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PATUZZI

PAUL (SAINT)

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PATUZZI Jean Vincent (1700-1769), naquit à Conegliano, près de Vérone, le 19 juillet 1700 ; il prit l’habit de Saint-Dominique, en 1717, dans la congrégation du bienheureux Salomoni, branche des dominicains. Il enseigna la théologie à Venise, et, avec le P. Conciha, il attaqua la morale relâchée. Il mourut à Vicence. le 26 mai 1769.

L’œuvre du P. Patuzzi est assez complexe et très variée : elle renferme des ouvrages historiques, mais surtout des ouvrages de théologie morale, dans lesquels il attaque, avec quelque exagération, ceux qu’il appelle les partisans de la morale relâchée, parmi lesquels il range saint Alphonse de Liguori. L’Europe littéraire de juin 1766 donne la liste de ses ouvrages. — On peut citer : La vie de la vénérable Rose Fialelte, du tiers-ordre de Saint-Dominique, avec quelques-unes de ses lettres, chants et autres œuvres spirituelles, in-4°, Venise, 1740. — Défense de la doctrine de saint Thomas sur l’article 5 de la question CLIV, IP II*, in-4°, Lucques, 1746, contre le jésuite Benzi. — Trois livres sur l’état futur des impies, in-4°, Vérone, 1748, avec une dissertation sur la place des enfers, publiée en 1763, en latin. — Lettres apologétiques ou Défense de saint Thomas contre les calomnies de ses accusateurs, au sujet du tgrannicide, in-8°, Venise, 1763. — Lettres théologico-morales pour la défense de l’histoire du probabilisme du P. Daniel de Concina, 2 in-8°, Venise, 1751, avec Deux suites, qui contiennent, chacune, deux volumes, 1753-1754. Dans ces Deux suites, on trouve des précisions et des réponses à quelques objections. Les Nouvelles ecclésiastiques du 17 juillet 1755, p. 116, comparent l’ouvrage de Patuzzi aux Lettres provinciales. — En 1756, le Père publia une édition de l’écrit de Drouin, intitulé De re sacramentaria, 2 in-fol., Venise, 1756. — L’encyclique de Benoit XIV, adressée ù l’assemblée du clergé de France, éclaircie et défendue contre l’auteur des Doutes proposés aux cardinaux et aux théologiens de la Congrégation de la Propagande, in-8°, Lugano, 1758. Cet écrit plut à quelques jansénistes, qui le firent imprimer à Utrecht, en 1760. — Traité de la règle prochaine des actions humaines, dans le choix des opinions, 2 in-4°, Venise, 1758 ; une courte Instruction sur le même sujet fut publiée en 1759, et réimprimée à Naples et à Milan.

— Des indulgences et des dispositions pour les recevoir, in- 16, Rome, 1760. — Exposition de la doctrine chrétienne, œuvre utile pour toutes sortes de personnes, in-12, Venise, 1761 ; c’est l’ouvrage de Messenguy, dans lequel le P. Patuzzi déclare avoir supprimé tout ce qui avait motivé la condamnation de cet écrit par Rome.

A la suite d’une thèse, soutenue en 1760 par un curé du diocèse de Trente, Patuzzi attaqua avec vivacité les théories probabilistes, dont l’effet fatal, d’après lui, était la morale relâchée. Telle est l’idée fondamentale qu’on trouve dans tous les écrits suivants : Lettres ù un ministre d’Étal sur la doctrine des casuistes modernes en morale et sur les grands maux qui en résultent pour la société civile, les droits, autorité et sécurité des souverains, 2 in-8°, Venise, 1761 et 1763. — La cause du probabilisme rappelée à l’examen, par M. Liguori, et de nouveau convaincue de faux par Adolphe Dosithée, in-8°, Venise, 1764. C’est une réponse à l’ouvrage de saint Liguori, intitulé : L’usage modéré de l’opinion probable, in-8°, 1763. — Observations théologiques sur l’apologie de M. Liguori contre la cause du probabilisme, in-8°, Venise, 1765. — Théologie morale, 7 in-4°, Bassano, 1790 (en latin) ; cet écrit, laissé inachevé par le P. Patuzzi, fut repris et complété par le P. Fontani, son confrère, qui y a ajouté une Notice sur la vie et les écrits de Patuzzi.

Tous les écrits du P. Patuzzi sont écrits en italien, sauf l’Étal futur des impies, le Traité des sacrements et la Théologie morale, qui furent publiés en latin ;

plusieurs de ces écrits sont publiés sous le pseudonyme d’Eusèbe Éraniste.

