Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.1.djvu/198

Cette page n’a pas encore été corrigée

381

    1. PECHE ORIGINEL##


PECHE ORIGINEL. LA CONTROVERSE PELAGIENNE

382

Munich, 1892, p. 8 et 9, la liste des passages de saint Augustin qui se rapportent à la théorie de la masse.) Les affirmations postérieures à 412 n’ajouteront rien d’essentiel aux thèses de la consultation Ad Simplicianum. Ces thèses ne se sont point constituées sous la poussée de l’hérésie ; elles ont jailli, en 397, dans l’âme d’Augustin, d’une illumination décisive qui l’a éclairée à l’occasion de la lecture de saint Paul, Rom., vii, 19-25 ; c’est alors qu’il a vu nettement la relation intime qui liait l’idée de la gratuité de la grâce et celle qui représentait le genre humain déchu comme une masse déchue, impuissante par elle-même à se restaurer dans l’ordre et vouée à la damnation éternelle, si elle n’y était soustraite par la grâce. En conséquence, on pourra, avec Et. Gilson, op. cit., p. 201, être incliné par ces constatations à juger vaines les discussions relatives à l’influence de Pelage sur la doctrine augustinienne de la liberté : « Que le souci de s’opposer aux erreurs pélagiennes l’ait amené à exagérer les droits de la grâce et à compromettre le libre arbitre, comment cela se pourrait-il, s’il est vrai que le libre arbitre fut toujours hors de discussion et que, pour le reste, il donna tout à la grâce depuis le jour où il lut saint Paul et le comprit. Jamais saint Augustin n’ira plus loin, parce qu’il est allé d’emblée jusqu’au terme : l’homme ne peut faire que ce que Dieu lui donne la force de faire : Da quod jubes et jubé quod vis, « donnemoi ce que tu exiges, et exige ce que tu veux », voilà l’un des thèmes essentiels des Confessions (et déjà de l’épître à Simplicien, peut-on ajouter) et si saint Augustin l’écrivait en 400, on se demande ce qu’après 410 il pourrait avoir ajouté à cette formule [jour la dépasser. « 

IV. Conclusion générale touchant l’état de la tradition latine et ghecque. - On a parfois opposé le témoignage des Pères latins à celui des Pères grecs touchant la doctrine du péché originel durant les quatre premiers siècles. Il est plus juste de comparer ces témoignages et de marquer objectivement ce en quoi ils s’accordent et ce par quoi ils se différencient.

Leurs ressemblances.

Pères latins et Pères grecs

allinnent à peu près unanimement (Théodore de Mopsueste excepté) que l’homme actuel n’est point dans l’état où Adam se trouvait au sortir des mains de Dieu. Tous proclament qu’il naît dans un état de déchéance consécutif a la faute d’Adam : il encourt du fait de la chute, ici-bas, une condamnation aux misères de la vie présente : souffrance, inclination au mal, mortalité, et, dans l’autre vie, l’exclusion du droit au bonheur du ciel. Tertullien, Ambroise, l’Ambrosiastcr chez les Latins, aussi bien que Grégoire de Nysse et Grégoire de Xazianze chez les Grecs, s’entendent d’ailleurs à établir une entière différence entre les peines réservées dans la géhenne aux fautes actuelles, et la peine de l’exclusion du ciel subie pour la faute originelle.

Certains Latins (l’Ambrosiaster, Tertullien), aussi bien que certains Grecs (Grégoire 0e sse. Clément d’Alexandrie, Jean Ghrysostome), frappés sans doute par la nature particulière du péché originel, qui, à la différence des péchés actuels, ne requiert pas un acte de volonté personnelle en celui qui est responsable, ont pu même appeler les petits enfants « innocents

2° Leurs différences. Tandis que les pères grecs ont décrit l’état de condamnation ou se trouve le genre humain beaucoup plus par les peines qui le manifestent, que par l’étal de culpabilité commune qui l’explique, les Pères lutins ont. insisté davantage sur l’étal de souillure dans lequel si’trouve l’homme déchu. Tandis que les premiers aimaient : i mettre en relief, contre les manichéens, ce qui reste à l’homme < ! < force libre pour le bien, les seconds étaient frap

pés plutôt de l’état de faiblesse induit en nous par la concupiscence, et insistaient davantage sur la gratuité de la grâce.

