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    1. PAUL (SAINT)##


PAUL (SAINT). EPITFŒS PASTORALES

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dessous des puissances. Au contraire, en lui réside la plénitude des attributs divins : il est donc le chef des puissances. Puis le texte Col., i, 19, qui ne mentionne pas « la divinité », mettant seulement en relief la prééminence du Christ : car « en lui habite la plénitude ». Théodoret l’entend de l’Église, en se référant à Eph., i, 23 : ce plérôme serait le trésor de grâces divines que l’Église possède précisément parce qu’elle a le Christ pour chef. Le Christ a ainsi une plénitude de biens spirituels ou de grâces qu’il donne à son Église. Cette plénitude se communique aux fidèles, pourvu qu’ils soient dans le Christ ; cf. Col., ii, 10 : « En lui vous participez à la plénitude. » Ainsi, le chrétien tire sa perfection du « plérôme » entendu dans le sens chrétien, non dans le sens gnostique.

Toutefois, saint Jean Chrysostome, Théophylacte entendent le 7rXr)pco[i.a de i, 19, en suppléant -rrjç ŒÔtï)toç qui est exprimé dans ii, 9 : « la plénitude de la divinité ». Il faut avouer que l’expression tocv to TrX^pw[xa, identique dans les deux passages, appuie fortement cette explication. C’est pourquoi plusieurs commentateurs voient dans le iïv}pcoy.o(. de i, 19, à la fois la plénitude de la divinité et celle des grâces. Cf. Knabenbauer, p. 301. En tout cas, cela est dit d’une façon moins explicite que dans le passage ii, 9-10 : le Christ possède la plénitude de la divinité, et en lui on participe à cette plénitude.

Dans Eph., i, 23, le Christ étend sa « plénitude » à tous, et forme ainsi l’Église qui est son corps. Dans Eph., iv, 13, par l’union au Christ, en recevant « sa plénitude », on arrive au plein développement spirituel. Enfin, dans Eph., iii, 1(5 sq., l’Apôtre prie pour que les fidèles possèdent < la plénitude de Dieu », c’est-à-dire dont Dieu est la source et qu’il communique « aux saints ».

Dans ces trois derniers passages, il est nettement question de la « plénitude » donnée à l’Église ou aux fidèles, dans l’ordre de la grâce et de la vie spirituelle ; il n’y a pas de doctrine proprement christologique. Il n’en est pas de même dans Col., i, 19, et ii, 9, où la nature divine du Christ est définie pour écarter de fausses conceptions concernant sa personne.

Or, les gnostiques emploient le mot 7tXr)pco ; i.a en un sens plus précis ou plus technique. Ils font appel au Nouveau Testament dont ils modifient profondément la doctrine ; cf. Irénée, Cont. hier., i, iii, 4, P. G., t. vii, col. 473. Ils l’entendent d’abord dans le sens de « totalité », par opposition à la « déficience, ûcttspy )[i.a » ; cf. Irénée, I, xvi, 2, col. (132 ; Hippolyte, Philos., VI, xxxi, 1, et ils en font une spéculation philosophique. Ou encore ils l’entendent par opposition à « l’irréalité, au vide, xévco[i.a », qui caractérise les phénomènes passagers.

D’après Cérinthe, c’était la plénitude de la vie divine, d’où « le Christ divin était descendu dans l’homme Jésus au baptême », et où il était retourné avant la passion. Le terme couvrait ainsi une fausse doctrine de l’incarnation. Cf. saint Irénée, Cont. hær.. III, xi, 1 ; xvi, 1, col. 560, 629.

Pour d’autres gnostiques, le Dieu suprême était le principe d’où procédaient un certain nombre d’êtres classés d’après une hiérarchie et groupés par couples. La totalité de ces êtres composent le plérôme. Tout cela n’est que la transformation de l’ancien panthéon ou famille des dieux : les attributs de la divinité étaient présentés avec des existences distinctes. Chez les valentiniens, les membres du plérôme s’appelaient éons, et procédaient de la divinité par émanation. Ainsi, l’être premier était conçu comme se répandant en une série d’existences venant combler l’abîme qui séparait Dieu du monde dans la philosophie grecque.

En adaptant le christianisme à une telle philosophie, on était porté à faire du Christ, non une per sonne historique, mais une émanation temporaire et immatérielle de la divinité.

