il admet la prédestination posl prævisa mérita.

2° Condamnations de Gotescale à Mayence (848) el à Quierzy(849). — Cependant Gotescalc, après avoir travaillé comme missionnaire dans la Grande-Moravie, était rentré à Fulda, dont Rhaban n’était plus abbé. C’est de Fulda qu’il se rendit, en octobre 848, à la diète de Mayence espérant sans doute pouvoir faire connaître sa doctrine, et peut-être convaincre Rhaban Maur, archevêque depuis 8 17, de semi-pélagianisme.

1. Le synode de Mayence.

Gotescale remit au concile une profession de foi, et adressa à Rhaban un libelle où il réfutait les erreurs commises par celui-ci

dans son traité adresse à Noting. L’archevêque de Reims, Hincmar, en a transcrit des fragments dans son deuxième (3e) traité de la prédestination. Ces fragments recueillis par Mauguln sont réimprimés dans P. L., t. cxxi, col. 365-366.

De la profession, liinemar nous a conservé ces lignes : Ego Gothescalcus credo et con/ileor, pro/itcor el testi/icor ex Deo Paire, per Deum fllium, in Dca Spiritu sancto et affirma atque approbo coram Deo et sanctis ejus quod gemina est prsedestinatio, sive electorum ad requiem, sive reproborum ad morlem quia, sicut Deus incommutabiliter per graluitam graliam suam prsedestinavit ad vitam nlernam, similiter omnino omnes reprobos, qui in die judicii damnabuntur propter judicium suum incommutabiliter prædestinavil ad mOTtem sempiternum. P. L., t. cxxi, col. 368. Hefeie, qui transcrit ces lignes, remarque : « Si Gotescale voulait dire que la prédestination à la mort est absolue, tout comme la prédestination à la vie — et c’est en effet le sens qui résulte de ces deux mots similiter omnino — il est incontestablement hérétique, et la suite, à savoir que « les réprouvés seront condamnés au jour du jugement à cause de leurs péchés « laisse subsister l’hérésie. Calvin lui-même eût pu s’exprimer ainsi et il l’a fait. « Quoique, dit-il, ceux-là pèchent nécessairement qui y « sont prédestinés, ils n’en seront pas moins jugés et « condamnés au jour du jugement à cause de leurs « péchés, parce qu’ils ont fait de plein gré ce qu’ils « ont fait nécessairement ; en effet, ce n’est pas la « nécessité mais bien la contrainte physique qui peut « seule enlever, la responsabilité. » Il faut dire toutefois que Gotescale ne s’est jamais exprimé aussi nettement que Calvin, soit que l’aboutissement logique de son propre système lui ait échappé, soit qu’il n’ait pas osé en parler plus clairement. Hist. des conciles, trad. Leclercq, t. iv, p. 146-147.

A moins, ajouterons-nous, que Gotescale ait simplement voulu assimiler la réprobation et la prédestination au point de vue de la certitude et de l’immutabilité, ex parle Dei — à ce point de vue la similitude est totale — sans nier pour autant la liberté de l’homme qui fait le mal uniquement par sa faute, ni.non plus la liberté de l’homme qui fait le bien par la grâce ; sans prétendre que Dieu soit l’auteur du mal qui damne, comme il l’est du bien qui sauve. C’est en ce sens qu’il paraît s’exprimer en particulier dans la confessio prolixior, dont nous parlerons plus loin. Voir notre article Précurseur dé Calvin ou témoin de l’auguslinisme : le cas de Gotescalc, dans Revue thomiste, 1932, p. 72-101.

Dans son libelle à Rhaban, où il interprète tendancieusement la lettre de l’archevêque à Noting, on trouve, d’après les citations d’Hincmar, quatre des cinq points sur lesquels il sera attaqué dans la suite de la controverse. Prédestination à la mort éternelle, volonté salvifique restreinte, efficacité limitée de la passion du Christ, impuissance du libre arbitre à faire le bien. Mais il est difficile de dire l’exacte portée que Gotescalc donnait à ces formules assurément fort dures et qui ne pouvaient être prises en bonne part qu’avec des gloses adoucissantes et bienveillantes. Si l’on en juge par les citations d’Hincmar, les thèses aUgustiniennes s’y produisaient d’une manière extrêmement tranchante.

a) Sur la prédestination : Tandem legi librum. venerande pontifex tuum (il s’adresse à Rhaban) in quu positum re/ieri quod impii quoque sive reprobi non sinl divinitus ad damnationem prædeslinati. A quoi il oppose : Pncscivit, inquam, illos pessimum habituros orlum, pejorem obilum ; prædestinavil autrui eos ad luendum perenne lormentum et sempiternum interitum… (on voit que c’est une réprobation positive post prævisa démérita). Qui rêvera sirul eledOS mniies prtrdesti-