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    1. PAUL (SAINT)##


PAUL (SAINT). LA CATÉCHÈSE PRIMITIVE

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moins une dignité exceptionnelle, faisant du Messie le lieutenant et même l’associé du Très-Haut, tandis que saint Paul, après les déclarations de Jésus sur sa qualité de Fils de Dieu, et surtout à la suite de ses propres révélations, reçues sur le chemin de Damas, donnait à ce titre sa pleine signification de Fils propre. Pour lui, Jésus n’était point devenu Fils de Dieu par sa résurrection. Le Messie possédait déjà cette qualité avant son incarnation.

L’Apôtre s’en expliquera plus à fond dans la suite lorsqu’il dira, Gal., iv, 4 : « Lorsque les temps furent accomplis, Dieu envoya son Fils, né d’une femme, né sous la Loi » ; cf. Rom., i, 4-5 : Phil. ii, G sq.

Non seulement la dignité de Fils de Dieu, mais la résurrection avait été prédite dans l’Ancien Testament. Au t. 34, l’Apôtre dit expressément que Jésus a été « ressuscité des morts » et il confirme ce fait par plusieurs passages de l’Écriture. La résurrection de Jésus est d’abord l’accomplissement des promesses faites à David : « Je vous donnerai les choses saintes promises à David, promesses certaines (ou : accomplies). » Le texte est tiré d’Isaïe, lv, 3, d’après les Septante, et avec une légère variante. Dieu avait promis à David une alliance éternelle et au Messie un règne sans fin ; cf. II Reg., vii, 12-17 : Ps., cxxxii, 11 ; lxxxix, 35-37. La chose se trouvait réalisée par la résurrection : Jésus une fois ressuscité ne devait plus mourir, mais vivre d’une vie immortelle et sans fin. Cf. Rom., vi, 9 : « Le Christ ressuscité des morts ne meurt plus ; la mort n’a plus d’empire sur lui. » Ce fait a la plus haute portée dans la théologie paulinienne de la justification et de la vie mystique.

L’Apôtre cite un autre texte plus précis concernant la résurrection du Messie, c’est le psaume xvi, 10 : « Tu ne permettras pas que ton saint voie la corruption. » Or, David est mort et a vu la corruption. Ce n’est donc point de lui, mais de l’un de ses descendants que cette parole a été dite. -Mais Jésus, que Dieu a ressuscité, n’a point vu la corruption. En lui s’est donc réalisée la promesse faite à David. Ainsi, la résurrection de Jésus est une preuve de sa messianité d’après l’Écriture. Les Juifs appliquaient ce texte au Messie ; saint Paul leur montre qu’il est une preuve de la mission divine de Jésus. Cf. Jer., xxx, 9 ; Ez., xxxiv, 23 ; xxxvii, 24. Le même argument avait été apporté par saint Pierre, mais avec plus de développements, dans Act., ii, 25-31.

Au ꝟ. 38, l’Apôtre tire la conclusion : le pardon des péchés est obtenu par le moyen de Jésus, SiàTourou.le Messie ressuscité : « Par lui, quiconque croit est justifié de toutes les souillures dont vous n’avez pu être justifiés par la loi de Moïse, èv v6(jlw Mcouctscoç. » La pensée de saint Paul n’est point que par la Loi on pouvait déjà être justifié, ou recevoir le pardon au moins d’une certaine catégorie de fautes. Son affirmation est générale : la Loi ne pouvait ni remettre les péchés, ni justifier. Les passages Gal., iii, 11 ; Rom., m, 20 ; x, 3-4, ne laissent aucun doute. Saint Paul formule donc pour la première fois la doctrine de l’univcrsaiisme du salut par la foi au Christ, sans les œuvres de la Loi.

En comparant le discours de saint Paul, Act., xin, à ceux de saint Pierre, Act., ii, iii, x, on trouve dans tous ces passages le même fond commun de doctrines et d’idées ; ce qui n’a d’ailleurs rien de surprenant puisque saint Paul ne fait que continuer et étendre l’œuvre commencée par les autres apôtres. Si l’on excepte la déclaration, propre à saint Paul, sur l’impuissance de la Loi, xiii, 38-39, sa doctrine est identique dans toutes les lignes essentielles à celle de Pierre. Mais, chez celui-ci, l’expression est parfois différente et la pensée comporte des nuances qui lui donnent une physionomie plus judaïque ou plus

primitive, surtout dans Act., ii, m. Il est doue instructif de rappeler ici les poinls essentiels de sa catéchèse, pour bien marquer la position de saint Paul à l’égard de l’enseignement des premiers apôtres.

