Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.2.djvu/271

Cette page n’a pas encore été corrigée

1977

    1. PIERRE LOMBARD##


PIERRE LOMBARD. CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES

L978

Iogues enlève presque toute valeur à leur témoignage, et les mentions des copistes médiévaux sont d’une autorité bien problématique. Les mentions qui s’appuient sur le témoignage de Langton pourraient avoir quelque valeur, notamment à propos des gloses sur Isaïe, Glossæ super glossas Isaiie, dans Paris, lat. 14 417, fol. 182-185 ; mais la forme sous laquelle se serait déployée cette activité exégétique de Pierre Lombard soulève des discussions. Faut-il la borner à des remarques personnelles, peut-être seulement orales ? est-ce une véritable activité littéraire et quelles limites faut-il lui assigner ? Autant de choses que les témoignages fournis jusqu’ici ne permettent pas d'élucider. L'œuvre exégétique immense de Langton, quand elle sera critiquement examinée d’un bout à l’autre, nous donnera peut-être un jour la clef de l'énigme. G. Lacombe, art. cité, op. cit., t. v-, 1930, p. 52 sq. ; Smalley, ibid., t. v, 1930, p. 182 et 152 sq.

A propos de tous les ouvrages de cette série, ce qui nous force à exiger des titres très nets pour l’authenticité, c’est l’unanimité des chroniqueurs et des bibliographes médiévaux, qui ne connaissent aucune œuvre authentique de Pierre Lombard, en dehors de ses Sentences, de ses gloses sur les psaumes, de ses gloses sur saint Paul et de ses sermons. La liste de ces chroniqueurs comprend l’historiographie médiévale de France, d’Angleterre, d’Italie et d’Allemagne. On peut en trouver ailleurs le détail dans l’article cité ci-dessous de la Revue d’hist. eccl. On se contentera de mentionner ici la Chronica de Guillaume d’Andres, dans Mon. Germ. hist., Script., t. xxiv, p. 725, n. 117, lig. 20-23 ; le Chronicon de Robert de Saint-Marien d’Auxerre, ibid., t. xxvi, p. 237, lig. 11-14 ; la Chronica d’Aubri des Trois-Fontaines, ibid., t. xxiii, p. 843, lig. 39-44 ; le Chronicon universale anonumi Laudinensis, an. 1163, édit. Cartellieri, LeipzigParis, 1909, p. 7 ; Raoul de Coggeshall, Chronicum anglicanum, dans Rerum brilann. Medii sEvi script., Chronicles and memorials, t. lxvi, p. 79 ; YEulogium historiarum, t. III, c. ci, Chronicles and memorials, t. ix a, p. 386 ; les Flores historiarum, même série, t. xcv b, p. 71 ; le Polychronicon de Ranulphe de Higden, I. VII, c. xix, le Chronicon de Henri de Knighton, le Chronicon monaslerii de Melsa, par Thomas de Burton, c. xvi du gouvernement d’Adam I er, dans Chronicles and memorials, t. xli, vol. viii, p. 10 et 12 ; t. xcii, vol. I, p. 135 ; t. xliii, vol. i, p. 1 1 1 ; Ptolémée de Lucques, Hist. eccl., t. XX, c. xxvii, dans Muratori, Iïerum ital. script., t. xi, col. 1108 D ; Riccolbald de Ferrare, Compilatio chronologica, dans Muratori, ibid., t. ix, col. 244 D ; la Chronica pontiftcum et imperatorum nantuana, dans Mon. Germ. hist., Script., t. xxiv, p. 218, lig. 27 ; le Chronicon de Jacques de Voragine, ibid., t. xxiv, p. 171, lig. 10 ; Seifrid de Bahnhausen, ibid., t. xxv, p. 698, lig. 22 ; le Chronicon de Martin de Troppau, ibid., t. xxii, p. 469, lig. 48 ; le catalogue de la chartreuse de Salvatorberg, près d’Erfurt, vers 1477, dans P. Lehmann, Miltelalterliche Bibliothekskataloge Deutschlands und der Schweitz, t. ii, Munich, 1928, p. 555, lig. 5-10 ; cf. aussi p. 327, lig. 11-18 ; le Spéculum historiale, t. XXI, c. i, Bibliotheca mundi, t. iv, Douai, 1624, p. 1185.

