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ORDRE. INSTITUTION PAR LE CHRIST


illusion sur le sens de ex aqua. Dans tout l’Orient existait la pratique des ablutions spirituelles pour l’expiation des péchés, et cette pratique était courante chez les juifs. Voir Baptême, t. ii, col. t68. Jésus lui-même confère le baptême, Joa., m 22. 26. Et il déclare l’ellicacité du rite baptismal pour sanctifier l'âme : « Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé ; celui qui ne croira pas sera condamné. » Marc, xvi, 16. L’eucharistie : « Si vous ne mangez la chair du Fils de l’homme et si vous ne buvez son sang, vous n’aufez pas la vie en vous. » Joa.. vi, 53. Il s’agit ici d’un rite extérieur, que les Juifs interprétèrent même dans le sens d’une manducation matérielle, puisqu’ils en furent scandalisés. On pourrait aussi trouver d’autres exemples relatifs à quelques autres sacrements. Ces remarques nous amènent à concevoir que JésusChrist ait dû instituer le sacerdoce de la Nouvelle Loi comme devant procéder d’un rite sacré, lequel, à l’instar du baptême et de l’eucharistie, aurait, dans l'Église, rang de sacrement.

3. L’institution de ce pouvoir est réalisée en fait par Jésus-Christ. — a) Les prophéties annoncent l’abolilion du sacerdoce lévitique en faveur d’un nouveau sacerdoce. — Dans l’Ancienne Loi. les ordres des lévites et des prêtres sont distingués de la foule du peuple ; à eux seuls est réservé le sacrifice et la célébration du culte. Or, le Nouveau Testament abroge complètement le particularisme d’Israël et. dans Israël, de la tribu de Lévi quant au choix des prêtres du vrai Dieu. Ce sacerdoce, en effet, fera place à un autre sacerdoce à venir, bien supérieur, dont les fonctions sacrées seront totalement différentes, mais qui, par rapport à l'Église tout entière, seront dans le même rapport que le sacerdoce lévitique par rapport à la nation juive ; cf. Is., lxvi. 21. Et le sacrifice répondant à cet autre sacerdoce sera l’oblation pure dont parle Malachie. i, 11 : iii, 3. D’ailleurs, en montrant la réalisation de ce nouveau sacerdoce, voir plus loin, l'épître aux Hébreux, vii, 1 sq., a bien mis en relief l’existence et la supériorité du sacerdoce de la Loi Nouvelle, selon l’ordre de Melchisédech, par rapport au sacerdoce lévitique, selon l’ordre d’Aaron. Melchisédech est représenté comme le type du sacerdoce nouveau, non seulement à cause de la signi lication de son nom (roi de justice), mais parce que, sans père, sans mère, sans aïeux, n’ayant ni commencement ni fin de vie, il est semblable à Jésus-Christ, Fils de Dieu, prêtre éternel. La supériorité du sacerdoce de Jésus-Christ est figurée en Melchisédech, qui offrit à Dieu le pain et le vin. symboles de l’eucharistie. Gen., xiv. 18.

h) La mission du Christ comportait ce nouveau sacer doce, ordonné au sacrifice de la Nouvelle Loi. — Toute la vie du Christ, vouée à l’anéantissement, Phi]., ii, 7, manifeste que le Christ n’eut d’autre but que de se livrer lui-même, pour nous « en oblation à Dieu, et en hostie de suave odeur ». Eph., v. 2. (.'est ainsi qu’il se sanctifie (le terme grec âyiâÇw indique toute la force de cette consécration sanctifiante), afin de sanctifier les autres en vérité. Joa., xvii, 19. II est venu donner sa vie pour la rédemption de tous. Matth., xx, 28 ; Marc, x, 45. Ce nouveau sacerdoce, instauré par la vie même de Jés is, est bien mis en relief par l'épître aux Hébreux. Nous ne ferons que résumer ici une doctrine déjà exposée ailleurs. Voir Hébreux (Épître aux), t. vi. col. 2105 ; JésusChrist, t. viii. col. 1335. et Messe, t. x, col. 821. L'épître rappelle que « tout grand prêtre, pris d’entre les hommes, est établi pour les hommes en ce qui regarde le culte de Dieu, afin d’offrir des oblations et des sacrifices pour les péchés. » Heb.. v, 1. Or. Jésus-Christ a pris la race d’Abraham, pour « être semblable en tout à ses frères, afin de devenir auprès

de Dieu un pontife miséricordieux et fidèle, pour expier les péchés du peuple ». n. l(i-17. Et ainsi,

