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ORDRE. HIERARCHIE APOSTOLIQUE, EVÈQUES


Sans doute, dans l'épître de saint Pierre, si les fonctions des anciens apparaissent identiques à ce que Paul en dit dans Act., xx, 17 sq., leur autorité n’est pas ici rattachée explicitement à une consécration, alors qu’ailleurs cette institution est indiquée ; mais elle est implicitement supposée, car les anciens sont « préposés au troupeau de Dieu ; » ils sont les « remplaçants du Christ ; » c’est donc en vertu de l’autorité de Dieu et du Christ qu’ils dirigent les fidèles.

G. Épître de saint Clément aux Corinthiens. — La lettre de saint Clément aux Corinthiens nous apprend que ceux-ci s'étaient révoltés contre leurs TcpeaêuTspouç, xlvii, 6. Il s’agit ici, non de vieillards proprement dit, mais de dignitaires de l'Église. Le contexte, en effet, rappelle le souvenir des factions qui avaient divisé la communauté, et toute la lettre prouve qu’il s’agit d’une sédition contre l’autorité spirituelle. L’auteur écrit plus loin, liv, 2, qu’il est nécessaire que le troupeau du Christ, jouisse de la paix avec ses anciens établis, fiera tcôv xaOsaTajiivcov npza6uTsp<ov. Il a des raisons d’insister sur l'établissement, c’est-à-dire l’institution du presbytérat. Car cette institution est précisément ce qui confère aux anciens l’autorité et les rend pasteurs légitimes du troupeau du Christ. Et il était opportun de le rappeler aux Corinthiens en révolte. Un peu plus haut, il avait rappelé les auteurs de cette institution : « Ceux qui ont été établis, roùç xaraoTaGévraç, soit par eux (les apôtres), soit ensuite par les autres hommes illustres, ce n’est pas sans injustice qu’on les chasse de leur fonction. » xliv, 3. La formule à dessein vague : « les autres hommes illustres » nous laisse une marge assez considérable pour établir le cadre de la hiérarchie primitive, qui n'était pas nécessairement et uniquement constituée par les èniax.ov : oi et les Trpea6ÙT£poo. Voir plus loin. Ces autres hommes illustres, auxquels aucun nom propre n’est affecté, sont désignés comme étant les successeurs des apôtres dans leur pouvoir épiscopal, ꝟ. 1, 2.

Plus loin encore, Clément parle des anciens : « Vous qui avez jeté les semences de la révolte, soumettezvous aux anciens. Corrigezvous, convertissez-vous, fléchissant les genoux de votre cœur. » lvii, 1. Celle métaphore un peu hardie, empruntée à la prière de Manassé, roi de Juda, captif à Babylone, semble indiquer un pouvoir des anciens sur les âmes. Cette hypothèse est pleinement vérifiée par le passage suivant, i.xiii. 1 : « II est juste de courber la tête et, saisissant l’occasion de se soumettre, de s’incliner devant ceux qui se trouvent être les directeurs de nos âmes. toÏç >j71depxouai.v àpyjiyoTç tcôv iu^cov r)(xtôv, afin que, laissant là ces vains troubles, nous atteignions le but dans la vérité. » Les anciens sont donc des directeurs spirituels ayant droit à l’obéissance des fidèles. Voir également // Clementis. xvii, 3, 5. Il est difficile d’indiquer plus clairement un pouvoir sacré. Enfin un dernier passage indique encore l’institution presbytérale : « Bienheureux les anciens dont la course ici-bas est achevée… ; ils n’ont plus à craindre d'être expulsés de la place qui leur avait été assignée, ànto toû [Spuuivou aÙTOÙ ; tottou. » xliv, 5.

Nous omettons à dessein la controverse soulevée par certains critiques, même catholiques, à savoir si tous les anciens étaient revêtus d’un caractère sacré, comportant des pouvoirs spirituels institués par Jésus-Christ ou si plusieurs d’entre eux appartenaient simplement à un ordo purement honorifique. Cette question sera traitée à l’art. Prêtre. Il nous suffit de constater que tout au moins un certain nombre d’anciens devenaient tels et étaient constitués chefs dans les Églises par l’imposition des mains, sorte de consécration donnée par les apôtres, leurs délégués ou leurs remplaçants, et que plusieurs de leurs fonctions

impliquaient un véritable pouvoir sacré. Or, les textes auxquels nous avons fait appel pour l'époque apostolique le démontrent abondamment. L’opposition des termes vso>Tspoi et Tcpsa6ÛT£pût. qui est fréquente dans la lettre de Clément et qu’on retrouve aussi dans la première épître de saint Pierre n’infirme en rien cette conclusion. Newrepoç est employé littérairement par opposition à jtpso6ÛTepoç et signifie les inférieurs, les simples fidèles. Cf. Michiels, op. cit., p. 161-163.

