Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.2.djvu/552

Cette page n’a pas encore été corrigée
2535
2536
POLYGÉNISME — POLYGRANUS (FRANÇOIS)


l’autre femelle, destinés à devenir les corps du premier homme et de la première femme, par infusion de l’âme spirituelle… Dira-t-on, pour sauvegarder le monogénisme, que, parmi ces types corporellement humains. Dieu aurait fait choix d’un seul couple auquel il aurait donné, avec l’âme spirituelle, un psychisme supérieur, et que, de ce couple unique, descendrait toute l’humanité intelligente ? Il faudrait alors expliquer par quel miracle seuls les descendants de ce couple privilégié auraient survécu, tandis qu’auraient disparu tous les produits des autres organismes de type humain, restés, au point de vue psychique, au niveau de l’animalité. » Loc. cit., col. 1845 sq.

On pourrait répondre, semble-t-il, et sans aucune invraisemblance, que les hominiens ont disparu comme les autres animaux que l’homme n’a pas domestiqués et qui sont entrés en lutte avec lui ou qu’il a traités comme un gibier, exemple les lions, les rhinocéros, les éléphants, les bisons, etc. d’Europe. Il n’y a là aucun miracle, mais un fait maintes fois observé. La raison est une supériorité qui, en ce moment encore, place des armes dans la main de l’homme et fait reculer et s’éteindre les espèces qu’il ne cherche pas à conserver. Je parle des animaux de taille notable, car les insectes et les microbes viennent, jusqu’ici, à bout des efforts de l’homme, comme le moucheron triomphe du lion.

Mais, pourquoi la nature humaine ne serait-elle pas un don gratuit de Dieu, comme la surnature chrétienne ? L’unité est un des caractères de l’action divine ; il ne s’agit pas de la chercher à tout prix et de l’affirmer arbitrairement, mais de l’accueillir quand elle se présente d’elle-même.

Le problème de la vie, dit volontiers le P. Teilhard, est un problème d’histoire. Or, précisément, de l’histoire on peut dire également qu’elle se répète et qu’elle ne se répète pas. Dans les choses humaines, à plus forte raison dans les choses inconscientes, les tentatives se répètent, les avortements, les demi-succès sont innombrables, les réussites complètes sont relativement rares et parfois uniques. Tous les grands fleuves d’Afrique ont des rapides, seul le Zambèze a une cataracte. La Grèce a eu bien des sculpteurs de génie, mais n’a eu qu’un Alexandre, l’Inde qu’un Bouddha, l’Arabie qu’un Mahomet, la France, l’humanité, qu’une Jeanne d’Arc. La mâchoire de Mauer est unique et aussi le pithécanthrope de Java.

Quand on invoque la science, c’est au nom de la science actuelle que l’on parle, et d’après des habitudes d’esprit que l’on prend trop facilement pour des exigences de la raison. Boule a pu reprocher à d’autres savants de n’avoir pas le sens des variations individuelles. Il fut un temps où « la science » croyait que la transformation des espèces devait se faire d’une manière insensible et continue ; maintenant c’est par mutations brusques. On commence à s’habituer à l’idée que la vie a de longues périodes de stabilité, mais aussi des moments d’explosion qui ne se produisent qu’en tel temps et en tel lieu. Il ne faudrait pas garder la mentalité que l’on combat, en soutenant que la mutation ne peut pas se produire uniquement dans un ou deux individus exceptionnels. Jean Bostand le dit clairement et sagement, État présent du transformisme, Paris, 1931, p. 145 : « Pour les mutatior.nistes, l’espèce nouvelle ne naît pas, comme pour les lamarckiens, dans l’organisme développé, dans le soma ; elle ne naît pas, comme pour les darwiniens, dans les germes d’une élite ; elle prend naissance dans un germe unique. L’espèce est inaugurée par un individu exceptionnel. Le mutationnisme est la théorie de l’exception, du i monstre » au sens vrai du terme. » L’auteur cite le mot de Guyénot : les mutations sont » filles du hasard », et ajoute : < C’est l’idée que soutenait,

après Empédocle et Épicure, Straton de Lampsaqué et que, déjà, combattait Aristote. »

