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OXFORD 'MOUVKMENT D'. APOGÉE


approfondies : il ne trouvait pas suffisant d’attirer l’attention sur les anciennes doctrines de L'Église, comme le faisaient les premières publications : il voulait qu’on les exposât intégralement et qu’on les défendît contre les mauvaises interprétations. Ce changement dans la forme et le caractère des Tracts se remarque dans ceux que Pusey publie à la fin de 1835, sous les n° 67-G9. Ces trois publications d’environ cent pages chacune, constituent « le traité sur le baptême le plus fouillé peut-être qui ait été publié en Angleterre ». Church, op. cit., p. 130. Pusey y rétablit la véritable portée de ce sacrement, où l’on ne voyait plus que le signe et non la réalité de l’action régénératrice de Dieu.

Les Tracts suivants seront faits, pour la plupart, suivant ce modèle de dissertations théologiques étendues et savantes. Newman est convaincu de la nécessité de ce changement. Cf. Lett. and corr., t. ii, p. 138. Mais cela demandait plus de soin dans leur préparation et dans le choix des sujets opportuns. C’est pourquoi Pusey institua une société théologique, qui tiendra ses assises chez lui et où l’on discutera des études qui entreront dans les Tracts ou dans le British magazine. I. a première réunion eut lieu le 12 novembre 1835.

4° Autres moyens d’action des tractariens. - La diffusion des Tracts n’absorbait pas toute l’activité des chefs du mouvement. D’autres publications étaient faites dans le même esprit et pour le même but, et Newman dans ses sermons de Sainte-Marie ajoutait l’influence de sa parole à celle de ses écrits.

A la réunion de Hadleigh, on avait examiné un petit supplément au Church catechism : unChurchman’s manual, composé par Perceval. Il fut revu par Rose, Palmer et Froude. Son but était de compléter le catéchisme sur la nature de l'Église, ses droits et ceux de ses ministres, de donner un sommaire de la théorie anglicane et de sa situation vis-à-vis de Rome et des dissidents. Il fut approuvé par des évêques, des clergymen et de hautes personnalités. Soumis à l’archevêque pour approbation, correction ou suppression, celui-ci répondit qu’il ne voyait pas de difficulté a sa publication, mais qu’il ne pouvait lui donner une sanction officielle. Aucune publication théologique n’avait été entourée de tant de soins. « Cela prouve, dit Perceval, que la fondation du mouvement auquel Rose était attaché, fut faite avec tout le soin et toute la circonspection que la raison pouvait exiger. » Church, op. cit., p. 126.

On ne saurait dire si cet exposé de la théologie d’Oxford a exercé une influence considérable. Il n’en est pas de même des sermons de quatre heures de SainteMarie, qui gagnèrent au Mouvement un nombre considérable d’adhérents. La prédication constituait une partie importante, pour ne pas dire la partie essentielle, du culte anglican : le service quotidien, prescrit par le Prayer book, était tombé en désuétude. Froude aurait voulu rétablir la célébration, sinon quotidienne, du moins hebdomadaire, de l’eucharistie. En 1834, Newman hésitait encore à le faire. » Voilà un an que je suis préoccupé de commencer la célébration hebdomadaire du Lord' s Supper ; et je n’ai pas encore fait le premier pas. > Lett. and corr.. t. ii, p. 50. Et cependant il voulait réveiller le culte paroissial de la sorte de léthargie où il était tombé, ranimer la piété, amener les fidèles à regarder en eux-mêmes, à se juger, insuffler dans la pensée religieuse un peu de chaleur, substituer une vie religieuse profonde à une piété superficielle et routinière, à une religion de convenance. Ce fut le but des sermons qu’il donna le dimanche, à partir de 1828. à quatre heures, dans son église Sainte-Marie. Il n'était pas orateur. « Il était aussi loin de l’orateur que pouvait l'être un grand prédicateur. » Church, Occasional papers, t. ii, p. 1 12. II ne mettait aucune action dans

