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    1. PRÉDESTINATION##


PRÉDESTINATION. LES PEKES APOSTOLIQUES

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3° En dehors de saint Paul, l’on ne trouve, dans le Nouveau Testament, autant dire rien que, je ne dis pas le théologien, mais L’exégète puisse entendre de la prédestination. Mentionnons seulement 1 Pet., i, 1 sq. : i Pierre, apôtre de Jésus-Christ, aux élus de la dispersion. .., suivant la préconnaissance de Dieu le Père, dans la sanctification de l’Esprit, pour l’obéissance (de la foi) et l’ablution du sang de Jésus-Christ… », où élus > équivaut à « appelés ».

Pour les monographies plus anciennes, voir F. Prat, La théologie de saint Paul. t. n. i : 5 c éd., Paris. 1927, Bibliographie, 3 : Théodicée i’t prédestination. — Comme monographie ^ plus récentes, citons : E.B.Allo, Versets - 8-30 du c. VIII Ad Romanos, dans Rev.des se. pli. et l/i..1913 ; M.-J. Lagrange, Saint Paul et la prédestination, dans Êpîlre aux Romains, Paris, 1916, p. 244 sq. ; A. d’Alès, art. Prédestination, dans Diti. apolog. de la foi catholique, t. iv, Paris, 1922 ; F. Prat, La théologie de saint Paul, t. i, 15e éd., 1927 ; F.-W. Maier, Israël in der Heilsgeschichte nach Rom., 9-11, Munster-en-YV., 1929 ; A. Chante, L’incrédulité des juifs dans le Nouveau Testament, (ienibloux. 1929.

A. Lemonnyer.

II. LA PRÉDESTINATION D’APRÈS LES PÈRES GRECS. — Pour des raisons historiques, dans lesquelles les intentions polémiques eurent, sans doute, quelque part, la question suivante s’est trouvée posée entre les théologiens au début du xviie siècle : les Pères grecs, pris dans leur ensemble, ont-ils enseigné la prédestination anle prsevisa méritai ou, au contraire, sont-ils partisans de la prédestination post prævisa mérita’! Petau, entre autres, contre son confrère Didace Ruiz de Montoya (De privdestinalione ac reprobalione hominum et angelorum, 1628) prend nettement parti pour la seconde des deux solutions.

Theologus alter (Ruicius)… de pra^destinatione ingens nuper volumen elucubravit. in quo illos ipsos Grsecos Patres asserit aperte fateri pr : edestinationem causam esse meritoruni et glorisr- ; adeoque non propter prsevisa mérita constituisse Denm certos hommes ad salutem eximere : sed ex eo potius, quod illos saluti destinât, gratiam et bona mérita largiri… l’nde ad Augustinianum sensum illorum revolvi dogma putat ; prins ut gloriam quibusdam dare statuerit Liens ; tum vocationem. primam gratiam ac deinceps reliquas ordinarit. Atqui neutrum horum, meo quidem judicio, Patrum illorum doctrinaconsentaneum est. Petau, De theologicis dogmalibus, t. i, De Deo, Deique proprielatibus, I. IX, De preedeslinatione, c. v, n. 5, Venise, 1721, t. i, p. : 5Ô9 a ; ibid., t. X, c. ii, n. 1, p. 398 a.

Thomassin, au contraire, entend prouver, sur le même point, l’accord de la théologie grecque avec celle du docteur africain : Commilitones ergo Augustino ubique, nusquum adversarios in graliæ disceptationibus cœteros Patres omnes demonslndurus, græcos primum aggrediar. Et parmi les doctrines, au sujet desquelles il entend affirmer l’unité de la tradition, le savant oratorien mentionne expressément : de necessitale graliæ cmnia mérita prævenienlis : de prædestinatione electorum secundum gratiam, non secundum mérita ulla. Dogmata theologica, t. ii, De Deo, t. IX, c. vii, n. 1, éd. Vives, t. ii, p. 217.

Qu’il suffise de mentionner ici les protagonistes des deux écoles entre lesquelles se partagent les théologiens des xviie et xviiie siècles, les uns tenant les Pères grecs pour des témoins authentiques de la prédestination unie prævisa mérita, les autres, au contraire, retrouvant chez eux la thèse de la prédestination post prœvisa mérita. Or, si l’on en juge par certains travaux récents, il ne semble pas que l’opposition ait cessé sur ce point entre théologiens ; la question paraît encore fixée dans les mêmes cadres, un peu schématiques, dans lesquels elle reste traditionnellement posée.

