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PATRIE (PIETE ENVERS LA). AMOUR


normes à concerter et des sanctions à déterminer contre l’État qui refuserait, soit de soumettre les questions internationales à l’arbitrage, soit d’en accepter les décisions. » Exhortation Dès le début, du 1 er août 1917, ibid., t. ix, p. 417. De la sorte « l’équilibre du monde, la tranquillité prospère et assurée des nations « reposeraient » sur la bienveillance mutuelle et sur le respect des droits et de la dignité d’autrui. Exhortation apostolique aux peuples belligérants et à leurs chefs, t. vii, p. 371.

Il est un autre service qu’au cours de la guerre elle-même doit rendre la charité internationale. Il faut que, pendant le conflit armé, « ne s’exaspèrent pas les haines, mais qu’elles s’adoucissent, grâce aux bons offices mutuels de la miséricorde chrétienne ». Lettre Legentes vestras, 8 septembre 1916, ibid., t. viii, p. 357. « Dans le fracas des batailles doit régner la charité, » Inter arma caritas. Pie XI, lettre Con vivo du 7 avril 1922, ibid., t. xiv. p. 219. A plus forte raison, les neutres doivent-ils pratiquer cette vertu ; Benoit XV a rappelé cette obligation à tous, par sa conduite et ses œuvres plus encore que par ses paroles. « Soulager, diminuer les conséquences » douloureuses de la guerre ; — compatir, consoler, secourir, essayer de « faire à tous le plus de bien possible », tel fut son travail ininterrompu. Lettre Era nostro ]>roposito, ibid., t. vii, p. 254 ; Exhortation apostolique aux belligérants et à leurs chefs, ibid., t. vii, p. 369. Telle a été aussi l’œuvre de bienfaisance, à laquelle furent conviés tous les chrétiens, dans la mesure où ils pouvaient l’accomplir. Benoît XV a loué ceux qui se sont livrés à ce travail : lettre Officiosissimis litteris, 17 août 1915, ibid., t. vii, p. 434.

7. Après la guerre, de nouveau la charité a un rôle international à jouer. Benoît XV lui assigne deux tâches. Il faut d’abord qu’elle mette fin aux haines répandues partout ; qu’elle apaise au plus tôt et véritablement les inimitiés ; que, selon le précepte et l’exemple du Christ, les leçons des apôtres et de toute la tradition chrétienne, elle fasse oublier, pardonner toutes les injures ; que, détruisant les causes de dissentiment, elle rétablisse entre concitoyens et entre peuples l’entente, la concorde, l’amitié fraternelle, une paix mieux garantie qu’elle ne peut l’être par des traités. Encycl. In hac lanta du 14 mai 1919, Acta ap. Sed., t. xi, p. 220 ; lettre apost. Diuturni du 15 juillet 1919, t. xi, p. 306 ; lettre Amor ille singularis du 7 octobre 1919, t. xi, p. 413 ; encyclique Pæem Dei munus du 3 mai 1920, t.xii, p. 209-218.

En second lieu, Benoît XV demande aux hommes des peuples civilisés, surtout aux catholiques, de s’entr’aider, de venir en aide aux malheureux d’autres nations, de ne pas seulement ne plus se combattre, mais de se faire positivement du bien, comme le veut la charité chrétienne. Évèques et prêtres sont invités à exciter cette bienfaisance internationale ; le besoin commun des peuples sullirait d’ailleurs à recommander cette collaboration mutuelle ; que les nations s’unissent pour défendre chacune sa liberté, conserver l’ordre social, relever les ruines et réparer les maux de la guerre, concerter entre elles une prudente et opportune réduction commune des armements, capable de diminuer le péril de nouveaux conllits. Lettre apost., Diuturni du 15 juillet 1919.

