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PETIT (.JEAN)


i ; juillet ne l’avait pas atteinte. De plus, il demanda l’avis sur cette question à tous les docteurs en théologie et en droit présents à Constance. Sur quatrevingts théologiens et canonisles, plus de soixante se prononcèrent pour l’admissibilité des propositions de Petit. Aussi la commission finit-elle par déclarer, le 15 janvier 1416, que la sentence de l’évêque de Paris et de l’inquisiteur était nulle et devait être considérée comme non avenue. Le texte se lit dans Mansi, Concit., t. xxviii, col. 813-821.

Malgré cette déclaration, l’université de Paris et les ambassadeurs du roi de France continuèrent à réclamer la condamnation des neuf propositions devant les commissaires du concile dans la matière de foi, parce que la commission n’avait pas porté un jugement sur la qualité de ces propositions et ils en appelèrent au concile du jugement de la commission que Gerson appelait « un arrêt clandestin ». Simon de Thérano, avocat du roi de France, soutint cet appel et prononça, le 30 avril 1416, un long discours sur les doctrines de Jean Petit. L’évêque d’Arras y répondit le 2 mai et exposa en détail toute l’affaire. Le 5 mai, Gerson prit la parole pour réfuter les assertions formulées par l’évêque d’Arras dans la congrégation précédente et pour répondre aux calomnies concernant la condamnation par l’évêque de Paris de l’écrit de Jean Petit. Ce discours a été publié dans les Opéra de Gerson, t. ii, col. 319-329, et dans Mansi, Concil., t. xxviii, col. 744-756.

Gerson, d’accord avec les autres ambassadeurs du roi de France, présenta ensuite au concile plusieurs pièces écrites, entre autres, sex conclusiones theologicæ contra propositionem cujusdam J. Parvi et une lettre du roi à propos de l’affaire de Petit. De plus, Gerson se déclara prêt à soutenir les six conclusions ci-dessus contre la doctrine de Jean Petit et à démontrer que les assertions de Petit étaient erronées. Il demanda enfin que, vu l’appel interjeté de la décision qui infirmait la sentence épiscopale de Paris, on nommât de nouveaux juges. Le 9 mai et le surlendemain, 11, l’évêque d’Arras voulut répondre au discours de Gerson ; mais ses adversaires protestèrent et firent un tel vacarme qu’il ne put se faire entendre. Les deux partis se livrèrent alors une véritable bataille de pamphlets : les partisans de Petit fuient traités de caïnites et d’hérétiques et Gerson de Judas, d’Hérode et de Cerbère. Entre temps, l’empereur Sigismond envoya de Paris plusieurs lettres au concile pour demander la condamnation des funestes articles de Petit et la suppression de la sentence rendue par la commission de la foi. Cette dernière envoya alors, le 15 mai 1416, à l’empereur une justification, dans laquelle on faisait remarquer qu’il ne convenait pas à un seul évoque (l’évêque de Paris) de porter une décision dogmatique et que l’on devait attendre le jugement du concile général. Mais le concile ne voulait plus entendre parler de cette affaire.

Cependant, le dimanche 17 janvier 1417, Gerson prononça encore un discours solennel, dans lequel il chercha, aussi bien que dans un supplément (De nuptiis Christi), à faire reprendre l’afîaire de Jean Petit. Mais il n’obtint aucun succès. Les dernières tentatives pour faire condamner Jean Petit furent faites au début de 1418, lors des débats sur l’affaire de Falkenberg. Un dominicain présent à Constance, Jean de Falkenberg, avait écrit un pamphlet très violent contre le roi de Pologne, dans lequel il déclarait licite de tuer ce prince avec tous ses sujets. Cet écrit tomba aux mains de l’archevêque de Gnesen, qui l’emporta à Constance. Les délégués des nations procédèrent à une enquête et, sur leur décision, qui n’était pas unanime, le livre fut, dès avant l’élection de Martin V, condamné à être brûlé. Cette sentence

ne fut du reste confirmée dans aucune session générale.