Cependant, si l’accord n’est point fait sur l’essentiel de la solution, il semble que l’on s’unisse pour reconnaître, en ces matières, l’unité de la pensée théologique grecque. Le R. P. Prat en fit naguère la remarque à

propos de l’exégèse d’un texte de l’épître aux Romains (vin, 28-30). Il écrit, dans l’une des notes de sa Théologie de saint Paul : % Autant qu’il est possible d’en juger, tous les écrivains grecs qui se sont occupés de notre texte s’accordent sur les points essentiels et ne diffèrent que par des détails d’interprétation dont il est aisé de prouver le caractère accessoire par rapport à la question présente. » T. i, 10e éd., p. 519. Cet accord doctrinal ne présente d’ailleurs rien qui surprenne l’historien ; en effet aucun conllit n’est venu départager les Pères sur la question, et, d’autre part, la même doctrine dogmatique, formulée principalement par saint Paul, sert à la fois de point d’appui et de norme à toutes les spéculations ultérieures.

Comme Paul, en effet, et dans les mêmes termes que lui, les Pères reconnaissent que nous sommes prédestinés, justifiés et gloriliés par la grâce de Dieu. Les grandes affirmations doctrinales de l’épître aux Romains, et, plus encore peut-être, les faits mêmes qui servent de thème à l’épître : la réprobation des juifs et l’appel des gentils, orientaient puissamment les esprits vers l’affirmation du caractère gratuit des préférences divines. Il y avait là une réalité historique et dogmatique, à la fois trop vivante et trop nettement énoncée par Paul, pour que l’on pût, de quelque façon, s’en abstraire. Toutefois, et parce que précisément le point est acquis sans contestation possible, ce n’est pas de ce côté que s’oriente la recherche la plus originale ; une simple citation de l’Apôtre suffisait toujours à affirmer la souveraine liberté des choix divins. Au contraire une exclamation lancée en passant par saint Paul : « il o5v êpoGu.ev ; xr àSixîa roxpà tôj QeÇ> ; (Rom., ix, 14) ; que dirons-nous ? y a-t-il de l’injustice en Dieu ? » semble avoir retenu davantage l’attention des écrivains grecs. A cette interrogation Paul avait brièvement répondu par l’affirmation de deux faits dogmatiques : la miséricorde faite à Moïse et l’endurcissement du pharaon. Les Pères grecs, poussés par les nécessités de renseignement et de la controverse, répondront par une théologie, et par une théologie de la prescience divine.

I, Les Pères apostoliques. II. Les prédécesseurs d’Origène (col. 2818). III. Origène (col. 2822). IV. Les successeurs d’Origène (col. 2828). V. Conclusions (col. 2832).

I. Les Pères apostoliques.

1° L’épître de saint Clément de Rome aux Corinthien’; annonce déjà l’essentiel des thèmes généraux qui seront l’objet des spéculations ultérieures. On peut y distinguer une triple série d’affirmations doctrinales : 1. le salut dépend d’une initiative de la miséricorde divine ; 2. nous ne pouvons obtenir ce salut sans le concours de nos œuvres ; 3. ces œuvres vertueuses sont elles-mêmes un don de Dieu.

Le premier point de la doctrine se fonde, de très près, sur les paroles mêmes de saint Paul. Ainsi l’adresse de l’épître (Funk, Patres apostolici, 1901, t. i, p. 98) et le salut final, lxv, 2, p. 184, sont nettement d’inspiration paulinienne. Ce n’est pas là une rencontre fortuite d’expressions, puisque Clément rappelle à ses correspondants l’apostolat exercé par Paul auprès d’eux et fait allusion à la première des lettres que celui-ci leur a adressées, xlvii, p. 160. L’action divine dans l’œuvre de notre salut est ainsi décrite : Dieu, notre Père, dans sa miséricorde, « nous a fait la part d’élection », xxix, 1, p. 136 ; il choisit, par le Christ, ceux qu’atteint la prédication bienheureuse, l, 7, p. 164 ; la grâce nous est donnée par lui, xxx, 3, p. 136 ; plus exactement encore : personne n’est trouvé « capable en charité », si ce n’est ceux que Dieu a « rendus dignes » : les saints sont consommés en charité » selon la faveur de Dieu ». L’, 2-3, p. 162-164. Comme contre-partie de la même doctrine : Dieu, qui scrute nos pensées et nos désirs, enlève, quand il lui plaît, son esprit (7tvotj) qui