Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.1.djvu/270

Cette page n’a pas encore été corrigée

525

    1. PÉCHÉ ORIGINEL##


PÉCHÉ ORIGINEL. LE CONCILE DE TRENTE

526

Ce faisant, le concile se tient sur le plan de la tradition dogmatique et légifère contre l’erreur. S’il écarte la confusion faite par Luther entre la concupiscence comme telle et le péché originel, il ne veut nullement statuer sur ce qui constitue l’essence de ce péché. C’est pour maintenir la liberté des écoles que l’on a ajouté sans doute, en dernier lieu, au décret primitif la petite incise, in renatis : « quod vere et proprie in renalis peccatum sit ». Par cette restriction les Pères ne définissent pas que la concupiscence est un péché avant le baptême, mais ils laissent la liberté de le penser.

Plus tard, les augustiniens orthodoxes pourront s’autoriser légitimement de cette liberté pour maintenir l’interprétation de l’évêque d’Hippone touchant l’essence du péché originel, mais ils exagéreront en invoquant pour leur sentiment le patronage positif du concile de Trente. Estius, In IIum Sent., dist. XXX, 9, écrit : « Bien que les Pères du concile de Trente n’aient point voulu définir où est l’élément constitutif du péché originel et s’il faut le mettre dans la privation de la justice ou dans la concupiscence, pourtant, en enseignant que la concupiscence n’est pas un péché dans les baptisés, ils semblent bien avoir voulu nous laisser entendre qu’elle est un péché dans les non baptisés. » Bossuet, de son côté, écrit dans la Défense de la tradition, t. VIII, c. xxvii, éd. cit., p. 311 : « Le concile de Trente, en expliquant en quel sens elle peut être appelée péché, décide à la vérité qu’elle ne l’est pas véritablement et proprement, non vere et pwprie, mais c’est, dit-il, « dans les baptisés », in renatis ; ce qui semble indiquer que, dans les autres et avant ce sacrement, c’est un péché véritable et proprement dit, tant à cause qu’elle domine dans les âmes où la grâce n’est pas encore et qu’elle y met un désordre radical, qu’à cause qu’elle est le sujet où s’attache la faute d’Adam et le péché d’origine. »

7. — L’intention du concile relative à l’immaculée conception.

Déclarât tamen hsce ipsa

sancta synodus, non esse

suse intentionis, comprehen dere in hoc decreto, ubi de

peccato originali agitur, bea tam et immaculatam virgi nem Mariam, Dei Gcnitricem,

sed observandas esse consti tutiones felicis recordationis

Sixti papæ IV sub pœnis in

eis constitutionibus conten us, quas innovât.

Cependant, ce saint con cile déclare qu’il n’entre

point dans son intention de

comprendre dans ce décret,

relatil au péché originel, la

bienheureuse et immaculée

vierge Marie, Mère de Dieu,

mais qu’il faut observer les

constitutions du pape Six te IV. d’heureuse mémoire,

et cela sous les peines édic tées dans ces constitutions

que le concile renouvelle.

Voir Immaculée conception, col. 1166-1169.

.", " Lu parler du décret. — 1. Au point de vue dogmatique. Le décret de Trente marque admirablement la continuité de la foi, soit par ce qu’il rappelle, soit par ce qu’il précise de l’enseignement traditionnel.

Il rappelle, en effet, en les modifiant à peine et confirme de son autorité œcuménique les dérisions des conciles de Carthage et d’Orange. Lorsqu’il ajoute DU rient nouveau sur le caractère de la concupiscence dans les baptisés et sa distinction d’avec le péché originel, il le fait avec les expressions mêmes de PApôtre et de saint Augustin.

En continuité avec la tradition, il entend non der des opinions, mais défendre la vérité contre l’ei reur. Il le fait en tenant la voie du juste milieu entre les t. ndances néo pélagiennes d’un optimisme exa et celles d’un pessimisme nuln’I. outre les premières, il affirme la p< rte de la justice et de la sainteté par le fait du premier homme et la transmission d’un véritable péché originel contre les secondes, il maintient que i’de la nature ne sont pas totalement cor

rompu eulement amoindries relativement <.<

perfection qu’elles tenaient de la justice originelle dans laquelle l’homme avait été établi.