Comme on le voit, l’assertion de Falkenberg était au fond identique aux thèses de Jean Petit. Les Français et les Polonais n’en furent que plus empressés à solliciter du pape une condamnation solennelle des erreurs de Petit et de Falkenberg et dans une cédule (schedula) de Gerson, qui nous a été conservée, ils se plaignirent amèrement de ce qu’on ne voulait pas poursuivre jusqu’au bout le deuxième but principal du concile, à savoir l’extirpation de l’hérésie, pour lequel le concile de Constance avait été convoqué. Les Polonais voulant en appeler au futur concile, le pape publia, dans un consistoire public tenu le 10 mars 1418, une courte bulle déclarant inadmissible tout appel d’une sentence pontificale et réclamant la soumission complète aux décisions du Saint-Siège in causis fidei. L’afîaire de Jean Petit se termina par le retrait de la condamnation portée en 1414 par l’évêque de Paris contre la Justification, que le duc de Bourgogne obtint, le 3 novembre 1418, des vicaires généraux de Paris, alors que l’évêque était absent. Le roi et l’université désavouèrent également ceux qui s’étaient opposés au duc de Bourgogne et à Jean Petit !

Les auteurs attribuent à Jean Petit quelques autres ouvrages de moindre importance, un petit Traclalus de schismate et aliæ propositiones, dont des mss., d’après Oudin, étaient conservés à la bibliothèque de Saint-Victor à Paris, cod. P. Il et P. 14. Un ms. de la Juslificatio.ducis Burcjundiæ se trouve dans le cod. 262 de la bibliothèque de New Collège, à Oxford.

Les discours politiques sur le schisme, sauf ceux qui ont été prononcés en cour de Parlement, ont été médiocrement publiés par Bourgeois de Chastenet.dans sa Nouvelle histoire du concile de Constance, Paris, 1718. Diverses pièces relatives à la condamnation de Jean Petit par l’université et l’évêque de Paris et divers actes du concile de Constance se rapportant a la même affaire ont été publiés par E. du Pin, dans Gerson, Opéra omnia, Amsterdam, 1706, t. ii, col. 319 sq., 380 sq. ; t. v en entier, ainsi que par Mansi, Concil., t. xxviii, Venise, 1785, col. 73$1-$273. Une très utile Synopsis chronologica de l’affaire de Jean Petit se trouve dans Mansi, op. cit., col. 731-739 ; Von derHardt, Magnum œcumenicum Constantiense concilium, Francfort-Leipzig, 1697-1700, t. iv ; cf. Hefele-Leclercq, Histoire des conciles, t. vu a, Paris, 1916, p. 287-296 et 389-395. La publication d’E. du Pin, un peu hâtive, doit être contrôlée, pour les pièces citées, par le recours aux mss. Nous avons signalé les compléments fournis par le Cliartulariiun univers. Paris., t. i.’or aussi et surtout H. Finke, Acta concilii Constanticnsis, t. iv, 1928, p. 237 sq.

L. Wadding, Annales ordinis minorum, 3e édit., t. ix, Quaracchi, 1932, ad an. 1410, n. xix, p. 428-4.29 ; J. H. Sbaralea, Supplementum ad scriptores O. S. F., t. ii, Rome, 1921, p. 115 ; C. Oudin, Corci/nenfariiis de scriptoribus ecclesiasticis, t. iii, Leipzig, 1722, col. 2261-2262 ; L. Moréri, Le grand dictionnaire historique, éd. de 1754, t. vii, p. 114 ; F.-X. de Feller, Dictionnaire historique, t. vi, p. 455 ; Kervyn de Lettenhove, Jean sans Peur et l’apologie du tyrannicide, dans Bulletin de l’Académie de Bruxelles, 1861, et dans Bulletin de la commission historique, IIIe série, 1866-1873, t. viii, p. 91-96 ; IVe série, 1. 1, p. 197-202 ; H. Denifle, Chartularium universitatis Parisiensis, t. iv, p. 280, 283, 295, 296 ; B. Bess, Frankreichs Kirchenpolilik und der Prozess des J. Petit ; du morne, Die I.ehre vom Tyrannenmord auf dem Konstanzer Konzil, dans Zeitsclu-, fur Kirchengesch., t. xxxvi, 1902, p. 1-61 ; N. Valois, La France et le Grand Schisme d’Occident, t. iv, Paris, 1902 ; J. B. Schwab, Joh. Gerson, Professor der Théologie und Kanzler der Universitàl, Paris, 1858 ; J. Lenfant, Histoire du concile de Constance, Amsterdam, 1714 et 1727 ; Bourgeois de Guastenet, Nouvelle histoire du concile de Constance, Paris, 1718 ; K. Kamm, Der Prozess gegen die « Justificatio ducis Burgundiæ » auf der Pariser Synode, dans Rôm. Quartalschr., 1912 ; A. Coville, Jean Petit. La question du tyrannicide au commencement du XV siècle, Paris, 1932.

Am. Teetært.