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PAPE. RAPPORTS AVEC 1/ EPI SCO PAT LATIN

1896

savons que cette œuvre n’avait laissé de côté presque aucun détail de la vie catholique.

Non seulement Pie IV confirma les décisions du concile et précisa la date où elles commenceraient d’être exécutoires, mais il interdit, sous peine d’excommunication, tout commentaire sur leur texte et prescrivit de s’adresser à Rome chaque fois qu’un éclaircissement paraîtrait nécessaire : bulle Benedictus Deus, du 26 janvier 1564. De plus, considérant que « peu importe de faire des lois s’il n’y a personne pour en promouvoir l’observation ». il créa une congrégation permanente de huit cardinaux, chargée d’imposer par tous les moyens l’obéissance aux décrets de réformation, et munie à cet effet de très larges pouvoirs de contrainte, parmi lesquels l’excommunication lalæ sententise. Motu proprio « Alias nos », du 2 août 1564. (On trouvera ces deux documents à la fin de chacune des éditions du concile ; la plus récente et la plus complète est celle qu’achève de donner la Gœrresgesellschafl, Concilium Tridentinum : diariorum, actorum, epistul<irum, iradatuurn nova collectio, Fribourg-en-Brisg., 4 volumes consacrés aux Acta ont paru, dus à St. Elises, t. iv, v, viii et ix de la collection.)

Avec la création de cet organisme, qui prenait place à côté du Saint-Office et auquel d’autres allaient s’ajouter sans tarder, reléguant à l’arrière-plan les consistoires, le Saint-Siège entrait dans une voie nouvelle, celle de la division du travail de gouvernement, des relations méthodiques et suivies entre les diocèses et des bureaux de curie affectés à une besogne déterminée ; en un mot, dans la voie de la centralisation administrative. Depuis lors, il n’a fait que perfectionner les méthodes, sans changer le principe. Les progrès de la civilisation moderne, rendant les routes plus sûres, les communications avec Rome plus commodes, l’échange des correspondances plus rapide, ont servi à resserrer les liens déjà si étroits qui unissent, depuis le xvie siècle, le pape à toutes les fractions de la grande famille catholique. Ajoutons que l’exaltation doctrinale du pouvoir suprême au concile du Vatican, les événements politiques qui suivirent de près et valurent à la personne des papes un surcroît de respect de la part du clergé et des fidèles, bien plus, comme un attachement ému, teinté de tendresse mystique et d’admiration, contribuèrent encore à faire du Vatican le point sur lequel tous les catholiques fixent leur i égard.

ix. résultats. — Cette perspective cavalière, et forcément schématique, du développement de la centralisation ecclésiastique, montre que celle-ci fut en grande partie commandée par les circonstances. Chacun des progrès de la mainmise pontificale sur le gouvernement de l’Église universelle correspondit à des besoins ; et il est tout naturel qu’une fois acquis, la papaUté se soit efforcée de les maintenir, dans la mesure du possible, et de les consolider. Elle ne les réalisa pas, du reste, ni ne les conserva, sans luttes. Déjà certains évêques protestaient, au ve siècle, contre l’envoi des légats : Thomassin, Ancienne et nouvelle discipline de l’Église, I" partie, t. II, ch. cxvii, dans l’éd. de Bar-le-Duc, t. ii, p. 4 11°. L’épiscopat d’Afrique, à la même époque, supportait fort mal les appels intei jetés à Rome par ses ressortissants : Batiffol, Le Siège apostolique, p. 210. L’on sait à quelles résistances se heurtèrent, au xi c siècle, les mesures réformatrices de Grégoire VII : A. Fliche, La réforme grégorienne, t. ii, passim, et quelle opposition acharnée rencontrèrent, au xive sièc e, les incursions avignonnaises dans le domaine bénéficiai : G. Mollat, La collation des bénéfices eccl. sous les papes d’Avignon, p. 227 et sq. Le succès de la centralisation s’explique en partie, sans doute, par le génie îles papes qui la firent principalement avancer, mais aussi par la nature et la gravité des dangers auxquels

elle fut un moyen de parer ; elle s’explique enfin, et surtout, par l’idée de la primauté romaine, idée primitive et traditionnelle, qui n’a jamais été sérieusement contestée, au sein du catholicisme, même par ceux qui en combattirent les applications pratiques. Si les papes sont parvenus à réunir dans leurs mains tous les fils qui font mouvoir l’Église, c’est qu’ils ont senti qu’on attendait leur intervention et qu’ils pouvaient compter sur l’appui moral de la chrétienté.

