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PAUL (SAINT). LE PÉCHÉ OHKilNEL


réserve aux justes et qui est une participation à sa gloire propre.

Le support des épreuves, dans cette condition nouvelle, est un motif d’espérance, car il permet à l’homme de montrer sa fermeté dans la « grâce dans laquelle il a été établi », ꝟ. 2. « Or, l’espérance ne trompe pas », ꝟ. 5. Ce n’est point une illusion que l’on risque de voir s’évanouir. Elle repose sur une certitude qui doit soutenir constamment l’homme dans le développement de la vie chrétienne. C’est là un point sur lequel l’Apôtre insiste d’une façon remarquable, non seulement dans Rom., v, 1-11, mais encore dans viii, 1827 ; 35-39. Une fois justifié, l’homme doit diriger ses désirs et son activité uniquement vers le but à atteindre c’est-à-dire le salut.

Mais l’homme, avec sa faiblesse, est-il assuré de soutenir son effort de vie spirituelle jusqu’au bout ? L’Apôtre sent toute cette faiblesse, viii, 20. Pour lui. le salut ne se réalise point d’une façon mécanique, en dehors de l’activité et de l’énergie humaine ; mais cette énergie est soutenue et dirigée par la grâce de Dieu, et c’est précisément ce qui constitue la garantie de l’espérance chrétienne : « L’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit-Saint qui nous a été donné », ꝟ. 5. Ainsi, le don de la justice est accompagné de celui de l’Esprit-Saint qui habite dans l’âme (cf. viii, 9, 11) et dont l’Apôtre exposera plus loin le rôle. Cet Esprit a répandu l’amour de Dieu en nous : il s’agit sans doute de l’amour dont Dieu nous aime, comme le montrent les ꝟ. 5 et 8, et non de l’amour de l’homme pour Dieu. Mais cet « amour de Dieu » est un amour communiqué, une réalité divine donnée par l’Esprit ; l’Apôtre expliqusra plus loin cette communication de vie divine. Or, l’amour de Dieu ne saurait être dans l’homme sans qu’il y ait de la part de l’homme un amour réciproque. Cf. Joa., xiv, 21-23, et I Joa., iv, 16.

Cet amour de Dieu s’est manifesté « en ce que, alors que nous étions encore pécheurs, le Christ est mort pour nous », ꝟ. 8. Si Dieu, en effet, nous a témoigné une telle bonté alors que nous étions ses ennemis, à plus forte raison, maintenant que nous sommes justifiés et réconciliés par la mort de son Fils, nous donnera-t-il le salut « en sa vie », ꝟ. 10, c’est-à-dire en nous faisant participer à la vie du Christ, en nous faisant vivre de la vie chrétienne par l’action de l’Esprit-Saint. Cette vie sera décrite, Rom., vi-vm. Cf. Joa., iii, 16 ; xv, 1 sq. ; xiv, 21, 23 ; xvii, 26 ; I Joa., iv, 16.

2. L’humanité pécheresse en Adam, mais justifiée et sauvée dans le Christ : le péché originel. — Après avoir présenté le résultat de la justification sous son aspect intérieur et personnel, afin de donner au chrétien l’assurance du pardon et la joie de se sentir dans le vrai chemin, l’Apôtre expose ce résultat en considérant l’histoire de l’humanité.

La justice est due à un seul homme, Jésus-Christ, en qui tous sont devenus justes. Mais, si l’on remonte à l’origine de l’humanité, le péché, lui aussi, est venu d’un seul homme et a atteint tous les hommes. Pour comprendre l’œuvre du second Adam, c’est-à-dire du Christ, il faut donc la comparer à celle du premier, puisqu’elle en est la contre-partie. Solidaires avec Adam pour la faute en vertu de leur descendance, les hommes sont devenus solidaires avec le Christ pour la justice. Rom., v, 12-21. Ainsi, d’un côté, l’histoire nous montre une humanité pécheresse à cause de son premier ancêtre qui était en même temps son représentant ; d’un autre côté, elle nous offre le Christ comme une source de justice pour une humanité régénérée, solidaire avec son nouveau chef et unie à lui comme à un principe de vie.

L’Apôtre est frappé de l’universalité de la mort.

