Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.1.djvu/501

Cette page n’a pas encore été corrigée
987
988
PÉNITENCE. SAINT THOMAS, LES ACTES DU PÉNITENT


sacrement, il faut l’entendre du propos d’accomplir l’œuvre imposée par le confesseur. III a, q. xc, a. 2,

ad 2 ura. Elle est aussi, à sa manière, un acte de la vertu <le pénitence : cf. col. 984.

Quant à la contrition, saint Thomas expose qu’elle fait partie du sacrement extérieur, parce qu’ « elle appartient virtuellement à la pénitence extérieure, en tant qu’elle implique le vouloir de la confession et de la satisfaction ». lll a, q. xc, a. 2, ad 1°™. Voir col. 978. Mais il est nécessaire, pour qu’elle devienne acte de la vertu de pénitence, qu’elle implique douleur souveraine du péché et désir de réparation de l’offense faite à Dieu. Voir col. 976. C’est ici la principale difficulté que saint Thomas s’applique à résoudre en retraçant la genèse psychologique du mouvement de contrition et en montrant son aboutissement dans la contrition parfaite, dans l’attrition souveraine et dans l’attrition sincère, mais non universelle ou, surtout, non souveraine.

a) Genèse psychologique du mouvement de contrition.

— Des actes qui préparent la contrition, le premier principe (début) est la grâce divine excitant le cœur de l’homme (non pas une grâce improprement dite, comme sembleraient l’indiquer quelques textes de saint Thomas dans les œuvres de jeunesse). Voir Justification, t. viii, col. 2120, et, pour concilier les deux points de vue, Périnelle, op. cit., p. 121, note 4. Succède un mouvement de la foi encore informe ; puis, un mouvement de crainte servile, qui retire le coupable de son péché par crainte du supplice. Le quatrième mouvement est un mouvement d’espérance qui provoque dans le pécheur la résolution de s’amender dans l’espoir d’obtenir son pardon. Vient ensuite l’acte de charité, qui fait naîtra le regret du péché en tant que péché et non plus en raison du châtiment. Enfin, la crainte filiale nous fait olïrir à Dieu satisfaction, par révérence pour lui. Ainsi, à ne considérer que les mouvements de la volonté, la crainte servile est le premier principe de la pénitence ; la crainte filiale en est le principe propre et immédiat. III a, q. lxxxv, a. 5 ; cf. II*- !  ! 88, q. cxiii. a. 3-5. C’est du moins le processus ordinaire, auquel il peut y avoir des exceptions. In /yum Sent., dist. XIV, q.i, a. 2, qu. 2. Pour les conversions subites, voir De veritale, q. xxviii, a. 3, ad 19um ; a. 4, ad 3um ; a. 8.

Les quatre premiers actes précèdent réellement le mouvement de contrition. Les deux derniers accompagnent l’infusion de la vertu de pénitence dans la contrition parfaite et n’ont sur la vertu de pénitence qu’une priorité logique. Id., a. 6. Cf. V-ll™, q. cix, a. 6 ; q. cxiii, a. 8 ; Quodl., i, a. 7.

Dans ses grandes lignes — si l’on excepte les deux derniers traits se rapportant à la contrition parfaite — la genèse décrite par saint Thomas s’applique à toute contrition, même imparfaite. On peut rapprocher le texte de saint Thomas de celui du concile de Trente, sess. vi, c. vi, De modo præparationis (ad justitiam), Denz.-Bannw., n. 798, ou Justification, col. 2178 ; on trouvera la ressemblance frappante. Au témoignage de Dominique Soto, les Pères de Trente se sont ici inspirés de saint Thomas, In IV ara Sent., dist. XIV, q. ii, a. 5. Pour la comparaison des textes et le développement de l’exposé du processus, voir Périnelle, op. cit., p. 117 sq.

b) Son aboutissement dans la contrition par/aile. — Hien que cet aspect du problème ne concerne pas directement la justification sacramentelle, il est nécessaire, pour l’intelligence totale de la doctrine thomiste, d’en faire ici un bref exposé et d’analyser le passage de l’acte d’espérance à l’acte de charité et de crainte filiale.

