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PRÉ DESTIN ATI ANISM E — PRÉDESTINATION


tinatiens hérétiques et penseurs orthodoxes, rhais simplement amis ou adversaires de la doctrine auguslinienne de la prédestination aille prtevisa mérita.

La bibliographie de la controverse relative à l’existence d’une secte prédestinatienne a été donnée, pour l’essentiel dans le texte même.

Pour chacun des arguments d’histoire se reporter aux articles spéciaux concernant AUGUSTIN, Césaire, Fauste, Gennadk, Gottschai.k. Loup, Lucidus, etc., et surtout aux diverses parties de l’article Prédestination.

É. Amann,

    1. PRÉDESTINATION##


PRÉDESTINATION. — I. La prédestination dans l’Écriture. IL La prédestination d’après les Pères grecs (col. 2815). III. La prédestination d’après les Pères latins et particulièrement d’après saint Augustin (col. 2832). IV. La controverse sur la prédestination au ixe siècle (col. 2901). V. La prédestination d’après les docteurs du Moyen Age (col. 2934). VI. La prédestination selon le protestantisme et le jansénisme (col. 2959). VIL La prédestination selon les théologiens postérieurs au concile de Trente (col. 2964). VIII. Partie théologique (col. 2989).

I. LA PRÉDESTINATION DANS LA SAINTE ÉCRITURE. — La prédestination se définit le divin propos de conduire à la vie éternelle certaines personnes nommément désignées. L’Écriture connaît-elle un tel propos coéternel à Dieu, immuable et infaillible ?


Notre point de vue en cette recherche est celui de l’exégète, dont la compétence s’arrête aux énoncés exprès de l’Écriture, qu’il a charge de reconnaître et de mettre en lumière. Le rôle du théologien a beaucoup plus d’étendue. Il lui appartient de dégager, par voie d’analyse conceptuelle, le contenu implicite des énoncés scripturaires et d’en exploiter, par voie de raisonnement, les virtualités. Le P. Lagrange s’en explique en ces termes à propos des c. ix-xi de l’épître aux Romains : « C’est le devoir de l’exégète de déterminer le plus exactement possible la portée directe de l’argumentation de saint Paul ; c’est le droit du théologien de tirer de ces principes des conclusions. » Épître aux Romains, Paris, 1916, p. 244. On voudra bien ne pas perdre de vue ce juste partage des rôles, dont l’importance méthodologique et réelle est considérable.

I. Dans l’Ancien Testament. — 1° L’exégète en quête de documents scripturaires Sur la prédestination à la vie éternelle, se heurte, pour ce qui regarde l’Ancien Testament, à une question préalable. L’idée de vie éternelle s’y rencontre-t-elle sous sa forme propre et en des énonciations expresses ?

Deux grandes espérances, apparentées entre elles, s’affirment distinctement dans l’Ancien Testament : celle de la félicité messianique et celle du règne de Dieu. Nous n’avons pas à les étudier ici pour elles-mêmes et dans la complexité de leur évolution historique. Nous ne pouvons cependant nous dispenser d’en dire quelque chose, attendu que, si l’idée de vie éternelle a trouvé son expression dans l’Ancien Testament, ce ne peut être qu’en liaison avec elles.

L’idée de règne de Dieu s’avère la plus riche des deux. Nous la voyons prendre, surtout à partir de l’exil, un développement considérable et tirer peu à peu au jour celle de vie éternelle, qui est la vie sans fin et bienheureuse des ressuscites avec Dieu dans les cieux. Sans doute, nous pressentons la prochaine émergence de cette notion de résurrection et de vie céleste dès le temps de Jérémie et d’Ézéchiel. Nous la voyons poindre dans certains psaumes et dans Job. Cependant, elle n’apparaît en clarté que dans Sagesse, iii, 1 sq. ; v, 15 sq., et dans II Mach., vii, 9 ; cf. Lagrange, Le livre de la Sagesse, sa doctrine des fins dernières, dans

Rev. bibl., 1907, p. 93 sq., et Le règne de Dieu dans l’Ancien Testament, ibid., 1908, p. 58 sq. La littérature juive post canonique, surtout rabbinique, fait à la notion de vie éternelle une place considérable ; cf. Lagrange, Le messianisme chez les Juifs, Paris, 1909, p. 158-175. Dans ces conditions, l’on ne doit pas s’attendre à ce que la prédestination à la vie éternelle ait beaucoup de relief dans l’Ancien Testament.