Les bibliographes médiévaux font écho aux chroniqueurs ; tel, le pseudo-Henri de Gand, De scriploribus ecclesiaslicis, c. xxxi, et appendice, c. xi, dans Le Mire, Biblioth. eccles., p. 168 et 174 ; tel, Jean Boston de Bury, qui a inventorié les bibliothèques anglaises et ne mentionne non plus que les quatre œuvres habituelles dans son Catalogus rédigé vers 1410, ms. de Cambridge, University library, Add. 3470 : « Quosdam sermones utiles composuil » ; voir J. de Ghellinck, Le catalogue des bibliothèques anglaises en 1410, dans les Procès-verbaux du congrès intern. des bibliothécaires,

1923, Paris, 1925 ; tel, Trithème, sur qui se ferme tout l’effort bibliographique du Moyen Age, qui n’a rien pu trouver d’autre malgré ses recherches. De scriptor. ecclesiast., Cologne, 1546, p. 160. Il serait souverainement étonnant que le Moyen Age, qui a si religieusement recueilli le titre des œuvres dues à Pierre Lombard, ait négligé de passer à la postérité la mention de quelques-unes d’entre elles, tandis que le nom de Langton, comme glossateur de toute la Bible, Primus medullilus et moraliter cœpil exponere, a été soigneusement conservé par le pseudo-Henri de Gand, dans Le Mire, Biblioth. eccles., p. 167. Ce fait mérite d’autant plus considération que les deux gloses reconnues comme authentiques ont été fréquemment décorées du titre de Magna glossatura comme on l’a vu plus haut.

Pour plus de renseignements sur les Dubia vel spuria, voir Les « opéra dubia vel spuria », attribués à Pierre Lombard, dans Revue d’hist. eccl.. t. xxviii, 1932, p. 829-845.


III. Analyse théologique de l'œuvre de Pierre Lombard et appréciation doctrinale. —

Le court aperçu, donné plus haut, sur les matières contenues dans les IV libri Sententiarum, facilitera l’analyse doctrinale de l'œuvre qu’il nous faut aborder maintenant ; il nous dit aussi comment Pierre Lombard, théologien, se distingue de ses contemporains. — 1° Caractéristiques générales. 2° Mode de composition et matériaux. 3° Détail des doctrines.

I. caractéristiques GÉNÉRALES.

Indiquons pour commencer quelques caractéristiques générales de l’auteur et de son œuvre.

Programme relativement complet.

S’il n’a pas su

trouver un principe de groupement fort et fécond pour nettement étreindre toutes les matières théologiques enseignées alors dans les écoles, il faut reconnaître que le Lombard est parvenu à les réunir toutes dans ce qu’on peut appeler sa synthèse. Sans doute, la grande innovation en ce point remonte au moins à Abélard et à son école, car nous ne sommes pas encore renseignés avec suffisamment de certitude sur l'œuvre propre d’Anselme de Laon pour attribuer sûrement ce progrès à la période préabélardienne et aux livres du magister Anselmus. Mais, œuvre de sec élèves ou production personnelle, les nombreux recueils de Sententia-, associés au nom d’Anselme de Laon et les nombreux témoignages qui nous affirment la grande réputation du maître et l'énorme succès de sa scola divinitatis, Abéard, Epist., i, 2, P. L., t. clxxviii, col. 122 A, cf. Mouvement théologique, p. 93-94, nous sont une preuve que l'élaboration de la synthèse théologique doit une page importante de son histoire aux initiatives de celuici, magister Anselmus, « à l'œil plus éclatant qu’une étoile », comme dit Guibert de Nogent, Commentar. in Genesim, préf., P. L., t. clvi, col. 19 D, « restaurateur des études sacrées », comme l’appelle Innocent II. Voir le Mouvement théologique, p. 92, et The « Sentences > of Anselm of Laon and their place in the codification of theology, dans The Irish theologpal quarlerhj, t. vi, 1911, p. 427-428 ; Bliemetzrieder, Anselmus von Laon systematischen Sentenzen, dans les Beitriige de Baumker, t. xviir, fasç. 2-3, 1919, p. 42 sq., 112 sq., 152-153 ; du même, Gratian und die Schule Anselms von Laon, dans VArchiv fur kalhol. Kirchenrecht, t. cvi. 1932, p. 37-63 ; H.Weisweiler, S. J., L'école d’Anselmede Laon et de Guillaume de Champeaux, Nouveaux documents, dans Rech. de théol. anc. et méd., t. iv, 1932, p. 237. Il n’y a pas lieu d’examiner de plus près ici la part qui revient strictement à Anselme lui-même dans l’initiative de ce travail de synthèse ou tout au moins de groupement ; mais l’on constate qu'à partir de ce moment le traité des sacrements, et bientôt celui des fins dernières, commencent à entrer dans la théologie,