Saint Thomas l’explique par l’intervention de la grâce opérante. III a, q. lxxxvi, a. 4, ad 2um ; a. 6,

ad l ii, n. Et tous les thomistes fidèles à la lettre comme à l’esprit de saint Thomas entendent ici la grâce habituelle, cf. Billot, De sucramentis, t. ii, th. xi : De gratta, th. xvii ; et non une grâce actuelle, comme l’interprète Suarez, dans son commentaire sur l’article 4. Cf. Galtier, De pirnitentia, n. 93.

Cette grâce est dite opérante, parce que le pécheur ayant, par ses actes précédents, éloigné tout obstacle à son intervention, se laisse mouvoir par elle, sans encore coopérer aux actes subséquents de satisfaction et de mérite. L’action de cette grâce est multiple : « L’effet de la grâce opérante, c’est la justification de l’impie (cf. I a -II E, q. exi, a. 2 ; q. cxiii, surtout a. 8). Dans cette justification, il y a non seulement infusion de la grâce et rémission de la faute, mais il y a aussi un élan du libre arbitre vers Dieu, élan qui est un acte de foi informé (vivifié) par la charité, et un mouvement du libre arbitre rejetant le péché, mouvement qui est un acte de pénitence. » III a, q. lxxxvi, a. 6, ad l Dm. Tout se passe simultanément : du côté de l’homme, la rémission de la faute possède priorité de nature par rapport à l’obtention de la grâce ; du côté de Dieu, c’est l’infusion de la grâce qui possède la priorité. PII*, q. cxiii, a. 8, ad 2um, surtout ad l am. Le mouvement du libre arbitre est absolument simultané, quoique provoqué par la grâce opérante, ibid., a. 3 : c’est l’acte de charité, qui, sous un autre aspect, se révèle comme un mouvement de haine contre le péché et constitue ainsi l’acte de contrition parfaite. C’est alors seulement qu’on affirme du pécheur qu’il fait sienne la grâce qui le rend formellement juste et ami de Dieu. IMI*, q. cxiii, a. 8. Ainsi, le mouvement de la volonté vers Dieu, par la charité, et contre le péché, par la contrition, est conçu comme la disposition dernière coadaptant la grâce habituelle à l’activité surnaturelle de l’âme, bien qu’ils soient les effets de l’infusion de cette même grâce, considérée comme simplement opérante. Par cette coadaptation, la grâce devient coopérante et principe de mérite, même déjà de la première gloire.

Appliquant la philosophie des causes au cas particulier de la justification par la contrition parfaite, saint Thomas déclare que, par rapport à l’infusion de la grâce, la contrition joue le rôle de simple cause dispositive ; par rapport à la destruction du péché, elle est cause efficiente ; par rapport à la satisfaction et à la destruction des restes du péché, elle opère également comme cause efficiente. In 7Vum Sent., dist. XIV, q. ii, a. 1, qu. 1 ; De veritate, q. xxviii, a. 5 ; III a, q. lxxxv, a. 2, ad 3um. Cf. Billot, Le sacramentis, t. ii, th. ix, et les deux corollaires ; th. xiii ; De gratia, th. xvi et xvii.

La « vraie » contrition, c’est-à-dire la contrition parfaite remet le péché même avant l’absolution. Suppl., q. xviii, a. 1 ; III a, q. lxxxiv, a. 8. Même avec une douleur faible, la contrition vraie produit cet effet. Suppl., q. v, a. 3. Mais il est entendu que cette contrition renferme le désir de la confession et de l’absolution. Id., q. xviii, a. 1. Sur la fréquence de cette justification ex opère operanlis, saint Thomas ne se prononce pas nettement. Certains passages sont vagues : //) /y ™ Sent, dist. XXII, q. ii, a. 1, sol. 3 ; Cont. gent., t. IV, c. lxxii (fin) ; Quodl., iv, a. 10, ad 3um. En d’autres, il affirme que c’est le cas ordinaire : Quodl., iv, a. 10 ; In Joan., c. xi, leç. 6, n. 6. Cf. Périnelle. p. 145.

c) Son aboutissement dans l’attrition souveraine. — Sur ce point, la doctrine thomiste est conçue sur le même plan : grâce excitante, foi, crainte, espérance, amour de Dieu, contrition. Cf. Périnelle, op. cit., p. 124 sq. Mais, conformément au principe rappelé plus haut, col. 978, c’est une grâce actuelle opérante qui supplée ici la grâce habituelle, pour provoquer