Michaud, Biographie universelle, t. xxxii, p. 270-271 ; Hoefer, Nouvelle biographie universelle, t. xxxix, col. 346347 ; Feller-Weiss, Biographie universelle, t. vi, p. 418-119 ; Hichard et Giraud, Bibliothèque sacrée, t. xix, p. 76-77 ; Picot, Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique du XV I1Ie siècle, t. iv, p. 460-463 ; Sidenio, Elogium J. Patimt in-4°, Vienne, 1769 ; Nouvelles ecclésiastiques du 9 janvier 1766, p. 10-11, et du 12 juin 1766, p. 110 ; L’Europe littéraire de juin 1769 ; Hurler, Nomenclator, 3e édit., t. v, col. 220-228.

J. Carreyiu :.

    1. PAUL (Saint)##


PAUL (Saint). — Introduction. — 1° Objet de l’article. — Le christianisme était né au milieu du judaïsme. Jésus avait annoncé l’Évangile seulement aux Juifs : il n’était envoyé qu’aux « brebis perdues » d’Israël, Mat th., xv, 24, et il avait dit à ses disciples : « N’allez pas chez les païens. » Matth., x, 5-6. Cependant, la foi nouvelle était une institution autonome et une religion universelle. Dans l’esprit de son fondateur, elle ne devait pas être limitée par les frontières de la Palestine. Jésus avait même laissé entendre clairement que les païens devaient en faire partie et que le judaïsme ofliciel devait en être exclu par sa faute. Cf. Matth., xxi, 41-44 ; Marc, xii, 9-12 ; Luc, xx, 16-19 ; Matth., viii, 5-13 ; Luc, vii, 1-10 ; xiii, 28-30. C’est pourquoi il avait donné à ses apôtres l’ordre de « faire disciples tous les peuples ». Matth., xxvin, 18-20.

Cependant, parmi les Juifs convertis, un assez grand nombre, en vertu de leur éducation première, regardaient l’institution nouvelle seulement comme un judaïsme plus parfait. A leurs yeux, on ne pouvait devenir chrétien qu’en se faisant d’abord juif. Cette conception était étrangère à la pensée de Jésus. Le Maître ne s’était pas contenté de rejeter le formalisme des pharisiens ; il avait préparé la rupture avec le judaïsme officiel en donnant à la Loi un sens et un esprit nouveau ; cf. Matth., v, 17 sq. ; xi, 28-30 ; xii, 1 sq. ; cf. Marc, ii, 27-28 ; iii, 1 sq. ; Matth., xxiii, 4 ; Luc, xi, 46 ; cf. Act., xv, 10-11 ; vii, 53 ; Rom., vii, 7 sq. Ainsi la conception judaïque était funeste au développement du christianisme. Elle fermait la porte aux convertis venant du paganisme ; elle supprimait l’indépendance et la liberté chrétiennes et compromettait l’œuvre du Maître. Pour faire accepter la foi au monde grec, il fallait donc l’arracher à la Synagogue et rompre effectivement avec le judaïsme. Telle fut l’œuvre de saint Paul, « l’apôtre des gentils », c’est-à-dire des peuples païens. Cf. Act., ix, 15 sq. Son rôle fut de renverser l’obstac le de la Loi en prêchant la loi au Christ-Jésus comme" unique moyen de salut, de sauvegarder les droits de la liberté chrétienne, de donner, en un mot, au christianisme l’orientation voulue par le Christ dont l’apôtre ne fut que l’instrument. « Cet homme est un instrument que j’ai choisi pour porter mon nom devanfles nations. » Act., ix, I 5.

Avec saint Paul, nous voyons donc le christianisme prendre pleine conscience de lui-même en se dégageant de la Loi, et s’établir solio^mént - dans lé~ monde en dehors de la Palestine. Nous voyons la théologie se former, les Églises s’organiser, la discipline s’affirmer, la vie chrétienne s’épanouir ; tout cela entre l’an 40 et l’an 60. L’œuvre de saint Paul et ses épîtres constituent un témoignage de premier ordre en faveur du christianisme naissant ; la transformation opérée par lui dans le monde païen porte la marque d’une œuvre divine et sa doctrine est une des sources principales de la révélation et de la théologie chrétiennes. Dans le présent article nous bornerons notre exposé à la théologie de saint Paul. L’histoire et la critique y entreront seulement dans la mesure où elles seront nécessaires pour éclairer la pensée de l’Apôtre.