II. Le pape et l’épiscopat latin. - Dans une société hiérarchisée comme l’Église catholique, l’on peut dire que le pape exerce le gouvernement effectif dans la mesure où il dirige l’épiscopat. Or, les liens de dépendance cjui unissent aujourd’hui les évêques au souverain pontife ne sauraient être plus étroits.

I. LE PAPE ET LE CHOIX DES ÉVÊQUES.

1° Le

principe actuel. — D’abord, c’est le pape qui nomme les évêques : en principe, du moins, car il y a des exceptions ; mais à ce principe correspond la pratique de beaucoup la plus usuelle. Nous ne parlons pas de Y institution ou mission canonique, de 1’ « investiture », comme on disait autrefois, de cette remise des pouvoirs de juridiction, qui ne peut être le fait que du supérieur ecclésiastique. Si, au Moyen Age, elle procéda du métropolitain, depuis longtemps c’est au pape qu’elle est réservée. Il s’agit ici du choix proprement dit. de la désignation de la personne. Or, aux termes du can. 329, § 2, du Code de droit canonique, le pape nomme librement les évêques. eos libère nominat romanus pontifex ; et le § 3 précise : si un chapitre, ou toute autre personne morale, garde la faculté de désigner le prélat, c’est en vertu d’une concession, Si cui collegio concessiun sit jus eligendi episcopum… Il n’y a donc aucune obscurité sur ce point : de droit commun, les évêchés sont de libre collation ; tout autre mode de provision, et notamment l’élection, ne peut résulter que d’un simple privilège.

L’évolution du droit.

De telles déclarations, du

moins en termes aussi absolus, sont chose nouvelle : le Code est, en effet, le premier texte proprement législatif où elles apparaissent. Les dispositions du Corpus juris, au 1. I er, tit. vi, des Décrétales de Grégoire IX, qui constituaient en cette matière, jusqu’en 1918, la base du droit écrit, supposaient une discipline toute différente, assez clairement indiquée dans la rubrique elle-même : De electione et elecli potestate. L’évêque devait être élu. Saint Léon le Grand a expliqué les raisons de l’ancienne pratique dans une de ses lettres, adressée à l’évêque Anastase de Thessalonique, P. L., t. liv, col. 674 : Cum ergo de summi sacerdotis electione tractabitur, écrit-il, ille omnibus præponatur quem cleri plebisque consensus concorditer postulant, ita ut si tu aliam forte personam partium se vota diviserint, metrepolilani judicio is alteri pnvferatur qui majoribus et sludiis juvatur et meritis : lantum. ut nullus invitis et non petentibus ordinetur, ne civitas episcopum non oplatum aut contemnat aut oderil, et fiât minus rcligiosa quani convenit cui non licuerit habere quem voluit. Sur la pratique des élections, et les empiétements des pouvoirs séculiers, voir l’art. Élection des évêques, t. iv, col. 2256-2276.

Sans doute le collège électoral, à partir du xme siècle, se réduisit au chapitre cathedra !  ; mais, quel que fût le nombre des électeurs, l’élection demeurait la règle. Le concile de Trente ne la modifia pas, bien qu’il entendît sauvegarder en tout les droits du pape et qu’il vil dans celui-ci le juge-né de l’idonéité des candidats. Sess. xxii, de reform., c. ii ; sess. xxiv, de reform., c. i. Il déclara même ouvertement que, sur ce point, il ne changeait rien : nihil in iis pro pra’senli temporum ratione innovando. Sess. xxiv, de reform., c. i. Simplement, il affirma avec force la validité des nominations pontificales : Si quis dixerit episcopos qui auctorilaté