nous avons un pontife qui peut compatir à nos infirmités, ayant éprouvé comme nous toutes sortes de tentations, hormis le péché ». iv, 15. « Établi poulies hommes en ce qui regarde Dieu, » il a dû être établi par Dieu lui-même, car nul ne doit s’arroger la dignité du sacerdoce ; « il faut y être appelé de Dieu, comme Aaron ». Ainsi, ce n’est pas le Christ qui s’est glorifié lui-même pour devenir pontife, mais c’est celui qui a dit : « Vous êtes mon Fils ; c’est moi qui aujourd’hui vous ai engendré » ; comme aussi dans un autre endroit, il dit : « Vous êtes prêtre pour l'éternité, selon l’ordre de Melchisédech. » v, 4-6. Sur la supériorité de l’ordre de Melchisédech, voir ci-dessus. Jésus a rempli les fonctions de son sacerdoce, car, devant offrir des oblations et des sacrifices pour les péchés, v. 1, il n’avait pas besoin, comme les autres prêtres, d’offrir des victimes, d’abord pour ses propres péchés, ensuite, pour ceux du peuple, vii, 27. Mais il a offert son sacrifice, une fois pour toutes, en s’offrant lui-même, vii, 28. Et l’auteur inspiré insiste sur cette pensée : « Il a paru une seule fois, à la consommation des temps, pour détruire le péché, en se faisant lui-même victime. » ix, 26. « Ainsi, le Christ s’est offert une fois pour effacer les péchés d’un grand nombre. » ix, 28. C’est parce que Dieu rejetait les sacrifices de l’Ancienne Loi, comme incapables de satisfaire à sa justice, que le Christ est venu, grandprêtre de la Loi Nouvelle, offrir le second sacrifice pour abolir le premier et, par là, instituer un nouveau sacerdoce, comparable à celui de Melchisédech, et supérieur à l’ancien ; cf. Heb., x, 5-10 : vi, 20-vn. 20. Cette abolition de l’ancien sacerdoce par le sacerdoce de Jésus-Christ est une des doctrines fondamentales de l'épître aux Hébreux. Le concile de Trente en a retenu expressément l’affirmation. Sess. xxiii, cap. i, Denz.-Bannw., n. 957.

En fait, la substitution d’un sacrifice à l’autre s’est opérée à la Cène et à la Croix, quand Jésus offrit son propre sacrifice. La Cène, en effet, telle qu’elle est rapportée par saint Paul, I Cor., xi. 23 sq. ; saint Matthieu, xxvi, 2(3 sq. : saint Marc, xiv, 22 sq. ; saint Luc. xxii, 15 sq., est un véritable sacrifice. Voir Messe, t. x, col. 804 sq. Le sacrifice du Calvaire, lui aussi, est un sacrifice véritable ; il est même le sacrifice qui fonde la Loi Nouvelle. Voir Rédemption. Mais, comme seul le sacrifice de l’eucharistie doit être réitéré dans l'Église, en tant que sacrifice de l’Eglise même, unie à son chef, c’est à lui seul qu’est ordonné le sacerdoce de ceux qui, jusqu'à la fin du monde, doivent continuer ici-bas l'œuvre du Christ : cf. M. de la Taille, Mijsterium fidei, elucid. xvi-xvii.

1. Communication par Jésus-Christ aux Apôtres d’un pouvoir sacerdotal. — a) Ce pouvoir concerne la réitération du sacrifice eucharistique. — Sacerdoce et sacrifice, dans l'économie providentielle, sont deux institutions qui s’appellent mutuellement. Si donc Jésus-Christ a institué un nouveau sacrifice qui doit être réitéré jusqu'à la fin du monde, il faut qu'à ce sacrifice corresponde un sacerdoce qui se perpétue également. Or, à la Cène, les apôtres reçurent de Jésus-Christ l’ordre de réitérer le sacrifice du corps et du sang du Sauveur jusqu'à la fin des temps. Voir Messe, col. 825. Cet ordre est contenu dans les paroles : « Faites ceci en mémoire de moi », Luc, xxii, 19 ; I Cor., xi, 24-25. lia été démontré que le silence de saint Matthieu et de saint Marc relativement à cet ordre n’en infirme pas l’existence. Pareillement, saint Luc ne s’est cru obligé de relater qu’une fois, c’est-à-dire après la consécration du pain, l’ordre (tonné par Jésus-Christ. A elle seule cependant l’autorité de saint Paul suffirait à établir l’au-