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PÉCHÉ. CAUSES INTÉRIEURES, L’IGNORANCE

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Même complication et même fidélité si l’on en vient, avec les Salmanticenses, disp. XII, dub. i, à concevoir au principe du péché une potentia peccandi qui soit chose positive et non proprement défaut ; ils l’exigent comme l’origine propre de la malice positive, et la représentent comme la puissance de tendre vers l’objet non convenable ; elle explique que la volonté se serve de son défaut, car il advient qu’elle ne s’en serve pas, se rectifiant au moment d’agir. En définitive, le péché cependant vient de ce que la volonté a agi sans règle. Qu’une règle ne s’impose point, et l’idée même d’objet discordant s’évanouit, et la puissance de pécher n’est plus que la puissance d’agir. La volonté défectueuse ne laisse pas de rendre compte formellement du péché. I a -IIa>, q. lxxv, a. 1.

2° D’où provient le défaut de la volonté ? — Nous avons dit comment développer correctement l’étude des causes du péché : on ne peut qu’y rechercher d’où vient que la volonté soit établie en cette condition défectueuse que nous avons marquée. Cette étude accomplie, en même temps qu’elle perfectionne la doctrine du péché, est propre à nous assurer sur le péché la maîtrise psychologique, où tend, en une telle matière, l’effort de la connaissance.

Les causes intérieures s’offrent dès l’abord à noire entreprise. Dans l’âme, qu’est-ce qui agit sur la volonté pour la mettre en cette disposition d’où sortira le péché ? Retenons ici le bénéfice de notre première détermination, et ne recherchons point ce qui inclinerait la volonté vers quelque privation, mais bien ce qui la dispose à agir, quoique de telle façon qu’une privation doit s’ensuivre. Or, d’une façon générale, concourent à l’acte de la volonté la volonté même et la raison, voire les sens et l’appétit sensible par quoi est sollicitéela volonté. Seule, cette puissance exerce l’acte, mais les autres, et la volonté elle-même considérée en ses inclinations, préparent l’objet. Que l’objet ainsi élaboré ne convienne pas, et la volonté s’y portant commettra le péché. Il suffit, pour qu’il ne convienne pas, qu’une seule des puissances intervenant dans l’élaboration d’un acte volontaire ait déterminé l’inapplication de la règle de raison ; à cette puissance est alors attribué le péché, encore que les autres aient pu se ressentir de son propre désordre. D’où les catégories distinctes des péchés de sensibilité, d’ignorance, de malice, selon qu’il faille découvrir dans l’appétit sensible, dans la raison ou dans la volonté la première origine du péché ; mais tout péché emporte un désordre de volonté, comme nous le savons déjà, et comporte une ignorance, comme nous le dirons bientôt, quelle que soit la puissance de l’Ame d’où il dérive premièrement. On voit que la sensibilité et la raison, que nous avons considérées précédemment comme des sujets du péché, où se situe l’acte mauvais issu de la volonté, seront ici considérées proprement comme des causes du péché, grâce auxquelles la <> lonté en viendra à cet acte mauvais : elles représentent

i ie titre une donnée naturelle, antérieure au mal,

lequel s’inaugure avec l’acte volontaire lui-même. Nous ne mettons pas des péchés au principe du péché. D II æ, q. lxxv, a. 2.

On peut ensuite rechercher si ie péché n’a point des nuises extérieures, c’est-à-dire agissant sur les puis sauces de l’âme en des conditions telles que de celli

de le péché : car il est impossible que le péché ne le pas du dedans. Tout agent, auquel est soumise quelqu’une îles puissances intéressées au péché, tombe ni sous l’examen. Sur la volonté, Dieu seul agit. Sur la raison, par mode de persuasion, l’homme et le diable agissent. Sur la sensibilité, le obj< i en et ceux qui les lui proposent. De ces causes, coin me des causes extérieures, Il y a donc lieu de défini] l’Influence par rapport au péché. On ne le fera point

DICT. IF. THÉOL. CATIIOL.

sans se donner en même temps de quoi apprécier plus précisément la gravité des péchés, par l’endroit où celle-ci dépend du volontaire. Sum. theol., Ia-IIæ, q. lxxv, a. 3.

