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PÈRE

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mentarii, tom. ii, c. ii, n. 3, P. G., t. xiv, col. 109. Tertullien avait déjà dit : « Le Père n’a pas de principe de son être, attendu qu’il ne procède ni ne naît d’aucun autre. » Adversus Praxean, c. xix, P. L., t. ii, col. 202. Pour la même raison, saint Grégoire de Nazianze appelle le Père avocpxoç, Orat., xx, n. 7, P. G., t. xxxv, col. 1073. Cf. S. Grégoire de Nysse, loc. cit. Sous une forme à peine différente, d’autres auteurs expriment la même vérité. Pour le pseudo-Denys, le Père est « source unique de la supersubstantielle divinité ». De divinis nominibus, c. ii, P. G., t. iii, col. 641 ; pour saint Basile, il est « la racine et la source du Fils et du Saint-Esprit », HomiL, xxiv, in Sabellium, n. 4, P. G., t. xxxi, col. 609 ; pour saint Augustin, il est « le principe de toute la divinité », De Trinitate, t. IV, c. xxix, P. L., t. xlii, col. 908. Aussi le XIe concile de Tolède n’hésitet-il pas à canoniser ces expressions : Pater… a nullo originem ducit, ex quo et Filius nativitatem et Spiritus Sanctus processionem accepit : fons ergo ipse et origo est totius divinitatis. Denz.-Bannw., n. 275.

Il faut toutefois observer que ce mot de « principe » signifie dans le Père uniquement l’ordre d’origine, et non une priorité quelconque ou à plus forte raison une supériorité. La théologie latine se refuse, pour ce motif, à dire que le Fils et le Saint-Esprit sont princil >it : s par le Père. Saint Thomas, I a, q. xxxiii, a. 1, ad 2um. Et si elle explique parfois le Pater major me est, Joa., iv, 28, dans l’ordre des relations divines, elle le fait en s’appuyant uniquement sur l’origine du Fils, suivant en ceci l’interprétation de saint Hilaire, De Trinitate, t. IX, n. 54, P. L., t. x, col. 325. Mais certaines interprétations, encore mal assurées quant à l’expression, paraissent refléter le subordinatianisme. Cf. Petau, De Trinitate, t. II, c. n. On peut néanmoins les entendre d’une façon orthodoxe.

2. L’expression grecque aîxîa. —

Cette expression, appliquée au Père, ne saurait être retenue dans la langue théologique des Latins. Le mot « cause » impliquerait en Dieu un effet distinct du Père quant à son essence et son être. Saint Thomas, loc. cit., ad lum. Mais, chez les Grecs, l’expression aMoc n’a pas un sens aussi slrict. Bessarion expliqua au concile de Florence que les noms de « cause » et de « causé » s’emploient chez eux dans une acception large, chaque fois qu’il est question d’origine, d’émanation, de point de départ. Aussi le concile, tout en rapportant la formule grecque, ne la blâme pas. Décret pro Grsecis, Denz.-Bannw., n. 691. Saint Thomas fait observer que les Latins n’emploient pas le mot « cause », en parlant du Père par rapport au Fils ou à l’Esprit. La remarque n’est peut-être pas historiquement tout à fait exacte, mais elle exprime certainement la terminologie qui dogmatiquement a prévalu.

Pareillement, les Grecs n’hésitent pas à déclarer le Fils ou le Saint-Esprit « causé » ocItixtôv par le Père. Mais c’est encore dans le sens large qu’on a expliqué et qui marque simplement l’origine. Toutefois, en proclamant le l’ère y.rtzP.c, ils évitent de dire que le Fils ait un principe : ils déclarent au contraire que le Fils est pareillement 7.v7py/, ç. pour éviter toute interprétation arienne : Être sans principe d’origine n’appartient qu’au l’ère seul : niais être sans principe de création, sans principe « le temps, convient aussi au Fils, qui n’a été ni fait, ni créé et qui est sans commencement. Saint Grégoire de Nysse, ’.mit. Eunomium, I I. P. « ;.. t. xi. v. col 396. Mais ils.lisent que le Fils esl’/ principio non principiatus.