ses sermons, qu’il Lisait d’une voix tranquille suis inflexions. Et cependant le succès fut tel que Church a pu écrire : « Sans les sermons, le mouvement ne se fût jamais développé, ou, tout au moins, il n’eût pas été ce qu’il a été. » The Oxford movement, p. 129. Cela tient aux sujets pratiques traités et à la profonde conviction de l’orateur. Ils attirèrent surtout les jeunes étudiants de l’université. Ils furent pour plusieurs, d’après un témoin, l’une des principales influences qui ont gouverné leur vie. » Thureau-Dangin. op. cit., t. i. p. 117. Sur l’influence produite par ces sermons, cf. J. Mozley, dans un article de Christian remembrance, janvier 1846, p. 169 ; J. Schairy, John Keble, 1866, p. 12-17 ; F. Doyle, Réminiscences ami opinions, 1866, p. 145. Pour étendre leur action, Newman publia ces sermons. Un premier volume parut en mars 1834 ; onze furent édités dans la suite, exerçant même une action plus profonde que les tracts. « Ils ont changé toute la manière de sentir en matière religieuse. » Church, Occasional papers, t. ii, p. 441.

IV. L’apogée du mouvement (1836-1839). 1° Les publications. 2° La question romaine. 3° Résultats. 4° Attitude des autorités.

1° Les publications. Durant cette période les

Tracts proprement dits seront moins nombreux : d’octobre 1835 à 1841, il n’en paraîtra plus que vingt ; mais ils seront plus importants. En langage plus correct, ils étudient à fond les questions, abordent le principal sujet : l'Église catholique apostolique, qui attirera davantage l’attention sur l'Église de Rome. Avec l’approbation de Pusey et de Keble, Newman l’expose dans le Tract 71, du 1 er janvier 1836 ; dans le Tract 75, il fait l'éloge du bréviaire romain, ce qui amène plusieurs de ses disciples à le réciter ; l< Tract 85, 1838, reproduit des conférences sur la saint) Écriture dans ses rapports avec le Credo catholique : l’auteur soumet à une dure critique la théorie protestante du libre examen et lui oppose la nécessité d’une Église divinement instituée pour interpréter les vérités religieuses. Pusey, dans les Catenie Patrum, qui forment les Tracts 70, 78, 81, expose la continuité historique et l’autorité de l’ancienne Église, les doctrines de la succession apostolique, de la régénération par le baptême, de l’eucharistie… Dans le Tract 80, complété par le Tract 87, sur la prudence dans l’exposé de la vérité religieuse, Is. Williams montre combien il est inopportun et préjudiciable d’insister sur les vérités de la foi, sur la justification, devant des indifférents et des incroyants, il appuie sur l’importance de la discipline ecclésiastique, d’une vie pieuse, pour la formation du caractère religieux. Keble, parle Tract 89, sur l’interprétation mystique des Pères, considère ces derniers comme les plus sûrs interprètes de l'Écriture.

L'étude des Pères commençait à prendre de l’importance dans les préoccupations des tractariens : ils voulaient rattacher l'Église actuelle, par l’intermédiaire des théologiens du xviie siècle, à l'Église des premiers âges. D’où l’intérêt de mieux connaître les écrivains autorisés de cette période. Déjà, sous le titre Records of the Church, on en avait donné des extraits dans les Tracts. C'était insuffisant. Pusey, en 1836, lançait un prospectus annonçant une Library of Fathers of the holy culholic Church anlerior to the division of the East and West. Éditée par Pusey, Keble et Newman, dédiée à l’archevêque de Cantorbéry, elle commence à paraître en 1838. De 1838 à 1854, 38 mi lûmes étaient traduits et publiés par Pusey, Newman. Keble, Marriott, Church, Morris… Après 1854, il en parut encore une dizaine. Dans la préface, Pusey avait désigné « l’Ancien et le Nouveau Testament comme les sources de la doctrine, les Pères de l'Église comme le canal par lequel elle arrive jusqu'à nous. » En donnant ces traductions, les éditeurs entendaient bien démon-