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ORDRE. LES PREMIERS SCOLASTIOUES


la question, si controversée alors, de l’efficacité du rite sacramentel chez les hérétiques et les simoniaques. Nombre d’auteurs qui parlent de l’ordre ne le font qu’en passant, énumérant les différents ordres et leurs fonctions ; cf. dans les œuvres d’Alcuin, la Disputatio puerorurn, c. ix, P. L., t. ci, col. 1097 ; insistant sjir les vertus, spécialement la continence, qu’exigent les ordres sacrés et rappelant les prescriptions canoniques relatives à l’accès aux saints ordres. Mais la théologie spéculative touchant l’institution, l’essence, les effets du sacrement est, pour ainsi dire, inexistante. Les rares auteurs qui paraissent y toucher de loin se contentent la plupart du temps d'énumérer les divers ordres en indiquant quelques-unes de loirs fonctions.

Nous avons cité plus haut, col 1283, de saint Agobard, le petit traité De privilégia et jure sacerdotii, P. L., t. civ, col. 127-148, où l’auteur exalte la dignité et les, vertus sacerdotales et signale quelques empêchements d’ordre physique et surtout d’ordre moral. L’insuffisance doctrinale ou l’indignité de vie d’un prêtre lui enlève le droit de commander aux fidèles. Nous avons dit qu’Agobard admet la validité des sacrements administrés par des indignes.

C’est surtout sur l’obligation de la continence qu’insiste Halitgaire, évêque de Cambrai, dans son De vitiis et virtutibus et de ordine pœnilentium, au livre V, P. L., t. cv, col. 687 sq.

Au point de vue liturgique, il faut ici signaler l’ouvrage capital d’Amalaire de Metz, De ecclesiasticis offlciis, P. L., t. cv, col. 986-1242.

Avec Raban Maur, nous rencontrons un auteur qui traite ex professo de l’ordre dans le De clericorum instilutione. Dans le t. I, il partage l'Église en 'aïques, moines et clercs (c. n). On entre dans le clergé par la tonsure (c. iii). Le c. iv énumère les huit degrés de la cléricaturc le psalmiste étant identifié avec le lecteur. L’auteur traite ensuite de l'épiscopat, avec la triple dignité des patriarches, archevêques ou métropolitains, simples évêques (c. v) ; du presbytérat (c. vi) ; du diaconat (c. vu) ; du sous-diaconat et de l’ordination du sous-diacre par la tradition du calice et de la patène, en opposition avec l’imposition des mains réservée au diacre et au prêtre (c. vin). La question des vêtements et ornements liturgiques est assez longuement traitée (c. xiv-xxiii), P. L., t. cvii, col. 297 sq. ; cf. De universo libri XXII, t. I, c. v, t. xci, col. 91 ; In epist. ad Eph., c. iv, t. cxii, col. 430 sq. Au 1. III du De clericorum institutione, Raban Maur parle de la science requise chez les prêtres (c. i), exalte les vertus nécessaires (c. xxvii) et s'étend longuement sur la prédication et les aptitudes qu’elle requiert (c. xxviii-xxxix), P. L., t. cvii, col. 377, 405 sq.

Dans le Pœnitentiale, Raban Maur insiste sur le traitement à infligei, d’après les décrets des papes et des conciles, aux crimes capitaux commis par les clercs, c. x-xii, P. L., t. ex, col. 474-482 ; il ne veut pas se prononcer sur le cas d'Ébon, c. xxxiv, col. 494. Ce n’est qu’en passant qu’il touche à la question des simoniaques, c. xix, mais sans rien dire de la nullité de leurs ordinations, col. 485.

Le point de vue moral et ascétique est abordé surtout dans le Commentaire In epist. ad Hebr., c. v et x, P. L., t. cxii, col. 742 sq., 779 sq.

On retrouvera les préoccupations morales et disciplinaires, touchant la vie des clercs, dans différents capitulaires et décrets de cette époque. Citons rapidement, de Rudolphe, évêque de Hourges, Capitula, vn-ix, P. L., t. exix, col. 707 sq. ; de Walter, évêque d’Orléans, Capitula, col. 725 sq. ; de Réginon, abbé de Prum, De ecclesiastica disciplina et religione christiana, t. cxxxii, col. 203 sq. ; de S. Odon, arche vêque de Cantorbéry, Constitutiones, t. cxxxiii, col. 947 sq. ; d’Atton de Verceil, Capitularia, t. cxxxiv. col. 27 sq. ; de saint Abbon, abbé de Fleury, collection de canons, t. cxxxix, col. 474 sq. ; de Burchard de Worms, Decretorum, t. II, De sacris ordinibus, t. cxl, col. 625 sq.

