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PARALIPOMÈNES (LIVRES DES). TEXTE ET VERSIONS


toute la précision souhaitée, offrent du moins les éléments suffisants d’une détermination approximative. Le décret de Cyrus qui marque la fin des Paralipomènes est daté de la première année du règne de ce roi : l’ouvrage n’est donc pas antérieur à cette date, 537. Puisque l’œuvre du chroniqueur se poursuit dans les livres d’Esdras et de Néhémie, seconde partie de son livre, c’est encore après l’époque des événements qui y sont racontés qu’il faudra reporter la date de composition des Paralipomènes, c’est-à-dire au moins un siècle plus tard. La double indication, fournie par la généalogie de David et la liste des grands-prêtres, oblige à la retarder davantage. La généalogie de David, I Par., ni, 19-24, se poursuit, en effet, jusqu’à la sixième génération après Zorobabel (537) ; en comptant trente ans pour une génération, c’est jusqu’à 350 environ qu’il faut descendre ou même, s’il faut en croire les versions grecques, syriaques et latines, jusqu’à 200, puisque la généalogie s’y poursuit jusqu’à la onzième génération. On fait observer, toutefois, que la durée d’une génération pourrait être comptée de vingt ans seulement et que la leçon des versions n’est qu’une interprétation de l’hébreu, ne constituant pas, de ce fait, une base d’argumentation bien solide ; peut-être même faudrait-il voir déjà dans l’hébreu un rt mankment rédactionnel. Steuernagel, Einleitung, p. 393. D’après la seconde indication, fournie par la liste des grands prêtres, II Esd., xii, 10, 11, 22, qui va jusqu’à Jeddoa ou Jedda, trois ou quatre générations après Éliasib, le contemporain de Néhémie, II Esd., xiii, 4, 28, et dont Josèphe fait un contemporain d’Alexandre le Grand, Anliq. jud., XI, vii, 2 ; viii, 2, la rédaction des Paralipomènes pourrait trouver place dans la seconde moitié du iv c siècle. Pour les autres éléments d’information, recueillis dans les livres d’Esdras et de Néhémie, voir ici, t. v, col. 532.

Des sources utilisées par le Chroniqueur on a également tiré quelques conclusions touchant l’époque de la composition de son œuvre. Les livres de Samuel et des Rois, d’après les citations qui en sont faites dans les Paralipomènes, supposeraient un état du texte assez tardif, soumis déjà à des remaniements d’après le code sacerdotal, cf. III Reg., vii, 48 ; ni, 3…, ou chargé d’additions postérieures à l’exil, cf. II Reg., xxi, 18-22 ; III Reg., vii, 47.., xii, 21-24, xxii, 4… De même pour les généalogies, I Par., i-ix, certains de leurs éléments proviendraient des parties les plus récentes du Pentateuque, telles que Gen., xlvi, 8…, Exod., vi, 16…, Num., xxvi, et certaines institutions cultuelles seraient empruntées aux éléments secondaires du (".ode sacerdotal, II Par., xxx, 2, et Num., ix, 6 ; II Par., xxxi, 3, et Num., xxviii-xxix ; II Par., xxxi, 19, et Num., xxxv. Cf. Steuernagel, op. cit., p. 407-408.

Le vocabulaire et le style des Paralipomènes présentent maintes particularités qui les rapprochent des livres récents de l’Ancien Testament. C’est ainsi que des mots anciens prennent un sens nouveau, non usité ou très rarement dans l’ancienne langue, ou que des mots nouveaux sont introduits pour répondre à l’organisation récente du culte. L’araméen a aussi exercé son influence, soit dans des mots qui lui sont empruntés, soit dans maintes tournures araméennes. Voir la liste des particularités linguistiques des Paralipomènes dans Curtis, The Books of Chronicles, p. 28-36. Cf. A. Kropat, Die Syntax des Autors der Chronik verglichen mit der seiner Quellen, Giessen, 1909.

