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ORDRE. HIÉRARCHIE A TROIS DEGRES


sans cette autorisation, imposer les mains pour l’ordination et faire d’autres prêtres, diacres ou évêques. Pourquoi ? Sans doute parce que, ne reconnaissant pas à ces prêtres ie pouvoir de conférer l’ordination, toute recommandation à ce sujet lui semblait inutile ; car, d’ailleurs, il était bien plus important, pour éviter les schismes, qu’ils s’abstinssent d’ordonner, — s’ils pouvaient le faire — qu’il n'était important qu’ils s’abstinssent de baptiser ou de célébrer sans y être autorisés. Autant dire que les prêtres que saint Ignace avait en vue n'étaient que des prêtres de second ordre, incapables de communiquer le sacerdoce.' Le presbytérat simple remonte sûrement au début du iie siècle. » L’ordre et les ordinations, p. 74-75.

La lettre à Polycarpe, véritable petit traité de pastorale, confirme ce qui précède sur les droits des évêques, mais y ajoute les devoirs corrélatifs, tant au temporel qu’au spirituel ; voir I, 2 ; ni, 1 ; ii, 1 ; iv ; v. Sur les textes d’Ignace démontrant l’existence de la hiérarchie à trois degrés, on se reportera à la collection Textes et documents, Les Pères apostoliques, iii, Ignace d’Antioche, Paris, 1910, par Auguste Lelong. préface, p. xxxviii-xl.

2. Les Pères apologistes.

On trouvera naturellement dans leurs écrits fort peu de choses sur le sacrement de l’ordre, qui appartient à la constitution intime de l'Église. Toutefois, à propos de l’eucharistie, saint Justin nous livre une indication précieuse. Décrivant la liturgie eucharistique, il rappelle qu’on apporte au « président des frères « , du pain et un calice d’eau et de vin. Après les prières eucharistiques et l’action de grâce du « président et les répons du peuple, ceux qu’on appelle « diacres » donnent à chaque assistant une part du pain eucharistique et du vin mélangé d’eau. Apol., i, 65 ; cꝟ. 67. P. G., t. vi, col. 428, 429. Le rôle de celui qui préside est ici une donnée singulièrement importante : « Dans l’assemblée décrite par Justin, il y a le Xoc6ç, et il y a le npoea-uoiç tgSv àSeXcpwv, puis, entre le peuple et son chef, les Siâxovoi. Le ^poecxcôç est celui qui préside habituellement : cet office suppose que celui qui l’exerce est digne de l’exercer ; cf. Dial. cum Tryph., cxvii, 2, P. G., t. vi, col. 745. Le TrpoeaTwç prononce la prière seul, et le peuple répond Amen. Il fait l’homélie, commente la leçon, morigène les frères. On lui remet les offrandes à distribuer aux pauvres. Appelons-le par son nom. C’est l'évêque. » P. Bâti (Toi, L’eucharistie, la présence réelle et la transsubstantiation, 5e édit., p. 19.

3. Les Pères controversisles.

Nous devons nous arrêter tout particulièrement à saint Irénée.

Tout en invoquant, à la suite de Papias, le témoignage de certains « presbytres » qui pouvaient n'être pas de véritables chefs ecclésiastiques, Irénée connaît très certainement la succession hiérarchique de l'Église catholique. Les ministres sacrés sont désignés par lui indifféremment par les termes Ètcîcxotioi et 7Tp£a6ÛTepoi, la distinction du sens entre ces deux termes n'étant pas encore nettement établie. Voir Irénée (Saint), t. vii, col. 2428. Mais la doctrine même de saint Irénée connaît la distinction du véritable épiscopat et du simple presbytérat : « Ce ne sont pas tous les prêtres qui sont dépositaires, au même titre, de la tradition apostolique, mais ceux qui, dans les Églises, sont les successeurs des apôtres, ce sont les chefs ; ce sont, à Rome, les papes, dont Irénée dresse la liste, Cont. hær., III, iii, 3, P. G., t. vii, col. 849-851, et, dans les plus anciennes Églises, ceux dont il pourrait donner la liste, ce qu’il ne fait pas pour ne pas être trop long, n. 2, col. 848, se bornant, après avoir établi celle de Rome, à mentionner celles de Smyrne et d'Éphèse, n. 4, col. 852-853.

