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PIERRE LOMBARD. VIE


élément : c’est une maternité trigémellaire qui se

trouve à l’origine du groupe des trois écrivains ; niais Cave ici fait exception : la plupart des auteurs depuis Bellannin, De scriptor. eccles., Cologne, 1631, p. 235, ivec Aubcrt le Mire, Hiblioth. eccles., Anvers, 1639, p. 108 (Schclia à Henri de (iand). Laz. Aug. Cotta, Museo kovarese, Milan, 1701. p. 2.">7-238, Oudin, Commentarius de script, eccles., t. ii, Leipzig, 1722, col. 12021206, le Gallia christiana, t. vii, Paris, col. 70, et VHistoire littéraire de lu France, t.xii, 1763, p. 585, n. 2, rejettent résolument cette légendaire parenté. Un trait du même genre, à propos de la damnation d’une mire adultère, qui se rencontre dans le Spéculum Ecclesia dû à Honorius d’Autun, P. L., t. clxxii, col. 867, dans les compilations à'E.vempla depuis Etienne de Bourbon, Paris, Ribl. nat., lut. 15 970, fol. 153 v°, et sous une autre forme dans les Vitae Patrum, P. L., t. lxxiii, col. 997, a pu se trouver à la base de ces légendaires affirmations.

Des études faites à Bologne, comme l’affirme Jacques d’Acqui, Chronicon imaginis mundi, dans les Mon. hist. pair.. Script., t. iii, col. 1620, que répètent le Gallia christiana, t. vii, 1744, col. 68, VHist. littér. de la France, loc. cit., et Sarti-Fattorini, De claris archigymnasii Bonuniensis pro/essoribus, t. i, ii, Bologne, 1772, p. 4-5, avec Protois, Pierre Lombard, c’vêque de Paris, Paris, 1880, p. 28, rien n’est connu, pas plus que d’une chaire d’enseignement obtenue à Pologne, comme le veulent Sarti-Fattorini, op. cit., p. 4.

Arrivée en France.

Nous entrons sur un terrain

plus sur avec le voyage en France ; il s’agit d’un complément d'études que le vir venerabilis qu’est déjà Pierre Lombard, selon le mot de saint Hernard, vient chercher à Reims et à Paris. Bernard, qui recommande le voyageur à ses amis de l’abbaye de Saint-Victor de Paris, s'était déjà chargé de lui venir en aide pendant le séjour à Reims, à la demande de son ami, l'évêque de Lucques. Episl., cdx, P. L., t. clxxxii, col. 619. La date de cette lettre cdx, dont le destinataire n’est probablement pas celui de la lettre cdlxix écrite par Nicolas de Clairvaux, donc entre 1145 et 1151 (ibid., col. 674 ; cf. col. 674 D et t. exevi, col. 1632), se place très probablement entre 1136 et 1139, c’est-à-dire sous l'épiscopat d’Odon de Lucques (1137-1146), peut-être à la fin de celui d’Hubert son prédécesseur (1128-1137), les relations entre saint Bernard et le clergé italien du Nord ayant surtout pu se produire durant son troisième séjour très prolongé en Italie (1136-1138), peutêtre durant le second (mai-novembre 1135). Pour les dates de ces voyages, voir Yacandard, Vie de saint Bernard, Paris, 1910, t. i, p. 336-345, 391, et t. ii, p. 4 et 26. Cela placerait donc vers 1136-1139 l’arrivée de Pierre Lombard à Reims. Seeberg, Prot. Realencyklopàdie, au mot Pelrus Lombardus, t. xi, p. 631, lig. 43, et Hofmeister, Studien ùber Otto von Freising, dans Xeues Archiv, t. xxxvii, 1912, p. 144, n. 3, opinent pour 1130-1135 ; Yacandard, op. cit., t. ii, p. 112, n. 5, el les éditeurs de Quaracchi, Pétri Lombardi libri IV Sententiarum, t. i, p. x, qui le suivent, pour 1139 environ ; cette divergence de quatre années n’a pas de bien grandes conséquences pour la suite de la carrière de Pierre Lombard. Toutefois, le témoignage fourni par Gerhoch de Reichersberg, en 1142-1143,

  • ur la célébrité du Magister Pelrus Longobardus, et

dont il sera question plus loin, exige aussi que l’on rapproche plutôt de 1136 que de 1139 l’arrivée en France et à Paris. Mais la détermination approximative de 1136-1139, historiquement motivée, au besoin celle de 1130-1135, fait sûrement rejeter la date de 1115-1119 qu’on appuyait, jadis, sur l’impossibilité pour Pierre Lombard d’entendre encore les leçons d’Abélard, après 1119, année où celui-ci cessait son enseignement à Sainte-Geneviève. Protois. Pierre Lombard, p. 33. Mais