Le péché cause de péché.

Nous aurions ainsi

défini le programme complet de notre recherche, s’il n’y avait lieu de considérer, entre toutes les causes du péché, le péché lui-même. Par rapport à celles que nous avons dites, il n’est pas une cause nouvelle. Mais on comprend que d’avoir commis un péché, cela peut disposer les puissances de l’âme à préparer un péché nouveau, comme à subir plus docilement les influences extérieures favorables au péché. Une âme de pécheur est un milieu propice à la naissance du péché. En cette considération, la théologie systématique rencontrera de vieux usages de la pensée chrétienne, dont l’un s’exprime en la célèbre théorie des péchés capitaux. l a -II æ, q. lxxv, a. 4.

II. LES CAUSES DV PÉCHÉ EN PARTICULIER.

Selon

le programme que nous venons de fixer, où une théologie systématique tente de comprendre et d’ordonner en un tableau complet des causes du péché l’abondance et la diversité de matériaux traditionnels, la présente étude se répartit en celle des causes intérieures du péché, des causes extérieures du péché, des péchés comme causes d’autres péchés.

Les causes intérieures du péché.

On veut donc

dénoncer ici les points où le péché entre dans l’âme. L’analyse ci-dessus évoquée a préparé la triple répartition de cette matière. Avec les noms de péchés d’ignorance, d’infirmité, de malice, la théologie de saint Thomas élabore ici des catégories anciennes et familières entre lesquelles on avait distribué les péchés.

Elles se trouvent, par exemple, dans la Somme d’Alex, de Halès où elle fournissent la matière d’un traité entier à l’intérieur de la partie consacrée au péché. On en a déjà l’idée nette, par exemple dans ce passage d’Origène, qui s’autorise, pour la présenter, d’une énumération tripartite de saint Paul : « Ce n’est pas sans raison, à mon avis, que Paul emploie différents termes, parlant tantôt d’infirmes, tantôt d’impies et tantôt de. pécheurs, pour qui le Christ est mort… Ou bien, en effet, ignorant Dieu, quelqu’un pèche dans les ténèbres, et c’est un impie ; ou, voulant observer le précepte, il est vaincu par la fragilité de la chair, séduit par les appâts de la vie présente, et c’est un Infirme ; ou, le sachant et le voulant bien, il méprise le précepte, déteste la discipline de Dieu et rejette derrière lui ses paroles, et c’est un pécheur. » In epist. ad Rom., iv, 11. P. G., t. xiv, col. 999 BC ; cf. un développement analogue sur les trois catégories de pécheurs, distinguées par saint Paul chez les Corinthiens, malades, faibles, endormis, In Maith., tom. x, n. 24, P. G., t. XIII, col. 900-901 (cité par F. Cavallera, La doctrine de la pénitence au IIIe siècle, dans Bulletin de litt. eccl., Toulouse, 1929, p. 34). L’ordre de cette étude semble être celui de l’Influence décroissante des (anses considérées sur le volontaire de l’acte du péché : l’Ignorance, par quoi l’on commence, allant jusqu’à ôter le volontaire, la passion le diminuant, la malice lui laissant toute sa pureté. Il se confirme ainsi que l’el mie des causes du péché doit permettre une évalua I ion plus précise de la gravité des péchés en tant qu’elle dépend du volontaire.

I. L’ignorance. — Sans influence fâcheuse de la sensibilité, sans disposition maligne de la volonle, le

péché cependant peut l’insinuer dans l’âme par la

VOle « le la raison. L’ignorance est cette voie

I n l’étude de cette cause du péché, saint ThO)

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