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PÉNITENCE. SOLUTIONS DEFINITIVES. LA PKATlnUK


que doit apporter le pénitent à la réception du sacrement, le sérieux de l’examen, l’intensité de la contrition, mais il dit aussi de quelle efficacité est la confession pour la rémission du péché. Le second, adressé à un confesseur, l’engage à éviter de trahir le secret en imposant des pénitences extraordinaires ; il insiste avec force sur les garanties qu’il faut donner au pénitent.

Pierre le Chantre († 1132) représente un courant un peu différent. Son enseignement professoral l’a mis à même de toucher à nombre de questions dogmatiques, mais il a traité d’ordinaire celles-ci du point de vue moral et canonique, avec une tendance à l’édification. Sa Summa de sacramentis n’a pas encore été publiée, sauf quelques passages donnés par Morin. Le Verbum abbrevialum, dans P. L., t. ccv, col. 21370, contient sur la pénitence un certain nombre de chapitres, c. cxli-cxlix, où l’abondance des citations scripturaires empêche malheureusement de saisir le dessin général.

On trouvera dans P. L., t. ccxiii, col. 865 sq., un traité anonyme, De pienitentia et tenlationibus religiosorum, qui se date lui-même de l’époque de la 3e croisade (1189) et qui est rempli de remarques intéressantes, d’un tour extrêmement pratique et tout à fait judicieuses. La simple énumération des questions posées et résolues est éminemment suggestive : Quæris, si libéra sit confessio (c’est-à-dire, si l’on peut se confessera n’importequel prêtre) ? sisufficiat uni soli sacerdoti conftleri tantum, si peccalum non iteratur et injuncta pœnilentia compleatur (question souvent posée : faut-il renouveler la confession de fautes déjà accusées et pardonnées ?). Perconlaris, cum peccalum iteratur, si secunda pœnilentia admillatur ? Item interrogas quanta et qualis debeal esse pœnilentia ? Bien qu’il vise essentiellement la confession des religieux, le traité ne laisse pas d’être d’un intérêt général.

Le Liber pœnilentialis d’Alain de Lille († 1203) nous laisse dans le même ordre de considération, voir ci-dessus, col. 904. Il se présente à la fois comme un manuel du confesseur et comme un manuel du pénitent. Toutes les questions d’ordre pratique y sont touchées ou à peu près, en ce qui regarde la confession, la contrition et la satisfaction. On y relèvera surtout les remarques relatives à l’imposition de la pénitence ; nous sommes très loin déjà de la rigueur un peu mécanique des anciens pénitenticls. Ce livre est fort précieux pour juger de ce que pouvait être, au début du XIIIe siècle, l’administration courante du sacrement de pénitence.

e) La polémique contre les hérétiques. — Jusqu’au xiie siècle, on ne voit pas qu’aucune attaque sérieuse ait été dirigée contre l’institution pénitentielle ecclésiastique ; rien qui ressemble, par exemple, aux attaques de 1’.(’ranger contre la doctrine de l’eucharistie au milieu du xie siècle. C’est seulement avec le pullulement, au cours du siècle suivant, des sectes néo-manichéennes d’une part, anticcelésiastiques de l’autre. quc se remarque une opposition contre le sacrement de pénitence. Quelles que fussent d’ailleurs leurs origines, quels que tussent les principes fonciers qui les inspiraient, dualisme manichéen ou impie opposition à l’Église, les sectes en question

avaient en commun le rejet des nioens de salut proposés par la religion chrétienne. Devant leur anti unentalisme, la pénitence ne pouvait pas plus trouver grâce que le baptême des enfanta ou l’eucba Les cathares étaient les plus radicaux, ils rejetaient tous les sacrements de l’Église romaine et ne

pratiquaient, dans l’intérieur de la secte, en guise de

pénitence, que le servitlum on apparelhanuntum, sorte de i oniession publique, s’accompllssanl chaque

mois en présence d’un parfait - et consistant en une ition des fautes commises, mais en termes

raux et impersonnels ». Voir Bernard Gui, Manuel de l’inquisiteur, édit. G. Mollat, t. i, p. xxxiv, où l’on trouvera les références essentielles. Nous sommes moins au clair sur les négations des pétrobrussiens et des henriciens. Les vaudois, qui ne prennent qu’à la fin du siècle le caractère d’une secte antiecclésiastique, avaient gardé l’essentiel de la pénitence, confession et absolution ; seulement, ces rites étaient administrés par des « parfaits » qui n’avaient reçu aucune ordination d’un évêque catholique. Cf. ibid., p. xlii, 79-81.