Enfin, on regardait la « connaissance » comme supérieure à la foi et comme l’apanage des « spirituels ». La foi restait le fait de la masse populaire incapable de s’élever à un niveau supérieur. Le salut était le résultat de la « connaissance », non de la foi. (Contraste avec saint Paul.) La volonté était subordonnée à l’intelligence, et tous les efforts tendaient à acquérir cette « connaissance » ésotérique, privilège d’une aristocratie intellectuelle.

On voit que le gnosticisme du iie siècle est loin de saint Paul, et combien il serait risqué d’attacher à certaines expressions, isolées dans le Nouveau Testament, des idées gnostiques bien définies. Tout ce que l’on peut faire, c’est de parler de tendances gnostiques. L’Apôtre réagit contre ces tendances ; il n’est point en face d’un système.

Voir la bibliographie des articles Colossiens (Ëpilrc aux) et Éphésiens (Épitre aux) ; ajouter les ouvrage* suivants :

Catholiques.

V. Rose, Jésus-Christ, Seigneur et Fils

de Dieu, dans Revue biblique, 1903, p. 337-361 ; H. Couget, La divinité de Jésus-Christ. L’enseignement de saint Paul, Paris, 1906 ; A. Royet, Étude sur la christologie des épttres de saint Paul, Lyon, 1907 ; Belser, Der Epheserbrief, Friboug-en-B. , 1908 ; K.-J. Millier, Des Apostels Paulus Brie/ an die Epheser, Graz, 1909 ; J. Knabenbauer, Commentarii in S. Pauli epislolas ad Ephesios, Philippenses et Colossenses, Paris, 1912 ; H. Schumacher, Christus in seiner Pràexisienz und Kenose, Rome, 1914 ; M. Meinertz, Der Epheserbrief, Bonn, 1921 ; Der Kolosserbrief, Bonn, 1921 ; F. Tillmann, Der Philipperbrief, Bonn, 1921 ; Vosté, Commentarius in epistolam ad Ephesios, Rome-Paris, 1921 ; W. Kôster, Die Idée der Kirche beim Apostel Paulus, dans Ntl. Abhandlungen, t. xiv, fasc. 1, Munster-en-W., 1928, abondante bibliographie.

Non catholiques.

 J.-B. Lightfoot, St. Paul’s epistle

to the Philippians, Londres, 1903 ; St. Paul’s epistles to thc Colossians and to Philemnn, Londres, 1904 ; M. Bruckner, Die Entstehung der paulinischen Christologie, Strasbourg, 1903 ; W. Olschewski, Die Wurzeln der paulinischen Christologie, Kœnigsbeig, 1909 ; M. Vincent, The epistles to thc Philippians and to Philemon, dans The international critical commentarꝟ. 3e éd., Edimbourg, 1911 ; M. Dibelius, An die Philipper, Kolosser, Epheser, dans Handbuch zum N. T. de Lietzmann, 2e éd., 1925-1927 ; J.-A. Robinson, St. Paul’s epistle to Ephesians, 2e éd., Londres, 1928 ; E. Lohmeyer, Der Philipperbrief, dans Meyers Kommentar, 9° éd., 1929 ; Der Brief an die Kolosser und der Brief an Philemon, dans Meyers Kommentar, 8e éd., Gœttingue, 1930.

IX. Les épîtres pastorales : L’organisation et

LE GOUVERNEMENT DE L’ÉGLISE. La DÉFENSE DE LA VRAIE FOI OU LE SENS DE L’ORTHODOXIE. 1° La

hiérarchie : Timothée et Tite ; les « évêques » et les « presbytres » ; les diacres ; les diaconesses ; les veuves. 2° La prière publique et la discipline. 3° La défense de la foi : « L’Église du Dieu vivant, colonne et fondement de la vérité. »

Selon beaucoup de critiques indépendants, la situation historique supposée par les épîtres pastorales serait invraisemblable ou inconsistante. Le développement de la hiérarchie ecclésiastique et l’établissement de l’épiscopat monarchique, dont l’auteur semblerait vouloir montrer l’origine apostolique ; les formules doctrinales qui ne sont plus les mêmes que dans les autres épîtres ; les différences de style et de vocabulaire ; enfin, la difficulté de faire entrer dans le cadre de la vie de saint Paul les voyages de l’Apôtre mentionnés dans ces épîtres : telles sont les principales raisons invoquées pour nier l’authenticité des pastorales. Leur milieu et leur époque ne seraient point ceux de saint Paul. Nous aurions là seulement une « forme secondaire » de paulinisme, ne remontant pas avant la fin du I er siècle.

Il n’entre point dans notre cadre de discuter les