Irénée détache ceux qui commandent dans les Égl ses. I, x, 2 ; IV, xxvi, col. 553 et 1055-1056. Par opposition aux successeurs authentiques des apôtres, il signale et stigmatise ceux qui absistunt a principali successione, IV, xxvi, n. 2 ; cf. n. 3, col. 1054. La traduction latine rend toùç 71psa6uxépouç -rr^ç 'Exxvvjataç Act., xx, 17, par eonvocalis episcopis et prcsbijteris qui erant ab Epheso et a reliquis proximis civitatibus ; ici la distinction même des noms se dessine, III, xiv, 2, col. 1)1 1… Dans le texte, IV, xxxiii, 8, col. 1077, apparaissent le caractère d’ensemble organisé ce l'Église et le rôle, (.ans cette organisation, de l'épicopat : agnilio vera est apostolurum doctrina, et anliquus Ecclesise status, in universo mundo, et characler corporis Christi secundum successiones episcoporum, quibus illi eam, quæ in unoquoque loco est, Ecclesiam tradiderunt ; cf. III, iv, 2 ; V, xx, 1, col. 855 et 1177. » F. Vernet, art. Irénée (Soint), col. 2428-2429.

On sait que Funk a recueilli les textes où Irénée rapporte l’enseignement des prêtres, disciples des apôtres. Presbgterorum reliquia' ab Irenœo seroatæ, Patres apostolici, t. i, p. 378. L'évêque Polycarpe est appelé ài : oCTToXi.xôç Trpsa6ÙTSpoç. Episl. ad Elorinum, dans Eusèbe, II. E., V, xx, P. G., t. xx, col. 485. Certains « prêtres » d' Irénée sont à coup sûr des évêques ; cf. Demonslratio, édit. Weber, iii, 61.

4. Clément d’Alexandrie et Origène.

Ni l’un, ni l’autre ne se sont préoccupés directement de l’ordre. Néanmoins, ils connaissent la hiérarchie ecclésiastique à trois degrés.

Clément partage nettement l'Église en clercs et en laïques et, parmi les premiers, personnes élues, npQGOTca. èxXexTric, il distingue les évêques, les prêtres, les diacres. Psedag., III, 11, P. G., t. viii, col. 677 ; Strom., III, 12, col. 1180, 1189 ; VI, 13, t. ix, col. 328 ; VII, 1, col. 405 ; ici il n’est question que des prêtres et des diacres. Voir Clément d’Alexandrie, t. iii, col. 167.

Origène parle de la hiérarchie, surtout des évêques et des prêtres, à propos de la rémission des péchés, qui est dévolue à ceux qui président dans l'Église, et qui constitue le pouvoir des clefs revendiqué par les évêques. In Judices, homil. ii, 5 ; In Matth., t. xiv, n. 14, P. G., t.xii, col. 961 ; t. xiii, col. 10121013. Et précisément, à propos des condamnations portées par l'Église contre les clercs pécheurs, Origène fait nettement allusion aux trois degrés de la hiérarchie : « Il est humiliant, écrit-il, de se lever dans l'église du banc des prêtres, de se voir expulsé du rang des diacres. » In Ezech., homil., x, 1, P. G., t. xiii, col. 740. D’autre part, dans son homélie sur le ps. xxxvii, 1, P. G., t.xii, col. 1372, il parle en ces termes de l’autorité de la hiérarchie sur les simples fidèles : « Tous les évêques, les prêtres, les diacres, nous instruisent ; pour nous instruire, ils emploient des réprimandes et des paroles dures… » Ailleurs, il parle du rôle du prêtre comme confesseur, lequel doit être un médecin habile et expérimenté. In ps. XXX vii, homil., ii, 6, P. G., t.xii, col. 1386 Il apparaît bien dans la pensée d’Origène que l'évêque seul n’est pas le détenteur du pouvoir des clefs, mais que les fidèles ont le choix entre plusieurs médecins ; cf. In Luc, homil., xvii, P. G., t. xiii, col. 1846. Sur tous ces points, voir Origène et A. d’Alès, L'édit de Calliste, Paris, 1914, c. ix. On retrouvera plus tard quelques traits de la théologie d’Origène sur le rôle de l'évêque rians le traitement i’u péché chez Méthode d’Olvmpe ; cf. J. Farges, Les idées morales et religieuses de Méthode d’Olympe, Paris, 1929, p. 136 ; 147-150 ; 153-155.

5. Tertullien.

Vers la même époque, en Occident, Tertullien est un témoin de la hiérarchie à trois degrés. Sans doute, sur l’organisation des corn-