Ces attaques, dès qu’elles eurent reçu un commencement de publicité, ne laissèrent pas les catholiques sans réponse. Guerric, un disciple de saint Bernard († 1157), insiste vivement dans plusieurs de ses sermons sur les vertus de la rémission ecclésiastique. Cf. Sermones in quadragesima, dans Max. Bibl. vel. Patrum de Lyon, t. xxiii, p. 198-200.

Dans ses Sermones contra calharos, Ecbert, abbé de Schônau († 1 184), réfute les conceptions antisacramentelles des cathares ; à propos du sacerdoce, il affirme contre eux l’existence du pouvoir des clefs dans le clergé catholique. Serm., x, Contra septimam hæresim de sacerdotio, P. L., t. excv, col. 69 sq. De même Ermengaud (f vers 1195), qui, n’en déplaise au titre donné par les éditeurs, parle non des vaudois, mais des cathares. Voir Opusculum contra hærelicos, c. xiii, De sacramento pœnitenliæ, P. L., t. cciv, col. 1259. C’est aux vaudois qu’en a Bernard de Fontcaud († 1190), et il établit contre eux les pouvoirs spéciaux confiés aux évêques et aux prêtres. Voir surtout Liber contra waldenses, c. ii, n. 9, P. L., t. cciv, col. 800.

C’est de l’énorme masse des documents ainsi rassemblés qu’il faut maintenant extraire les renseignements qui permettront de reconstituer la pratique pénitent ici le et la doctrine qui s’en déduit pour l’époque étudiée.

II. la pratique.

Nous commencerons par décrire la pénitence publique, qui subsiste encore, au moins à titre d’organe-témoin, mais nous devrons surtout insister sur la pénitence privée qui se rapproche de plus en plus de la forme moderne.

Le principe de la distinction de ces deux formes et de leurs ressorts respectifs avait été clairement posé au ixe siècle ; on ne reviendra plus là-dessus. Cela ne veut pas dire que la pratique n’ait apporté aucune atténuation à la rigueur de l’axiome qui proclamait ; « A faute publique, pénitence publique ; à faute occulte, pénitence secrète. » De plus en plus, la pénitence secrète aura tendance à s’annexer partiellement le domaine de la vieille discipline. Toutefois, la théorie maintient les droits de celle-ci ; elle s’exprime au mieux dans le Décret de Gratien, dist. L, voir surtout les dicta Gratiani aux canons 61, <>'-’, 64, 67.

La pénitence publique.

1. Sa persistance. — Bile

est clairement attestée par les documents liturgiques.

Il est bien remarquablequ’àla ftn dux » slèclelesliturgisles de la région rhénane, préoccupes de constituer un pontifical, fassent une place aussi considérable au rite de l’exclusion et de la réconciliation des pénitents. Un tel souci ne se comprendrait pas. si la pénitence publique n’avait pas élé d’un usage courant. Or, non seulement les liturgistes de. l’âge ottonien finissent pu

constituer, à l’aide de pièces de provenance diverse.

Un rituel complet et fort expressif ; mais les copistes du début du xi° siècle s’empressent de transcrire, à leur tour — au besoin en l’aménageant et plutôt en l’amplifiant le cérémonial ainsi compose, n sérail intéressant de suivre le sort de ce pontifical romano germanique en Italie et particulièrement à Home. On constaterait, avec quelque surprise, que cet ordo pœnitenttæ Hnit par disparaîtra des livroa liturgiques

lu xii’Siècle ; c’est en l’incorporant à son RailOnalt ilii’inorum aflirioriim que Guillaume Durand (t I assurera sa transmission à notre pontifical actuel)