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PAUL (SAINT). LA CATÉCHÈSE PRIMITIVE


apparu à moi aussi, comme à « l’avorton ». I Cor., xv, 3-8.

La mort, la résurrection et les apparitions de Jésus étaient les faits exposés en premier lieu par saint Paul et les prédicateurs chrétiens : « C’est ainsi que nous prêchons », ꝟ. 11. Ces faits avaient été attestés par de nombreux témoins, dont beaucoup vivaient encore. Saint Paul dit qu’il les a « reçus », mais il n’ajoute pas : « du Seigneur » ; la formule est beaucoup moins précise que dans I Cor., xi, 23. Devra-t-on dire qu’il en a eu communication directe de la part du Seigneur, en dehors de toute intervention humaine et de toute influence des milieux chrétiens ? C’est ainsi que l’ont entendu saint Jean Chrysostome, saint Thomas, et que l’entend Cornely, In I Cor., p. 452, cf. p. 335-337. Le P. Prat, op. cit., p. 36, est d’avis qu’il « peut très bien devoir la connaissance de ces faits à des témoins oculaires ».

Ici, l’Apôtre veut surtout montrer que les points essentiels de son enseignement sont les mêmes pour tous les prédicateurs chrétiens et qu’ils sont attestés par des témoins encore vivants, qu’ils offrent donc toutes garanties au point de vue historique. L’Apôtre ne veut point insister sur la manière dont il a eu connaissance de ces vérités ; mais, en se mettant parmi les « témoins » des apparitions, il invoque son propre témoignage, sa propre expérience. Il est lui-même le témoin du Cbrist ressuscité. Jésus, en lui apparaissant, lui a appris directement la réalité de sa résurrection, de sa glorification, et l’a chargé d’être le témoin de ces faits. Cf. Act., xxvi, 16 sq. ; xxii, 9 sq. ; ix, 4-6, et 10 sq. Ananie fut chargé également par le Seigneur d’exposer à Paul toute la portée de sa vision. Saint Paul peut donc faire appel à une communication directe, lorsqu’il prêche la résurrection et la glorification de Jésus. Cela est confoime à Gal., i, 12 sq. D’ailleurs, ce mode de connaissance ne s’oppose nullement à l’idée de tradition ; saint Paul invoque à la fois sa propre expérience, son propre témoignage et celui de la tradition concrétisée dans les apôtres, dans les nombreux témoins indiqués, I Cor., xv, (i, 7, et aussi dans le fait que les autres prédicateurs annoncent la même doctrine ; cf. t. Il : soit moi, soit eux. Ainsi l’Apôtre, bien qu’ayant reçu « son évangile par révélation », n’en est pas moins un témoin authentique de la tradition ou catéchèse apostolique. Opposer, dans ce passage, tradition à révélation serait méconnaître la psychologie paulinienne et séparer deux modes de connaissance que l’Apôtre n’a point l’intention de distinguer, puisqu’il se place lui-même avec les témoins qui garantissent la vérité de l’Évangile.

3° Première mission : la « catéchèse » de saint Paul. - Le discours de saint Paul à Antioche de Pisidie, rapporté dans les Actes, xiii, 16-41, nous donne la physionomie de la prédication paulinienne ; il nous fait connaître à la fois sa méthode et l’essentiel de sa doctrine.

L’Apôtre s’adresse d’abord aux Juifs, Act., xiii, 5 ; cf. xiv, 1 ; xvi, 13 ; xvii, 2, 10, 17 ; xviii, 4 ; xix, 8, car Israël avait reçu les promesses et c’est à lui que l’on devait en premier lieu annoncer le salut messianique ; cf. Rom., i, 16 ; ii, 9 ; I Cor., ix, 20. Mais il était surtout l’apôtre des « gentils », Rom., i, 5 ; xi, 13 ; Gal., i, 16 ; ii, 7-9, et c’est à eux qu’il s’adressait après avoir offert le salut aux Juifs. D’ailleurs, dans le présent discours, Act., xiii, il s’adresse aux Juifs et aux prosélytes, ce dernier élément étant le plus accessible à la foi nouvelle.

Ce discours a une importance capitale, car il peut être regardé comme un discours « type », ainsi que ceux de saint Pierre dans Act., ii, 14-36, 40 ; iii, 12-26 1 ; x, 34-48, cf. xi, 15-17. Il contient la catéchèse de saint Paul, comme ceux de Pierre contiennent la

catéchèse des premiers apôtres. Il y a donc le plus grand intérêt, pour le théologien, à dégager le contenu doctrinal de ce passage en le comparant à l’enseignement du chef des apôtres, c’est-à-dire à l’enseignement de l’Église primitive, peu de temps après l’ascension du Sauveur.