Plus qu’à personne, il fut donné au génie d’Augustin de mettre l’accent non plus seulement sur le caractère pénal de l’état de l’homme déchu, mais surtout sur l’aspect moral de la faute du genre humain en Adam, et cela en dégageant d’une vérité traditionnelle reçue de tous la conclusion qu’elle impliquait. Les Pères avaient enseigné unanimement la pénalité commune imposée aux humains à la suite de la faute d’Adam. Une pénalité commune implique naturellement, conclut Augustin dans le De libero arbitrio, III, xix, 54, t. xxxii, col. 1297, une culpabilité commune.

Par sa thèse de la massa damnala, Augustin ne se contente pas d’affirmer froidement cette vérité théorique que l’humanité déchue se trouve dans un état malheureux et coupable ; il la présente en un système collèrent ; il lui donne une expression personnelle, forte, sévère, disons rigide et pessimiste, puisque la tradition postérieure se verra obligée de l’adoucir. Augustin a emprunté sans doute à saint Paul le terme de massa, mais il lui donne un sens qui lui est propre. Tandis que l’Apôtre s’était servi de la comparaison de la masse d’argile que le potier façonne selon son bon plaisir pour expliquer la souveraine indépendance de Dieu dans l’appel à la foi, Augustin l’emploie pour désigner l’humanité solidaire d’Adam et constituée dans un état de péché. L’Ambrosiaster, qui se rapproche le plus d’Augustin, et par la doctrine et par le langage, a utilisé cette comparaison, mais, comme on l’a remarqué, il est beaucoup moins rigide que le docteur d’Hippone dans l’emploi qu’il en fait. En effet, tout en voyant dans la masse d’argile l’humanité corrompue par le péché originel, qui mérite la mort et l’exclusion du ciel, le commentateur ajoute que la mort seconde, c’est-à-dire les peines de la géhenne, ne nous seront infligées qu’en raison des péchés personnels. Salgueiro, op. cit., p. 113.

Ainsi, dès avant le pélagianisme, la doctrine d’Augustin, tout en se maintenant en continuité avec la doctrine des Pères antérieurs, s’en distingue déjà par l’expression plus cohérente, plus forte, plus sévère. plus dramatique qu’elle donne à la vérité traditionnelle du dogme du péché originel. Dès 397, le génie de l’évêque d’Hippone, fécondé par la méditation de saint Paul, de la tradition et de sa douloureuse expérience, se trouvait en possession de l’arme de choix dont il allait se servir dans le combat doctrinal contre Pelage.

IV. LA CONTROVERSE PELAGIENNE.

Cette controverse va amener dans la doctrine du péché originel des précisions qui serviront de point de départ à un développement ultérieur. Elle a eu une particulière importance en Occident : ce n’est qu’indirectement qu’elle a touché l’Orient (col. 102).

I. La CONTROVERSE en Occident. L’influence immédiats d’Augustin. Après avoir montré les

demi pensées aux prises, nous aurons à étudier plus en détail l’ensemble de la doctrine aULîustinicnne. telle qu’elle S’exprime en face du rationalisme pélagien. — 1° l.e choc des doctrines. 2° Preuves et exposé de la doctrine Catholique (col. 3K8).

t. Ut ru - 1° Opposition fonda mentale entre tes thèses traditionnelles d’Augustin et le rationalisme pélagien. Il ne peut être question

d’exposer ici a nouveau le système pélagien et de donner une vue d’ensemble complète sur les t hèses défendues par Aumistin contre Pelage, < f.ut i et min, col. 2380-2364, et ail. Pi i toi II suffit de rappeler "inls de vue antithétiques du docteur d’Hippone et de l’hérésiarque, dans in mesure stricte ou cela est