à supposer que Pierre Lombard ail été en contact avec Abélard autrement que par la lecture de ses ouvrages, la reprise de ses cours par le maitre breton, en 1136, qui nous est certifiée par Jean de Salisbury, Metalogicus, t. II, c. x, P. L., t. cxcix, col. 869 (voir aussi Reginald Lane Poole, The maslcrs oj the scliools at Paris and Chartres in John oj Salisbury' s lime, dans The English historical revient, t. xxxv, 1920, p. 321, et les prolégomènes de l'édition de Quaracchi, t. i, p.xii, n. 2), permet de satisfaire à cette donnée du problème. De plus, la date de 1115 environ pour l’arrivée à Paris et les conditions d'âge exigées par le billet de saint Bernard, à propos du vir venerabilis, P. L., loc. cit., col. 619 A, c’est-à-dire de 25 à 30 ans au moins, auraient comme conséquence de retarder, contre toute vraisemblance, jusque vers l'âge de soixante-dix ans l'élévation à l'épiscopat, qui a eu lieu en 1159. Nous datons donc l’arrivée en France des quatre ou cinq années antérieures à 1140.

Après un court séjour à Reims, dont les circonstances nous sont totalement inconnues, hormis le soutien que lui accorde saint Hernard, Pierre Lombard quitte l'école où avait brillé jadis son compatriote Lotulphe de Novare, voir Othon de Freising, Gesta Frederici imp., t. I, c. xlvii, Mon. Germ. hist., Script., t. xx, p. 376-377, à côté d’Albéric de Reims, lequel cesse son enseignement en mai-juin 1136. Noir les lettres d’Innocent II, Jalïé, Regesla, n. 7776-7777. L'étudiant-voyageur se rendait à Paris, muni de la recommandation de saint Bernard aux victorins ; le séjour devait être court per brève tempus quod /acturus est hic usque ad natiitilalem beatæ virginis Mariée.

3° Séjour definili/ à Paris. — En fait, le séjour se prolongea indéfiniment : Pierre Lombard devait désormais vivre à Paris.

Quelles écoles y fréquenta-t-il ? Où séjourna-t-il ? Quelles fonctions y exerça-t-il ? Quand et comment fut-il appelé à une chaire d’enseignement ? Autant de questions auxquelles il est difficile de répondre. Il eut dès lors, sans doute, des relations excellentes avec l’abbaye de SaintVictor, dont Gilduin était abbé ; la recommandation de saint Rernard dut produire ses fruits. Le nom de Pierre Lombard et même ceux de son père et de sa mère figurent dans l’obituaire de l’abbaye, voir le Paris, lat. 14 673, fol. 202 v°et217r°, cf. Denifle, Die Universitùten des M. A., p. 657, n. 16 : signe de la bienveillante sympathie dont les chanoines l’entourent lui et sa famille. Il prêche à l’abbaye divers sermons, voir Hauréau, Notices et extraits de quelques manuscrits, t. iii, 1891, p. 44-50, et, comme évêque, il lui assure un accroissement fle revenus, voir V. Mortet, Maurice de Sully, dans les Mémoires de la Société d’histoire de Paris, t. xvi, 1889, p. 120 et 288, et Gallia christiana, t. vii, col. 68 ; Mortet, op. cit., p. 288, n. 1. Mais rien n’incline à faire croire qu’il y donne des cours, ni qu’il y habite régulièrement, comme le fera son successeur, Maurice de Sully ; voir F. lionnard, Histoire de l’abbaye royale et de l’ordre des chanoines réguliers de Saint-Victor de Paris, t. i, Paris, s. d., p. 251, et surtout V. Mortet, étude citée ci-dessus, p. 190-191, et pièces justificatives, n. 9, p. 288-289.

Entre 1135-1140 et 1159, date de l'élection épiscopale, quelques rares données jettent un peu de lumière sur ces vingt ans de la carrière professorale de Pierre Lombard ; mais aucune d’elles ne fixe le début de son enseignement, ni les circonstances qui déterminent la composition de ses ouvrages. Rien non plus ne vient appuyer l’affirmation d’un historien moderne, qui attribue à Pierre Lombard l'éducation des fils du roi Louis VII. Les IV libri Sententiarum et les Commentaires sur saint Paul et sur les psaumes sont-ils le fruit ou la préparation de son activité professorale ? Aucun texte ne le dit de façon expresse. L’on voit seulement,