L’Apôtre retrace d’abord à grands traits l’histoire du peuple d’Israël jusqu’à David, afin de rappeler la promesse de Dieu, à savoir : de susciter à Israël un sauveur de la race de David. C’était là un point essentiel de la tradition messianique ; cf. Rom., i, 4.

Ce sauveur, c’est Jésus. Il a été annoncé par Jean à tout le peuple d’Israël, ꝟ. 24-25 ; cf. Luc, iii, 15 ; Joa., i, 29. Or « cette parole de salut » s’adresse à tous, est prêchée à tous, et non pas seulement au peuple juif, parmi lequel Jésus a vécu. En condamnant Jésus, les habitants de Jérusalem et leurs chefs « ont accompli les paroles des prophètes ». Sa mort n’est donc point un opprobre, puisqu’elle a été prédite par les Écritures. Ici l’Apôtre ne donne aucune références pas plus que clans le passage I Cor., xv, 3 ; il pense sans doute à Is., lui, 7 ; Ps. xxii, 15 ; Zach., xiii, 7 ; cf. Matth., xxvi, 31. La première épître de saint Pierre, ii, 21-25, enseigne également que Jésus est mort pour nos péchés, et cela en des termes qui rappellent Isaïe.

Rien plus, Dieu a ressuscité Jésus. Celui-ci est apparu à ceux qui étaient venus avec lui de Galilée et qui sont maintenant ses témoins auprès du peuple. Ainsi, la mort de Jésus ne doit pas être un scandale, car non seulement elle a été prédite par l’Écriture, mais elle a été suivie de sa résurrection et de sa glorification ; c’est là un fait attesté par de nombreux témoins. Comparer avec I Cor., xv, 3 sq.

Cette résurrection est l’accomplissement de la promesse faite par Dieu aux Israélites, elle est conforme à l’Écriture : « Selon qu’il est écrit : Tu es mon Fils, je t’ai engendré aujourd’hui ! » Ps., ii, 7, cf. Act., ni, 22 (Deut., xviii, 15). Jésus, en effet, a été envoyé par Dieu et déclaré Fils de Dieu au moment de son baptême et de sa transfiguration. Matth., iii, 17 ; xvii, 5 ; et parallèles. Il a reçu, à maintes reprises, le témoignage divin sur sa « filiation ». Matth., xi, 27 = Luc, x, 21-22 ; Joa., v, 19 sq. ; x, 36. Il s’est montré Fils de Dieu par ses œuvres. Joa., v, 36 ; viii, 54 ; x, 37, 38. Tel serait, d’après Knabenbauer, avec Cajétan, Heelen, liède le Vénérable, le sens attribué au psaume n par l’Apôtre : Dieu a établi Jésus Messie, et lui a rendu témoignage à titre de Fils. — Cependant, Salmeron. Corneille de Lapierre, dom Calmet, Patrizzi, Felten et même Rède, dans Retractationes in actus apostolorum, en se référant à saint Hilaire, croient que saint Paul a appliqué le texte à la résurrection. Pour décider entre ces deux interprétations, il faudrait pouvoir fixer avec certitude le sens du mot à.ia.azr i oa.ç, t. 33 ; cf. Act., iii, 22-26.

Devra-t-on le traduire : « ayant suscité » ou « ayant ressuscité Jésus » ? L’expression èx vsxpûv, jointe à àvsoTYjas au ꝟ. 34, montre qu’au ꝟ. 33 le participe n’a point le sens de ressusciter, mais de « susciter ». Cf. Knabenbauer, In Actus. p. 234. Cependant, dans la pensée de saint Paul, c’est bien la résurrection d’entre les morts, et non la simple manifestation à titre de Messie, qui est invoquée comme preuve ; cf. Rom., i, 4 ; Heb., i, 15 ; et surtout Act., xiii, 29-31. C’est en vertu de sa filiation divine que Jésus a été ressuscité et constitué Messie glorieux et Seigneur. Cette filiation, avec les prérogatives qu’elle comportait pour l’avenir, avait déjà été proclamée dans le psaume n. Les Juifs regardaient ce texte comme messianique. Mais, sous l’ancienne Loi, n’ayant point encore reçu la révélation complète de la sainte Trinité, ils ne voyaient point toute la portée de ce titre de Fils donné par Jahweh à son « Christ ». Ils y reconnaissaient du