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    1. PÉNITENCE##


PÉNITENCE. LA DOCTRINE AVANT SAINT THOMAS

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Même doctrine chez les décrétistes et décrétantes. Dans son Apparalus ad Decretum, Jean le Teutonique oblige le pénitent à confesser ses péchés mortels au prêtre : morlaliu non confilebimur nisi sacerdoti, dumnwdo possit luiberi ejus copia, col. 120, parce qu’au prêtre seul Jésus-Christ a communiqué le pouvoir des clefs. De pxiiit., dist. I, can. Nemo, ad verbum Ne/no, col. 1652. — Jean de Dieu (f vers 1255), un des continuateurs de maître lluguccio, reconnaît aussi que seuls les prêtres ont le pouvoir des clefs. Causa XXVI, q. vi, c. 11, ad verbum Confitetur socio. Cod. vatic. lut. 22 fil), fol. 306 v°. — Barthélémy de Brescia enseigne que l’aveu des péchés doit se faire « au propre prêtre ». De pxiiit., dist. VI, can. Cui autem, op. cit., col. 1771. « Le pénitent qui veut… confesser ses péchés doit chercher un prêtre discret qui sache délier et lier. » ld., can. Qui vull, et dist. I, can. Quem psenitel, col. 1772, 1080. — Au milieu du xme siècle, le diacre Jean d’Espagne, dans sa Flos decreti (imprimée sans pagination à la fin du Decretum Gratiani, una cum glossis Joannis Theutonici et Bartholomsei Brixiensis) enseigne également que l’aveu des fautes doit régulièrement se faire à un prêtre, proprio sacerdoti et ex justa causa alii cuicumque sed cum licentia proprii sacerdotis.

Parmi les décrétalistes, citons Geoffroy de Trani († 1245). Le Christ a communiqué aux seuls prêtres le pouvoir d’imposer des pénitences, le pécheur est donc obligé de se confesser à eux pour obtenir la rémission de ses fautes. Summa super titulis Decretalium, t. V, tit. De pœnitentiis et remissionibus, Bruges, bibl. munie, cod. 353, fol. 177 r°, et cod. 358, fol. 287 r°. D’après Jean de Dieu, il est défendu aux religieuses de prêcher et d’entendre les confessions, parce que le Christ n’a pas donné le pouvoir de lier et de délier à la sainte Vierge, mais bien aux apôtres, quoique la première surpassât de loin les derniers en sainteté et en dignité. L. V, tit. xxxviii, De pœnitentiis et remissionibus, bibl. Vatic, cod. Borgnes. 94, fol. 208.

Le pape Innocent IV affirme très nettement que « jamais un pécheur ne sera définitivement justifié par Dieu, s’il n’a été préalablement absous par un prêtre à qui il a été dit : tout ce que vous lierez, etc. » Op. cit., p. 356 r°. Les péchés mortels doivent donc être accusés à un prêtre.

Thomas de Chabham exige que les péchés mortels soient accusés au prêtre, parce que la guérison de l’âme ne peut être assurée que par celui qui a reçu pouvoir de lier et de délier. Et ces deux clefs sont conférées par le supérieur, quand quelqu’un est ordonné prêtre ; c’est alors que l’inférieur reçoit le pouvoir de lier et de délier. Op. cit., bibl. royale de Bruxelles, ms. 8621-8622, fol. 40 v°. De même, maître Paul exige qu’on fasse l’aveu des fautes au prêtre, parce que seul le prêtre a reçu de Dieu le pouvoir de lier et de délier. Bibl. Casin., t. iv, p. 192 b ; cf. Duellius, op. cit., p. 61. Sur la nécessité de confesser les péchés mortels à un prêtre, saint Baymond de Peiiafort tient exactement la même doctrine. Débet regulariter quilibet confileri sacerdoti, nam sacerdotibus dédit Dominus potestatem ligandi et solvendi cum dixit (Joan.. xx) : « quorum remiseritis, etc. » Op. cit., p. 448. Guillaume de Bennes ajoute cette précision : il faut confesser ses fautes coram sacerdote, habente usum clavium quoad illum qui ei confitetur. Summa S. Raymundi, p. 454.