Ce double travail ne s’opérant pas assez vite au gré de ses désirs, Benoît XV exprime sa douleur et renouvelle ses conseils. Il souffre de ce que la guerre dure encore en certains pays. Alloc. consist. du 7 mars 1921, Acta ap. Sed., t. xiii, p. 122 ; et de ce que la paix des cœurs n’ait pas suivi la paix des pactes internationaux. Alloc. consist. du 21 novembre 1921, t. xiii, p. 522. Il souhaite que la charité fraternelle, non moins utile que la justice pour rapprocher les peuples.

fasse fleurir entre eux la conliance mutuelle. Alloc. consist. du 7 mai 1921, t. xiii, p. 123. Il fait appel, encore et de nouveau, à tous les hommes de bonne volonté qui dirigent les affaires publiques et il leur demande que, grâce à leurs conseils et sous leur direction, les peuples se pardonnent au plus tôt leurs inimitiés mutuelles en raison de leur salut commun ; qu’ils résolvent les difficultés pendantes, s’il en reste, par des accords conformes à la justice et inspirés par la charité, afin que la malheureuse Europe jouisse enfin de la paix si longtemps désirée. Alloc. consist. du 13 juin 1921, ibid., t. xiii, p. 283.

C’est l’œuvre qu’a continuée Pie XL La pensée maîtresse qu’il a exprimée, dès le début de son pontificat, et qui a inspiré toujours ses paroles et ses actes, c’est que, pour la paix du monde, pour le bien de tous les belligérants d’hier, les relations internationales doivent être régies non seulement par la stricte justice, mais encore par la charité. Nuisibles à ceuxlà même qui ont gagné la guerre, écrit-il dès son avènement, les haines entre peuples doivent faire place à la concorde fraternelle ; la confiance mutuelle et l’amitié constituant une garantie de tranquillité, meilleure qu’une forêt de baïonnettes. Lettre Con vivo du 7 avril 1922, Acta ap. Sed., t. xiv, p. 219-220. Que soit donc écarté « le péril de guerres nouvelles » et qu’on pourvoie au relèvement économique de l’Europe ; cette œuvre de paix, et d’une justice « de laquelle la charité ne sera pas écartée » sera profitable à tous, « vainqueurs et vaincus ». S’efforcer « de procurer le bien commun…, tournera à un bien plus grand et plus durable pour chaque nation ». Lettre autographe à S. E. le cardinal Gasparri du 29 avril 1922, t. xiv, p. 268-269.

Puis, la première encyclique du souverain pontife propose la paix du Christ, c’est-à-dire des âmes par le règne du Christ, donc par celui de la charité. Pie XI constate la persistance des rivalités, des inimitiés, des menaces contre le droit d’autrui, injustices d’ailleurs qui peuvent devenir dangereuses pour celui qui se les permet. Il propose comme remède, non pas seulement une apparence extérieure de paix, mais « une paix qui pénètre et apaise les cœurs, les incline et les dispose à une fraternelle bienveillance à l’égard d’autrui ». C’est bien la paix de ce Jésus qui, le premier, a révélé aux hommes leur qualité de membres d’une même famille et a promulgué la loi de la charité, du support universel. Cette paix du Christ, à coup sûr, « ne doit pas s’écarter de la règle de justice ; d’abord parce que, comme l’affirment les Livres saints, « Dieu lui-même est celui qui juge la justice », et aussi parce que, d’après eux, la paix est œuvre de justice ; mais cette concorde ne peut pas seulement reposer sur une justice dure et pour ainsi dire de fer. Il faut que cette vertu soit tempérée par une charité non moins grande. Pie XI fait observer que, très à propos, comme d’ordinaire, le Docteur angélique a écrit ces mots : la paix véritable et authentique est plutôt affaire de charité que de justice, car cette dernière vertu ne peut seulement qu’éloigner les obstacles à la paix, comme les injures et les dommages, tandis que la paix elle-même est, à proprement parler, tout spécialement, une production de la charité. » Encycl. Ubi arcano du 23 décembre 1922, t. xiv, p. 682, 685-686.

Maintes fois, Pie XI exprime la même pensée : « Que les dirigeants des affaires publiques se proposent d’accorder les postulats de la justice avec les considérants de la charité, ce qui ne peut être qu’utile aux vainqueurs et aux vaincus. » Alloc. consist. du Il décembre 1922, Acta ap. Sed.. t. xiv, p. 613. Le pape regrette que « partout soient répandus des germes de discorde et qu’entre les peuples il y ait des flammes d’envie, des rivalités ». Encycl. Quas primas du