Au c. n des Actes, saint Pierre applique au temps messianique la citation de Joël qui se termine par cette déclaration : « Quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé », v. 21. Invoquer le nom du Seigneur, dans l’Ancien Testament, c’est être fidèle au culte de Jahweh ; de plus, être sauvé, c’est avoir part au salut d’Israël. Saint Pierre applique le passage à Jésus, à qui il attribue la même dignité qu’à Jahweh, et il entend le salut du salut messianique.

Cette notion de Seigneur appliquée à.Jésus est significative pour le développement de la christologie. De même, dans II Thess., i, 7, le Christ est pour saint Paul 6 K’jpioç, le Seigneur ; le « jour de Jahweh » est le < jour du Seigneur Jésus ». Il Thess., ii, 1-2. La notion de Seigneur s’applique donc indistinctement a Dieu le Père et à Jésus ressuscité.

Saint Pierre, en parlant de Jésus, dit : « Cet homme autorisé de Dieu, avSpa àTcoSeSsiYfxsvov àrcô -roû 0soG, auprès de vous, par des miracles, des prodiges et des signes. » Cette expression pourrait à la rigueur signifier que Jésus, ayant une origine divine — àico, non’i-Ji — a été manifesté dans son humanité, par ses miracles. Mais il est plus probable qu’il s’agit là simplement du témoignage que Dieu lui a rendu par les miracles, preuves de sa mission. Comme dans le second évangile, Jésus a manifesté sa dignité de Fils de Dieu par sa puissance ; mais saint Pierre ne fait que l’insinuer. Il ne met pas en avant la notion de Fils de Dieu, sans doute pour ne pas heurter les convictions monothéistes de ses auditeurs, en leur proposant une doctrine qu’ils n’étaient point encore préparés à entendre. Dans la suite de son discours, il n’apportera point, comme saint Paul, le texte hodie yenui le du ps. n. mais il citera le psaume ex que Jésus lui-même avait invoqué pour marquer la double filiation du Messie : fils de David selon la chair, fils de Dieu par sa nature divine ; cf. Matth., xxii, 41-46. Saint Paul, qui devait développer dans Rom., i, 3-4, cette idée déjà en germe dans la catéchèse première, n’en dira pas moins : « (Dieu) a fixé un jour où il jugera le monde selon la justice, par l’homme qu’il a désigné [ou constitué, établi], et qu’il a accrédité auprès de tous en le ressuscitant des morts. » Act., xvii, 31. Comme saint Pierre, saint Paul met ici en relief l’humanité glorifiée de Jésus sans mentionner explicitement sa nature divine.

Comme saint Paul, saint Pierre note que la résurrection de Jésus est conforme à l’Écriture, ꝟ. 24. Il invoque lui aussi le psaume xvi, et se compte parmi les témoins du Christ ressuscité. Bien plus, la descente du Saint-Esprit est un signe que les temps messianiques sont arrivés. Jésus « a reçu du Père l’Esprit-Saint promis », ꝟ. 33. Puis, une fois élevé dans la gloire, il l’a répandu lui-même sur les fidèles ; cf. Act., i, 4. A quel moment Jésus a-t-il reçu le Saint-Esprit ? Dans le passage, x, 38, saint Pierre dit expressément : « Dieu l’a oint (sacré) d’Esprit-Saint et de puissance. » Il y a là une allusion à l’incarnation d’après plusieurs Pères (Ambroise, Cyrille de Jérusalem) : la plénitude des grâces de l’Esprit-Saint lui fut donnée lors de l’incarnation. Mais saint Athanase l’entend du baptême, où Jésus reçut extérieurement aux yeux des Juifs la consécration messianique avant de commencer son ministère. Cf. Is., lxi, 1. Les deux opinions ne s’opposent point, car la manifestation extérieure de l’Esprit-Saint au baptême n’a été que la déclaration officielle de la filiation et de la messianité de Jésus.

Au lieu d’apporter comme saint Paul le ps. n. pour marquer la glorification de Jésus, saint Pierre cite le ps. ex. Dans ce psaume, le Messie est appelé