Or, la mort est le châtiment du péché, cf. Rom., vi. 23 ; I Cor., xv, 56 ; elle a été introduite dans le monde avec le péché, par « un seul homme », Adam, ꝟ. 12 : « tous sont morts parce que tous ont péché, èç' o> rcàvreç v^piapTov, Vulgate : m quo omnes peccaverunt ». Le fail de l’universalité de la mort prouve donc l’universalité du délit et de la culpabilité.

Comment faut-il entendre cette culpabilité universelle cause de la mort ? Résulte-t-elle des péchés personnels à chacun ? Non, car dans le temps qui a pré cédé la Loi, il y avait sans doute dans le monde des péchés contre la loi naturelle, mais il n’y avait pas de loi punissant de mort de tels péchés. Or, malgré cela. la mort a régné, même sur ceux qui n’avaient point imité la transgression, 7rapâ6aat.ç, d’Adam, c’esl ; i dire violé une loi « positive » portant une peine ; par conséquent, elle a régné même sur les enfants qui n’avaient point commis de péchés actuels. La mort sera donc le châtiment de la première faute, celle d’Adam. En effet, Dieu avait imposé à Adam un com mandement sous peine de mort. Gen., ii, 17 ; Sap., n. 23. C’est la violation de ce commandement par Adam qui est cause de la mort universelle à titre de châtiment. On doit donc en conclure que tous les hommes ont été coupables en Adam ; que « tous ont péché ». ꝟ. 12, de quelque manière en lui ; que tous sont solidaires avec lui dans l’acte de péché. Il s’agit bien, en effet, d’un acte ; outre le ꝟ. 12, les textes suivants sont formels : « Par la faute d’un seul, tous sont morts », ꝟ. 15 ; « la sentence portée contre un seul homme (ou : à raison d’une seule faute) a été une condamnation (pour l’humanité) », ꝟ. 16 ; « par la faute d’un seul la mort a régné du fait d’un seul », ꝟ. 17 ; « par la faute d’un seul la condamnation a atteint tous les hommes », ꝟ. 18 ; « par la désobéissance d’un seul tous oui été constitués pécheurs », ꝟ. 19.

Ainsi tous les hommes ont participé d’une certaine manière à l’acte d’Adam représentant l’humanité ; ils ont été constitués dans l’état de péché en vertu de sa désobéissance.

La formule « tous ont péché en Adam, in quo orrmes peccaverunt (Vulgate) » rend exactement la pensée de l’Apôtre, mais elle n’est point la traduction littérale de ècp’& Trâvreç ^fiapTOV du ꝟ. 12. Toutefois, le mot fyxap-rov ne désignant point des péchés personnels (puisque de tels péchés ne méritaient point la mort avant la Loi), ne peut signifier que la solidarité de tous les hommes avec l’acte d’Adam : tous ont péché en lui et avec lui.

L’Apôtre ne s’explique pas davantage ici sur le péché d’origine. Il en parle uniquement pour montrer comment l’acte d’un seul, Jésus-Christ, a pu justifier tous les hommes. L’antithèse entre le passé et le présent n’intervient que pour montrer toute la portée de l’œuvre du Christ. L’humanité est justifiée par l’œuvre du Christ, parce qu’elle est solidaire avec lui ; connue elle avait été pécheresse à cause de sa solidarité avec Adam. « Mais il n’en est pas du don gratuit comme de la faute », ꝟ. 15 ; car, par le don d’un « seul homme. Jésus-Christ, la bonté de Dieu l’emporte sur la faille. le Christ ayant procuré plus de bien que le premier homme n’avait causé de mal, ꝟ. 15. En effet, le « don de Dieu » est supérieur au délit : il n’a pas eu seulement pour résultat de faire disparaître la eulpabiltic d’origine ; il s’étend aux autres péchés, il entraîne l’absolution des fautes personnelles, ꝟ. 16, et, de plus, il donne la justice intérieure avec la vie de l’Esprit. ꝟ. 17.

En un mot, par l’acte coupable d’un seul, la condamnation pèse sur tous ; par l’acte de justice, 8t.xai.wlia-roç, d’un seul, tous obtiennent la justification de vie (qui donne la vie). Par la désobéissance d’un seul