Ce qui est rejeté, c’est surtout l’identification du mal humain avec la concupiscence, l’idée que la concupiscence, jusque dans ses mouvements spontanés, est le centre du mal moral, que le baptême est impuissant à effacer le péché originel ; que la corruption de l’homme déchu est radicale, inguérissable. Ce qui est affirmé à la suite de saint Paul, c’est que rien n’est désagréable à Dieu dans l’âme du baptisé qui connaît encore les mouvements spontanés de la concupiscence, pourvu que sa volonté consciente et libre ne cède pas aux impulsions de ces mouvements ; ce qui est affirmé avec saint Augustin, c’est que le libre arbitre déchu, impuissant à récupérer, par ses seules forces, ce qu’il a perdu, recouvre en fait, lorsqu’il est aidé de la grâce du baptême, la liberté efficace, celle de mériter, de lutter contre la concupiscence, de remporter la victoire, d’être couronné. C’est, en face de la thèse qui soutient la corruption radicale de la nature, l’affirmation de la sainteté véritable, de la véritable liberté morale dans l’âme du baptisé qui veut coopérer à la grâce. Enfin, ce qui est ici désavoué, même dans la nature déchue laissée à elle-même, c’est l’impuissance absolue du libre arbitre ; il n’est pas supprimé par la chute, il est seulement affaibli, dit le concile de Trente. Ici les formules sont en progrès sur celle de saint Augustin : Nemo habet de suo nisi mendacium algue peccatum, In Joan., tract, v, 1, t. xxxv, col. 1414 ; sur le concile d’Orange, can. 27, Denz., n. 195. C’est évident. Mais les formules du xvie siècle ne sont pas en contradiction avec les formules antérieures, elles les éclaircissent et les complètent. La tradition intégrale de l’Église, telle qu’elle s’est affirmée de plus en plus au Moyen Age, a mieux distingué entre les forces naturelles et les forces surnaturelles, entre la liberté laissée à elle-même, capable d’actes moraux stériles pour le ciel, et la liberté aidée de la grâce, capable d’actes salutaires. Tout en ne reniant rien de l’incapacité absolue de la nature déchue par rapport au surnaturel, elle a reconnu que l’homme déchu gardait les facultés qui lui sont dues substantiellement intactes, avec leurs défauts et leurs faiblesses sans doute, mais aussi avec leur réelle puissance. On ne peut nullement opposer ici la conception semipélagiennc du concile de Trente comme le fait Loofs, Leitjaden zum Sludium der Ilogmengeschichle, 4e éd., p. G67, à celles de l’augustinisme ; il est plus juste de ne voir en ce système « qu’un moment de l’évolution théologique, tandis que la pensée chrétienne se révèle adéquatement dans l’ensemble du courant traditionnel »..1. Rivière, Péché originel, dans Dict. pral. des conn. rclig.. t. v, col. 1 15.

2. Au point de vue théologique.

Puisque le concile n’a rien voulu décider des opinions ni rien statuer sur la nature du péché originel que les scolastiques concevaient diversement, on n’a point le droit de le faire déposer sur l’une ou l’autre opinion concernant, par exemple, la façon dont il faut concevoir l’axiome : vulneralus in naturalibus, ou celle dont il faut définir le péché originel.

Le théologien remarquera toutefois que, du fait que le nouveau baptisé <si pur de toul péché el possède cependant la concupiscence a l’étal habituel, on ne peut mettre dans la concupiscence connue telle et sis mouvements spontanés l’essence du péché originel. Par là, le concile nous laisse entendre ce que n’est pas hé.

t // point de vue nuirai et religieux. Par sa conception de la concupiscence, le concile ne méconnaît sérieux et i ragique de c< lie ci au point

de vue de la ie religieuse et morale du c lire ! ien : il ne

quitte point le terrain religieux pour la considérer comme un phénomène Indifférent i faits