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PALAMITE (CONTROVERSE). EES A.NTIPALAMIT ES


cette opinion singulière sur la lumière thaborique, opinion dont il ne voulut pas se départir, qui le mit aux prises avec ses amis antipalamites, entre autres avec Isaac Argyros, et lui fit écrire ses trois courtes apologies. Pour se justifier, il disait qu’il ne fallait pas chercher à préciser plus que ne le font les Évangiles, et en appelait à l’autorité de Nicéphore Grégoras et de Matthieu d'Éphèse.

1° Grégoras, en effet, suit, lui aussi, les traces d’Acindyne, et nous avons en lui un autre représentant du byzantinisme conservateur, ennemi de toute nouveauté. Comme Acindyne, il enseigne l’identité réelle, en Dieu, de l’essence et de l’opération, et montre bien que la simplicité divine est unique en son genre et qu’on n’en peut trouver aucun exemple dans les créatures, toute créature étant composée d’essence et de qualité : èxeIvy) U-ôvr) tîj 0£Îa xai àTcXouaTocTY) cp’iæt Trpocr/jxei, ÉTÉpa Se oùSsfjiicje twv xtkttûv à7raaâ>v… 7râaa xrîatç aùvôerôç Èctti, èÇ oùataç xai tto'.Ôtvjtoç. Hist. Bijzant., 1. XXXI (6 Seûxspoç 80yu.a-n.x6c), P. G., t. cxlix, col. 321 D, 324 A. Cependant, quoi qu’en ait dit Dexios, Nicéphore a une doctrine bien arrêtée sur la lumière du Thabor. D’après lui, cette lumière ne pouvait être que créée, puisqu’elle fut perçue par des yeux mortels, et qu’il n’y a rien d’incréé en dehors de l’essence divine. Ce ne fut qu’une manifestation symbolique et énigmatique de la lumière incréée, analogue à la lumière parue en d’autres théophanies. Sur le Thabor, les apôtres contemplèrent non la divinité incrééc, non Dieu, mais une réalité connaissable, c’est-à-dire quelque chose de créé : ol à7r6atoXoi zb êv Tw ©aêcopîw Xâu-t^av tÔte 0Eaaâu.£Voi. epcoç, outs ÔecOTjTtx eïSov axTiarov, oote ©sôv, àXXâ ti tmv ovtcov xai yivtoaxofjtivMv. Op. rit., t. XXXIII, c. xiii, P. G., toc. cit., col. 384-385. Il nie également qu’une pareille lumière puisse être l’objet de la béatitude céleste. Ibid., col. 37C-380. Au demeurant, bien des points demeurent obscurs dans la théologie du moine de Chora. On voit qu’il ne s’est pas frotté à la scolastique occidentale et qu’il est novice en l’art de faire les distinctions lumineuses qui dissipent les équivoques.

5° Ce qui manque à Nicéphore Grégoras, Proehoros Cydonès, le frère de Démétrius, le possède à un rare degré. Dans son ouvrage Hspi oûataç xai svspysîaç, en six livres (cf. Vatic. græc. 1435, et l'étude citée de G. Mercati), nous entendons un vrai disciple de saint Thomas d’Aquin. qui s’est bien assimilé sa doctrine, et fait la pleine lumière sur les questions agitées entre palamites et antipalamites par les distinctions appropriées. Avec raison, il commence par faire remarquer que ceux qui, avant lui, à Byzance, ont traité la question de l’essence de Dieu et de son opération, ont oublié de déterminer les divers sens du mot opération, èvÉpysta. De là, leur marche incertaine dans la discussion, leur manque d’assurance dans le combat : 8tô xai àxpiTÔç ècmv ocÔtoïç ô àya>v, xai axiau.a ; j(îa tô ôXov. De essentia et operalione, t. I, c. i, P. G., t. cli, col. 1192-1193. La critique est particulièrement juste pour Grégoras, qui professait tant de mépris pour les théologiens latins. Avec un sang-froid imperturbable et d’une main très sûre, Proehoros promène le fer de la dialectique aristotélicienne et thomiste dans la plaie palamite, et en crève toute la boursouflure de fausseté. Aussi Philothée était étourdi de tant d’audace et n’en revenait pas. Le diable, disait-il, parle par la bouche de Proehoros. Barlaam n'était rien auprès de luil Les disciples de Palamas ne pouvaient le suivre dans ses déductions implacables. Le soleil et ses rayons s'éclipsaient devant la transcendance infinie de l’Acte pur, et les Geottjteç de Palamas fondaient devant lui comme neige au soleil. "Voir des extraits intéressants de Proehoros, dans le tome synodal de 1368 signalé

plus haut. La lecture de ce tome montre bien le désarroi dans lequel le hiéromoine thomiste jetait ses contradicteurs palamites. Sur ses ouvrages, voir G. Mercati, op. cit.