Mais il ne faudrait pas se risquer, comme M. Bostand, à dire, ibid., p. 165 : « Étant admis qu’aucune solution de continuité ni physique, ni psychique ne sépare l’homme de l’animal. » Il faut n’avoir étudié que bien superficiellement les rapports de l’expérience avec la raison, pour s’imaginer que celle-là peut devenir automatiquement celle-ci. C’est oublier d’appliquer à bon escient la théorie de la discontinuité qu’il a fallu adopter dans le mutationnisme et qui, cette foisci, marque une séparation métaphysique et absolue. Qu’un naturaliste soutienne que Yhomo sapiens ne peut pas venir de Néanderthal, c’est de son domaine ; mais qu’il ne prétende pas que la raison vient de l’expérience, c’est de la philosophie où le naturaliste, en tant que tel, est incompétent.

Ajoutons enfin, pour remplir jusqu’au bout notre rôle de rapporteurs de la question, que l’on a essayé timidement d’émettre deux hypothèses, tout au moins de poser deux questions :

1° Le péché originel ne pourrait-il pas être le fait d’une collectivité plus ou moins nombreuse au lieu d’être celui d’un couple unique ; dans les deux cas, toute l’humanité sortirait de ces premiers pécheurs ?

2° Les analogies indiquées par saint Paul entre le premier Adam, père du genre humain, et le nouvel Adam, Jésus-Christ, n’inviteraient-elles pas à mettre l’accent moins sur la communauté d’origine de l’humanité que sur la double notion de son universelle et héréditaire culpaLilité et de son rachat intégral ?

A ces questions, nous ne tenterons pas de donner même un mot de réponse, car, nous n’avons d’autre but que d’offrir aux théologiens une documentation sur les données et les théories scientifiques ayant trait au problème du polygénisme.

Nous avons cité bon nombre d’ouvrages ou d’articles, inutile d’en répéter la liste. On trouvera une bibliographie complémentaire, surtout pour les livres un peu anciens, dans Guibert et Çhinchole, Les origines, à la fin du c. vi. Signalons, sur le sinanlhropus Pekinensis, le livre du docteur Black, Palœontologia Sinica, séries" D, vol. vii, fasc. 11, 1 vol., Péking, 1931. Voir aussi : abbé.Monclianin, dans Hérédité et races, t. iv, Juvisꝟ. 1931 ; H. Neuville, L’espèce, la race et le métissage en anthropologie, dans Archives de l’Institut de paléontologie humaine, mémoire 11, Paris, 1933.

A. et J. Bouyssonie.

    1. POLYGRANUS François##


POLYGRANUS François, frère mineur allemand qui, au xvie siècle, s’est rendu célèbre par son opposition acharnée au protestantisme. Il publia : Asserliones quorumdam Ecclesiæ dogmatum, cum ab aliis quondam, tum a lutherana faclione denuo in dubium revocatorum, Cologne, 1571 et 1577. Cet ouvrage fut mis à l’Index des livres défendus et figure encore dans l’édition de Borne, 1876. Il né figure toutefois plus dans le dernier Index publié par ordre de Pic XI. Le P. Polygranus est aussi l’auteur des ouvrages : Postillæ seu commentarii in evangelia, Lyon, 1561 ; Cologne, 1562 ; Munich, 1570, qui porte comme titre : Enarrationes in evangelia ; Postillæ in evangelia juxla ritum S. Ecclesiæ per singulas anni iolius sanetorum jerias dislributæ, Cologne, 1559 ; Postillæ epistolarum omnium, quie dominicis diebus in Ecclesia per anni circulum recilari soient, Cologne, 1560 ; Postillæ in evangelia a Pentecoste usque ad Adventum, ibid, , 1560 ; Postillæ in evangelia ab Adventu, usque ad Penlecoslen, ibid., 1580 ; In passionem Domini eruditi et éloquentes commentarii, ibid., 1560.

L. Wadding, Scriplores ordinis minorum, Rome, 1906, i>. 91 ;.1.-1 f. Sbaralea, Supplementum ad scriplores ordinis minorum, t. I, Rome, 1908, p. 206.

Ain. I i.1. : ’.in.