.’{. Le m"/ principe attribué au Fil » et au Saint Esprit. comparaison auet l< Pire. a t quatre titres différents, le Fils peut être appelé principe >. A l’intérieur de la Trinité, il est principe du Saint-Esprit, mais principe procédant d’un autre principe) le Pi re ; relativement aux œuvres extérieures, il est. conjointement avec le Père et l’Esprit (les œuvres ad extra étant communes aux trois personnes), principe de toutes choses ; par appropriation, cependant, on rapporte au Verbe la cause exemplaire selon laquelle le Père agit ad extra, voir Appropriation, col. 1712 ; enfin, dans l’incarnation, le Fils devient principe à un titre tout spécial : homme-Dieu, il est la source du surnaturel, principe et chef de l’Église, principe et chef des prédestinés. Cf. Joa., viii, 25 ; Is., ix, 6 ; Col., i, 18 ; I Cor., xv, 20 ; Apoc, i, 8 ; xxii, 13.

b) Le Saint-Esprit est dit « principe » seulement à deux titres, qui concernent les œuvres ad extra. Tout d’abord, d’une manière commune avec le Père et le Fils, il est le principe des choses, puisqu’il est créateur avec eux ; puis, par appropriation, il est principe des œuvres de grâce et de sanctification. Appropriation, col. 1712.

c) C’est à six titres différents que le Père est dit « principe » : trois concernent les œuvres ad extra, trois la vie intime de la Trinité.

D’une manière commune, il est principe de toutes choses avec le Fils et l’Esprit ; mais, par appropriation, il est dit plus particulièrement le principe créateur. Voir t. i, col. 1711. Bien plus, dans cette appropriation même, le Père apparaît tout particulièrement principe, puisqu’il crée par le Verbe. Cf. Joa., i, 1-3.

Dans la vie de la Trinité, le Père est, avec le Fils, principe de l’Esprit ; seul, il est principe du Fils et. enfin, d’une manière générale, il est le principe, la source, l’origine de toute la divinité.

Ces rapprochements font voir que le nom de « principe », pris dans toute son ampleur, est le titre propre de la première personne.

Le Père.


Le nom de « Père » peut avoir, en Dieu, une double signification : ou bien il signifie la relation réelle ad intra par laquelle la paternité de la première personne s’affirme à l’égard de la seconde ; ou bien il signifie la relation de raison ad extra, par laquelle s’affirme, en un sens plus large, la paternité divine à l’égard des créatures, spécialement des créatures raisonnables. Dans le premier sens. Père est un nom personnel, propre à la première personne ; dans le second, c’est un nom essentiel, se rapportant à la divinité, sans distinction de personne.

1. Père, nom personnel. —

a) La révélation indique nettement le caractère personnel de ce nom appliqué à la première personne, puisqu’il sert à la distinguer des deux autres. Conformément au plan de cet article. on s’abstiendra de refaire ici l’exposé de la révélation concernant la première personne. De brèves indications suffisent. Dans l’Ancien Testament, quelques textes insinuent le caractère de la première personne à l’égard du Messie futur. Cf. Ps., lxxxviii, 27 ; Eccli., LI, 14. Mais, dans le Nouveau Testament, Jésus-Christ nous a expressément révélé sous ce nom la première personne. Cf. Matth., xi, 25, 27 ; xvi, 17 ; Luc, xxiii, 46 ; xxiv, 49 ; Joa.. ii, 16 ; iii, 35 ; xiv, 9 sq. ; XVII, 1. 21 ; xx, 17, 21 ; et formule du baptême, Matth., xxviii, 19. (/est le même nom qu’on retrouve dans les autres écrits du Nouveau Testament pour désigner la première personne et la distinguer du Fils et de l’Esprit-Saint. Cf. Act., ii, 33 ; xxiv, 14 ; Rom., xv, 6 ; I Cor., i, .’i : Gal., i, 1 ; Eph., i, 3 : iv, (i : Col., n. 2 ;.lac, l. 27 ; I Pet., i, 1, 3 ; Il Pet., i, 17 : Jud., 1. I Joa., i, 2 : II, 22, 2.’i : iv. I I ; v, 7. Il : Il Joa.. 9 ; Apoc, i, 6 : ii, 28, etc.

b) L’enseignement de l’Église, dans sa liturgie, ses Symboles, ses conciles, donne à la première personne le nom de « Père », comme celui qui la caractérise le mieux. On s’abstiendra de citer les document s, qui seraient ici trop nombreux. On trouvera l’essentiel dans i [ugon, Le mystère de ta tria suinte Trinité, Paris, 1921, p. 68 84.