Quant aux « presbyties ». contemporains des apôtres, et dont Papias prétend recueillir les dires, leur personnalité est laissée dans une ombre telle que nous n’en pouvons retirer aucun enseignement, au point de vue qui nous occupe. Cf. Papias, ii, 3, 15.

Évèques.

Le mot iniax^noç est employé

dans la littérature profane. Mais il figure aussi, avec ses congénères èmaxon-f] et È7uaxora.ïv dans maints endroits de l’Ancien Testament. Voir Évêque, t. v, col. 1658-1659. 'Emaxoraïv a la signification générale de surveiller, inspecter, gouverner, et par dérivation, punir, juger. Rien d'étonnant donc qu’il ait été admis dans la langue du Nouveau Testament pour désigner les chefs de l'Église, par opposition aux ministres inférieurs, Siàxovot, et aux simples fidèles.

Ainsi donc, à part I Pet., ii, 25, où il est appliqué à Jésus-Christ lui-même, il désigne constamment un personnage revêtu d’une mission d’autorité et de surveillance. On le trouve employé en ce sens dans Act., xx, 28 ; I Tim., iii, 2 sq. ; Phil., i, 1 ; Tit., i, 7 sq ; I Pet., v, 2 ; et, dans les écrits apostoliques non inspirés, dans l'épître clémentine, / Cor., xlii, 4, 5 ; la Didachè, xv, 1. Le substantif abstrait correspondant imaxony] se lit Act., i, 20 ; I Tim., ni, 1 ; Clément, / Cor., xliv, 1, 4.

Une seule question nous intéresse à propos des « surveillants » de la primitive Église ; leurs fonctions comportaient-elles un caractère sacré, indice d’une participation au sacrement de l’ordre, institué par NotreSeigneur Jésus-Christ ?

La réponse affirmative ne peut faire l’ombre d’un doute. Il est certain, en effet, que dans la plupart des cas, sinon toujours, les deux termes 7rpec6t>TepO[. et Ètugxotïoi sont synonymes. Voir Évèque, col. 16591662. Or, nous avons déjà vu que les anciens étaient chargés d’une fonction sacrée. Mais entrons plus avant dans l’examen des textes.

1. Actes.

Dans le discours de Milet, saint Paul adresse aux « anciens » ces paroles significatives : « Soyez attentifs et à vous et à tout le troupeau sur lequel l’Esprit Saint vous a établis évêques, pour gouverner, ttoiu.cuveiv, l'Église de Dieu qu’il a acquise par son sang », Act., xx, 28. Même en prenant ici le mot ÈTrtaxoTroç comme un nom commun, il n’en est pas moins vrai que ces dignitaires ecclésiastiques sont « établis par l’Esprit Saint », c’est-à-dire qu’une consécration divine est à la source de leur ÈTuaxoTrr). L’Esprit Saint leur a donné la mission de gouverner, de régir l'Église : la figure noi[j.<x’ivsiv exprime fréquemment cette idée de gouvernement, d’autorité dans l'Église ; cf. Joa., xxi, 16 ; Eph., iv, 11. Et il ne s’agit pas d’une surveillance ou d’une administration d’ordre temporel, comme le pourrait laisser supposer l'étymologie du mot èmaxoizii, mais il s’agit d’un gouvernement d’ordre doctrinal et spirituel. Les ꝟ. 29 et 30, faisant allusion aux propagateurs possibles d’hérésie, ne laissent aucun doute à cet égard.

2. Épître aux Philippiens.

L’adresse de l'épître aux Philippiens « à tous les saints dans le Christ Jésus, qui sont à Philippes, et aussi aux évêques et aux diacres », Phil., i, 1, semble une dérogation aux habitudes épistolaires de l'époque, le salut étant envoyé