Relevons chez saint Pierre Damien le souci de mettre en relief le caractère social du prêtre, représentant la communauté chrétienne tout entière : Pars ecclesiaslici Corporis, lotius Ecclesiie, convenienter utitur verbis : Dominus vobiscum. Cet opuscule xi, sur le « Dominus vobiscum », est à relire, P. L. t. cxlv, col. 238.

Guibert, abbé de Sainte-Marie de Nogent-sousCoucy, tient pour nulles les ordinations faites et les sacrements conférés par les hérétiques et les simoniaques, De pignoribus sanctorum, t. II, c. ni, P. L., t. clvi, col. 636 sq. Peut-être ne s’agit-il, au fond, que de la nécessité de l’intention de faire ce que fait l'Église.

Saint Anselme n’a pas traité ex professo la question sacramentaire de l’ordre. Néanmoins il y a beaucoup à glaner dans ses « Prières » ou ses « Lettres ». Dans ses prières, il laisse percer la haute idée qu’il se fait du sacerdoce et de ses fonctions, notamment à l'égard de la sainte eucharistie, Orationes, xxiv-xxxiv, P. L., t. clviii, col. 908 sq. Les péchés du prêtre sont des crimes ; néanmoins il ne faut pas hésiter à accomplir les devoirs redoutables du sacerdoce, quelle que soit notre crainte d’y trouver l’occasion d’offenser Dieu, col. 912. Dans ses Lettres, Anselme fait plus d’une fois allusion à la discipline pénitentielle relative aux péchés des prêtres ; toutefois il affirme que l’on ne doit pas exclure de l’exercice de son ordre le prêtre pécheur, dont la faute n’est pas publiquement connue et qui se repent sincèrement. Epist., t. I, n. lvi, col. 1126.

Quelques allusions aux vertus sacerdotales chez Bruno de Segni, Rupert de Deutz, dans les sermons de saint Bernard, et dans le Verbum abbreviatum de Pierre le Chantre. Avec plus d’insistance, Hildebert du Mans revient sur ce sujet dans ses sermons synodaux, Sermones synodici, lxxxviii-xcvh, t. clxxi, col. 751 sq. La question des simoniaques est traitée au sermon xevi, mais sans que rien puisse faire supposer que l'évêque du Mans n’admette pas la validité des sacrements par eux conférés.

Honorius d’Autun aborde plus directement le sujet de l’ordre dans son De missæ sacrificio et de ministris Ecclesiiv : 1° les fonctions et significations des ministres au saint sacrifice, c. ix-xv ; xx ; t. clxxii, col. 547-549, 550 ; 2° les différents ordres, depuis les clercs jusqu’au pape, c. clxxiv-cx-ciii, col. 597-602 ; 3° les ornements et vêtements des clercs c. cxcixeexxxv, col. 604-614.

Un simple mot en passant sur ordinatio, scientia, actus des clercs dans Alain de Lille, Theolog. régula ; cxv, P. L., t. ccx, col. 681 ; cf. Distinctiones dictionum theologalium, v 3 Ordo, col. 884.

Enfin nous arrivons au véritable précurseur de la théologie scolastique, au principal inspirateur du Maître des Sentences, Hugues de Saint-Victor, dans son traité De sacramentis, t. I, part. III, P. L., t. clxxvi, col. 421-434. « Hugues glisse sur la constitution du sacrement et sur la grâce qu’il produit, ne parle pas du caractère et parle peu du pouvoir de juridiction. Il établit toutefois la différence entre le pouvoir de juridiction et le pouvoir d’ordre, part. II, c. v ; part. III, c. v col. 419, 423. Non content d’englober les ordres sous la dénomination très générale de sacrements, part. V, c. i, col. 439, il les présente comme un sacrement véritable, puisqu’il en fait des rites sensibles, accompagnés de paroles, qui confèrent,