2° Y est-elle seulement énoncée en forme distincte et telle que la veut l’exégète ? Le dépouillement critique des livres de l’Ancien Testament, même de ; plus récents, le laisse plutôt déçu. Sans doute, il a l’impression de se mouvoir dans une atmosphère religieuse favorable à l’éclosion de cette idée. Les propos de l’Écriture sur Dieu et sur ses relations avec sa créature, ceux-là surtout qui ont trait à l’élection messianique d’Israël, ne peuvent pas ne pas le rendre attentif. Cependant, la formule expresse qui le fixerait lui échappe toujours. Même le cas du « serviteur de Jahvé », au livre d’Isaïe, lui paraît trop spécial pour autoriser une affirmation générale. La récolte du théologien sera peut-être intéressante. La sienne est pratiquement nulle. Touchant ces deux idées conjointes de vie éternelle et de prédestination à la vie éternelle, le langage de l’Ancien Testament ne lui paraît pas encore parvenu à un degré suffisant d’explicitation réelle et de précision conceptuelle pour livrer des formules toutes faites à notre théologie.

Saint Paul a repris et commenté, en trois admirables chapitres, ix-xi, de l’épître aux Romains, la maîtresse doctrine de l’élection messianique d’Israël, qu’il envisage en fonction de l’appel des gentils à la grâce chrétienne et de l’incrédulité des juifs. Or, même dans cette interprétation paulinienne, qui explicite pourtant les données de l’Ancien Testament, l’opinion prévaut de plus en plus, parmi les exégètes catholiques, que la notion propre de prédestination à la vie éternelle n’est pas énoncée. F. W. Maier, qui a tout récemment soumis ces trois chapitres à un examen d’ensemble, va même jusqu’à dire qu’ils n’ont rien à voir avec la doctrine de la prédestination. L’Apôtre n’y aurait pas d’autre objectif que de définir le régime sotériologique institué par Dieu dès l’origine et dont le régime chrétien n’est que la nouvelle affirmation ; cf. Maier, Israël in der Heilsgeschichte nach Rom., 9-11, Munster-en-W., 1929. Le P. Lagrange s’en était déjà expliqué en termes plus nuancés et, croyons-nous, plus adéquats. « Ainsi donc, écrit-il, la question traitée directement par Paul n’est pas du tout celle de la prédestination et de la réprobation, mais uniquement celle de l’appel des gentils à la grâce du christianisme, ?yant pour antithèse l’incrédulité des juifs. Mais il est incontestable que cet appel est en même temps un appel au salut. On pense invinciblement au sort de chacun, on transpose les termes, on applique les principes de Paul au salut individuel. Dieu appelle à la justice par faveur. Mais ceux qui ne sont pas appelés (à la justice) ne sauraient être glorifiés. De sorte que ceux qui ne sont pas appelés vont à la perdition. Les conclusions qu’on peut obtenir par cette voie ne regardent plus l’exégèse du texte. Elles devront toujours tenir compte de deux considérations qui font certainement partie de la doctrine de Paul, quoiqu’il ne les ait pas développées ici. La première, c’est qu’il y a des appelés à la grâce qui ne persévèrent pas ; la seconde, c’est que quelques gentils avaient pu être sauvés (n, 27). On ne peut donc pas appliquer sans précaution à la prédestination éternelle et à la réprobation ce qui est dit de l’appel à la grâce du christianisme. » Ép. aux Rom., p. 246 sq. Donc : 1° il s’agit de l’appel à la grâce chrétienne et non directement de la prédestination à la gloire ; 2° il s’agit de collectivités, les gentils, les juifs, et non pas directement d’individus