A ces arguments divers, on ajoute enfin quelques considérations d’ordre plus général aboutissant à la même conclusion : « Non seulement on discerne partout l’esprit du judaïsme postexilique et l’influence pré DICT. DE THÉOL. CATH.

pondérante de la législation sacerdotale, mais encore on s’aperçoit qu’il s’est écoulé du temps depuis l’époque d’Esdras et que les institutions dues à ce dernier ont jeté leurs racines dans le sol et revêtu déjà l’aspect vénérable que donne l’ancienneté. En d’autres termes, le Chroniste n’est pas un contemporain d’Esdras, un témoin et un collaborateur de ses efforts réformateurs. Il appartient à une époque plus récente, où la vie politique et religieuse de la communauté juive, marquée du sceau sacerdotal, c pris un caractère stable et définitif. » L. Gautier, op. cit., p. 246-247.

La conclusion de cet ensemble de considérations semble donc bien s’imposer : l’œuvre du Chroniqueur appartient à une époque relativement récente qu’on ne saurait, selon toute vraisemblance, faire remonter au delà des dernières années du ive siècle.

VI. Texte et versions.

La date relativement tardive de la composition des Paralipomènes et le fait qu’ils furent moins lus et, par suite, moins souvent recopiés que la plupart des livres de l’Ancien Testament, auraient dû assurer une transmission de leur texte meilleure que celle qui aboutit à la tradition massorétique. Sans doute, les nombreuses listes de noms propres, surtout dans les neuf premiers chapitres du I er livre, où le contexte ne pouvait guère aider le copiste, sont l’occasion de maintes erreurs textuelles, non moins que les indications numériques, mais les parties narratives n’en sont point non plus exemptes. Peut-être en faut-il faire remonter la responsabilité à l’introduction tardive des Paralipomènes dans le canon et à la liberté de transcription qui, jusque-là, en fut la conséquence.

Hébreu.

-Les manuscrits hébreux offrent peu devariantes ;

celles-ci ne sont d’ailleurs pas d’un grand secours pour la reconstitution du texte. Cf. Bær, Liber Chronicorum. Les passages parallèles des anciens livres canoniques et leurs versions apportent à la critique textuelle des Paralipomènesuneaideprécieuse. Pour les noms propres en particulier, la comparaison avec les autres livres de la Bible révélera maintes altérations de ces noms. Cf. Friedlânder, Die Verànderlichkeit der Namen in den Stammlisten der Bûcher der Chronik, Berlin, 1903. De la même manière telles indications numériques pourront être rectifiées. Il importe de noter, toutefois, au sujet des corrections possibles, que bien des changements ne sont pas le fait d’une erreur, mais d’une intention bien arrêtée du Chroniqueur, qui, utilisant un texte déjà altéré, le retouche en vue de l’améliorer. La tâche de la critiquetextuelle dans les Paralipomènes n’est pas, selon une juste remarque, de restaurer le texte de la source originale citée, mais de rétablir le texte tel qu’il sortit de la main du Chroniqueur, Curtis, op. cit., p. 37 ; c’est ainsi que bien des passages trop facilement condamnés comme interpolés sont à maintenir dans l’œuvre primitive. Cf. Podechard, Le premier chapitre des Paralipomènes, dans Revue biblique, 1916, p. 363386. Pour les éditions du texte hébreu, voir : S. Bær, Liber Chronicorum, 1888 ; D. Ginsburg, 1894, p. 16761808 de sa Bible hébraïque ; Kittel, The Books of Chronicles in Hebreiv, 1895, dans Haupt, Sacred books oj theOld Testament ; Kittel, Biblia hebraica, t. ii, 1900, p. 1222-1320.

Grec.

La version grecque, tenue généralement

pour la version des Septante, est une traduction littérale, faite sur la même recension que celle d’où dérive le texte massorétique. On possède, en outre, dans le livre d’Esdras qui commence par la traduction des deux derniers chapitres des Paralipomènes, un témoin important du texte de ces chapitres ; la version, en effet, qui en est donnée, est plus libre que celle des Septanteet suppose une recension hébraïque différente. Quel est l’âge respectif de ces deux versions ? La

T.

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