2. Péchés véniels.

La doctrine des théologiens et canonistes, en ce qui concerne la rémission des péchés véniels par la confession, est nécessairement plus variée, par rapport au ministre de cette confession. Nous ne recenserons ici que les auteurs ayant explicitement parlé de la confession des péchés véniels, comme tels.

Guillaume d’Auxerre pose d’abord le principe que « simplement et absolument, nous ne sommes pas obligés de confesser les péchés véniels, sauf exception ; mais il est bon et plus parfait de les confesser ». Mais il ne s’agit pas, pour cet auteur, d’une confession faite au prêtre : il suffit de confesser ces imperfections quotidiennes les uns aux autres, comme cela se pratique dans certaines Eglises à la confession générale de prime ou de compiles. Op. cit., p. 272. Cette doctrine est textuellement reproduite dans le manuscrit de Benaud de Pouzzoles (commentaire sur les IIIe et IVe livres des Sentences), bibl. munie, de Bruges, cod. l’JO. Elle se retrouve également dans une Somme anonyme Super Sententiis mugistri Guill. Allissiodorensis, Assise, bibl. municipale, cod. 195, fol. 119 r°, et dans une autre Somme, dont l’auteur n’est connu que par les initiales G. G., cod. vatic. lai. 2674, fol. 115 v°. Cf. Teetært, op. cit., p. 279, note 1.

Guillaume d’Auvergne admet que le prêtre tout d’abord est le ministre de l’absolution des péchés véniels. Mais, en cas de nécessité, d’autres que les prêtres et même des laïques peuvent les absoudre. Op. cit., p. 473.

Comme Guillaume d’Auxerre, le cardinal Hugues de Saint-Cher rappelle que l’obligation de la confession ne porte que sur les péchés mortels, non sur les péchés véniels. Il est toutefois permis d’accuser ces fautes quotidiennes et légères : c’est même chose bonne et louable. Mais la confession peut être ici un simple aveu mutuel, comme dans la confession générale qui se fait à prime et à complies. Dans quelques Églises, tous la font au prêtre, tandis que, dans d’autres, on se confesse deux à deux. Bruxelles, bibl. royale, cod. 11422-11423, fol. 95 v°. Si de venialibus, tune est consilium et secundum hoc, dicit inlerlinearis : coœqualibus levia et colidiana. Et tune loquitur de generali con/essione quæ fit in prima et completorio ; ubi tamen consuetudo Ecclesise vel institutio ligat ad illam generalem confessionem, non potest omitti nec débet sine offensa. Opéra omnia, In universum Velus et Xovum Testamentum, t. vii, Cologne, 1631, p. 323.

Selon Jacques de Vitry, il est permis aux fidèles de confesser leurs péchés véniels les uns aux autres, bien qu’il soit plus sur et plus salutaire de les avouer à un prêtre. Mais la confession des péchés véniels, soit au prêtre, soit au simple fidèle, ne constitue pas une obligation, car il existe bien d’autres moyens de rémission : réception de l’eucharistie, récitation de l’oraison dominicale, confession générale. Op. cil., p. 508.

Albert le Grand distingue nettement la confession des péchés véniels de la confession des péchés mortels. La première a lieu à prime ou à complies. et peut se faire en tout temps et à n’importe qui, bien qu’il soit préférable de la faire à un prêtre. Dist. XVII, a. 39, op. cit., p. 719.

Même doctrine chez les canonistes. Pour Jean le Teutonique, les péchés véniels peuvent être révélés indifféremment à un prêtre ou à un laïque et rien ne s’oppose à ce qu’on les confesse au prochain, même si on peut avoir un prêtre. Decretum…, Borne, 1582, col. 162. Innocent IV semble admettre, en principe, qu’il faut accuser en confession tous les péchés, même les péchés véniels ; mais l’accusation des véniels peut être faite à un laïque. Op. cit.. p. 356 r°. Même enseignement chez Thomas de Chabham, qui spécifie expressément, contre Bède, que la confession des péchés véniels ne constitue pas l’objet d’un précepte, mais qu’elle est de simple conseil. Bruxelles, bibl. royale, cod. 8621-8622, fol. 6 r°. La confession générale se fait régulièrement deux fois le jour : à prime, pour expier les péchés véniels de la nuit, à complies, pour réparer ceux de la journée. Saint Raymond de Pcnafort enseigne que, régulièrement, la confession des péchés véniels doit, comme celle des péchés mor-