6° Le moine Isaac Argyros n’a point la science thomiste de Proehoros, mais c’est un esprit très net et très clair, un vrai théologien versé dans la connais sance des Pères grecs, et ses réfutations du palamisme comptent parmi les meilleures de celles qui nous sont parvenues. G. Mercati, op. cit., p. 236 sq., apporte d’excellentes raisons de lui attribuer la longue réfutation anonyme d’un écrit de Jean Cantacuzène contenue dans le Vatic. 1096. fol. 65-147, incipit : 'Çïç ànoXoito, cpTjalv ô 6£oXoyixwTaTOç voGç. Au début de cet ouvrage, Argyros, qui écrit vers 1370, nous apprend qu’il a composé précédemment une histoire de la controverse palamite. Cette histoire n’a pas encore été retrouvée. Argyros ne manifeste pas les réserves et les timidités des premiers adversaires du palamisme. Sur la nature de la lumière du Thabor, il a une doctrine bien arrêtée. Cet éclat qui brilla sur la face du Sauveur, lors de sa transfiguration, fut un phénomène transi toire produit, à ce moment, par voie de création autour de son humanité par la toute-puissance du Verbe, qui habitait en elle. Cet éclat, cette beauté physique, Adam l’avait reçue de Dieu, au moment de sa création. II la perdit par le péché. Elle sera restituée aux corps des justes, à la résurrection générale. L’humanité sainte du Sauveur ne reçut point cet éclat dès l’instant de sa conception dans le sein de Marie, car le Verbe a pris une chair passible comme la nôtre ; mais elle en fut revêtue, le jour de la résurrection. Au Thabor, par miracle et pour un instant, cette lumière enveloppa Jésus tout d’abord pour signifier et symboliser sa divinité ; ensuite pour convaincre les apôtres qu’un jour les justes brilleraient du même éclat : 7rspl tJ)v aàpxa, Tjvixa ( J i£Tajji£p.6p<pwTa(. ô ctwtyjp, 8-/)u.ioupy(.xwç roxpà ttjç vjvcûjjivYjç aÙTyj xa6, 'jTr6araaiv toù Aoyou 0£Ôtï)toç yeyovoç… 'II Xau.7ïpô-n]ç ïjv xai tô àp/£TU7rov xai cpuaixôv xàXXoç, [j.sQ’oî> uapà ©eoû ô TtpoJToc 8e8/)u.[.o’jpy)r)Tat. ôwOpMîtoç. Vatic. græc. 1096, fol, 71 r°. Argyros répète le même enseignement, dans un autre opuscule que vient de découvrir G. Mercati, op. cit.. dans le Vatic. 1102. fol. 35-45 v°. C’est, au fond, la thèse de Barlaam. et c’est pour cela que Dexios y répugnait. Il y a cependant une différence, qu’Argyros ne manque pas de noter. Le Calabrais avait eu la témérité de dire que la lumière du Thabor était inférieure à notre pensée : toGto tô cpwç /jrrov elvai sÏttsv xai XEÎpov vor)Œtoç 7)(jtâ>v. Or cela, dit Argyros, ne cadre pas avec les saintes Écritures, d’après lesquelles ce que Dieu fait, surtout quand c’est par miracle, dépasse toute intelligence, même si ce miracle peut être vu par les yeux corporels. Comment déclarer inférieur à notre esprit ce qui n’a été visible qu'à ceux qui en étaient dignes et pour lesquels Dieu l’a opéré ? â yàp 6 Qeôç noi.eï, xai p-âXiara xaxà Xôyov 0auu.aToupyîaç, Trâvra voûv 'jTCEpSawsiv èï aÙTcôv è81.8â ;)(6ï]fi.sv, si xai ôpaxà £Ïai aoL>u.axi.xoiç ôcp0aXu, oîç. Cod. Vatic. 1096, fol. 88 r°. C’est encore à réfuter les palamites que sont consacrés deux autres opuscules de notre moine, conservés l’un dans le Vatic. 1096, fol. 171 sq., sous le titre : ITspi SiaxplcrEwç [lsto'/tiç ©soû êv xéaaapai. xpottooç ; l’autre dans le Vatic. 1102, fol. 25-31, adressé au moine-peintre Gédéon : Ilepl ttjç êv [xaxapla TpiâSt Xsyo[j(iv7)< ; TiaTp6-ry]TO< ; xai uEôttjtoç. Cf. Mercati, op. cit Nous savons qu’Argyros persévéra jusqu'à la fin dans son hostilité au palamisme : ce qui lui a valu d'être anathématisé nommément dans le Synodicon du dimanche de l’Orthodoxie, au moins dans certaines Églises.

7° Parmi les adversaires du palamisme, Jean Cyparissiotès occupe certainement la première place tant