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    1. OXFORD (MOUVEMENT I))##


OXFORD (MOUVEMENT I)). LES PREMIERS TRACTS

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donnent des extraits des théologiens anglais, des évêques Bcveridge, Wilson, Cosin, et, sous le titre Records of the Church, la traduction des premiers Pères de l'Église, Ignace, Irénée, Justin….

Newman est l’auteur principal des Tracts ; mais il est aidé par Keble, J.-M. Bowden, puis plus tard par Pusey. Froude (n° 63 publié après sa mort), Perceval, Palmer donnent leur collaboration, ainsi que de jeunes étudiants. Le but visé fut rapidement et largement atteint : l’attention était attirée sur les questions soulevées, grâce à la qualité des auteurs, aux sujets traités, auxquels on n'était plus habitué. Les esprits « sont poussés en avant ». Lett. and corr., t. ii, p. 48. On est amené à réfléchir : la doctrine de la succession apostolique, si riche en conséquences, étonne agréablement certains évêques, leur rend confiance. Cf. Church op. cit., p. 120.

Autour de Newman se groupent les meilleurs hommes de son collège, fellows comme R. Wilberforce, Th. Mozley, Fr. Rogers, J.-F. Christie, anciens élèves comme H. Wilberforce, R.-F. Wilson, W. Froude, R. Williams, S. -F. Wood, J. Bliss, J. Mozley, quelques étrangers, Woodgate, de Saint-Jean, Is. Williams et Copeland, de Trinité. Mais la sympathie pour le mouvement n'était pas universelle. Ceux dont l’enseignement était zwinglicn ou calviniste et les théologiens libéraux s’y montraient nettement opposés, commençaient à murmurer l’accusation de romanisme, ou du moins de tendance au romanisme, bien que la doctrine des Tracts fût puisée dans le Prayer book et chez les théologiens anglicans. Même parmi les amis, certains n'étaient pas satisfaits : Palmer était effrayé de leur ton ferme et péremptoire, de leur absence de preuves ; il aurait voulu les interrompre. D’autres enfin, poussés à réfléchir, jugeaient bonnes les suggestions faites, les idées émises, mais, ne voulant pas ajouter à leur responsabilité, demeuraient indifférents.

A la fin de f 834, quarante-six Tracts étaient publiés : ils furent réunis en un volume, avec un avertissement qui fait le point après cette première année d’action. Les auteurs affirment travailler au relèvement de la doctrine religieuse : Succession apostolique, Église catholique, étaient des principes d’action pour les théologiens du xviie siècle. On les a abandonnés pour des doctrines froides. Les ministres ont rejeté les vérités les plus consolantes pour les enfants du Christ ; les sacrements, représentés autrefois comme les sources de la grâce, sont délaissés. La conséquence est que ceux à qui l'Église restreint les dons de la grâce sont attirés par le méthodisme ou par l'Église romaine. Il faut rendre à la branche anglaise de l'Église du Christ sa pleine efficacité, dont elle a été privée par les théories particulières de l'époque actuelle. C’est à cela qu’invitent les auteurs des Tracts. Cf. Church, op. cit., p. 122-125.

Est-ce à dire que les tractariens eussent alors un système de doctrines bien défini ? Newman avoue lui-même qu' « ils eussent été bien embarrassés de dire quel était leur but positif… S’il leur avait fallu déterminer l’application pratique de leurs publications, rien ne leur eût été plus difficile. » Lectures on anglican difflculties, dans Thureau-Dangin, op. cit., t. i, p. 85. Cependant on peut dégager des premières publications trois idées maîtresses, opposées aux conceptions courantes : réaction contre les conceptions actuelles en s 'appuyant sur les théologiens du xviie siècle et le Prayer book, interprété dans un sens catholique, en défaisant ce qui a été fait pour portestantiser l'Église, en revivifiant certaines doctrines ; réaction contre les tendances des théologiens libéraux, en plaçant dans le dogme le fondement nécessaire de la religion et en relevant les études théologiques ; réaction contre l'érastianisme, en affirmant l’indépendance essentielle à

l'Église, société visible, gouvernée par les évêques successeurs des apôtres.

Tirer des conséquences pratiques de ces principes étaitchosepleine de difficultés. Déjà en désaccord surla séparation del'Église et de l'État, les amis d’Oxford ne s’entendaient pas sur les dogmes essentiels pour la viechrétienne : lorsque Newman affirme la présence réelle, il est blâmé par son ami. le Rev. Rickards ; s’il reproduit en tract un écrit de l'évêque Cosin contre la transsubstantiation, c’est de Froude qu’il reçoit des reproches. Il se justifie en disant qu’il veut seulement soulever la question, préparer les esprits à un tract ultérieur où Keble exposera sur l’eucharistie une doctrine High Church. Cf. Lett. and corr., t. I, p. 190 ; t. ii, p. 31-32.

Collaboration de Pusey.

Les Tracts continuèrent

en 1835 : dans le premier semestre, il en parut une vingtaine, composés pour la plupart encore par Newman. Ce dernier cependant commençait à se lasser ; ses collaborateurs ne réussissaient pas tous également. Désirant poursuivre d’autres études, il eut un instant l’idée d’interrompre leur publication : le 9 août 1835, il fait part de son intention à Froude, qui l’en dissuade. Cf. Lett. and corr., t. ii, p. 124. (".'est alors qu’une nouvelle adhésion au mouvement vient considérablement renforcer l’action des tractariens. celle d’Ed.-B. Pusey.

Fellow d’Oriel en 1824, Pusey était aussitôt entré en relations étroites avec Newman et Keble. Après deux années d'études en Allemagne (1825-1827), il posa sa candidature comme regius professor d’hébreu au collège de Christ Church à Oxford. Il dut à cette occasion se défendre auprès de l'évêque d’Oxford, le D r Lloyd, du reproche de latitudinarismeque lui avait mérité l’ouvrage qu’il venait de publier et où l’on sentait l’influence du rationalisme germanique : An historical inquiry into the probable causes o{ the national character lately prédominant in the theology of Germang. 1828. En 1829, il soutint encore les libéraux, lors de l'élection de R. Peel, contre le groupe de Newman cl de ses amis. Ces derniers cependant ne désespéraient pas le voir tourner au High Church. Cf. Lett. and corr.. t. i, p. 214. Froude ne se trompait pas en exprimant cette conviction à Newman. Dès le début, par suite de son amitié pour Newman et du travail qui se faisait en lui, il fut favorable au mouvement : il aidait à la diffusion des Tracts, les défendait contre les détracteurs ; mais il se refusait à collaborer à leur rédaction. Il en donna un cependant en 1833 sur le jeûne, mais il avait eu soin de le signer de ses initiales, pour ne pas être confondu avec les autres tractariens.

La collaboration qu’il se décida à apporter, à la fin de 1835, fut précieuse pour le parti : « Pusey, écrit Newman dans Y Apologie, nous a donné une position et un nom. Sans lui, nous n’avions pas de chances, surtout en t834, de résister sérieusement à l’attaque libérale. Mais Pusey était professeur et chanoine de Christ Church, il exerçait une grande influence, grâce à son caractère profondément religieux, à la largesse de ses charités, à son enseignement, à ses attaches de famille, à ses relations avec les autorités de l’université… Il sera désormais la tête et le centre des gens zélés qui, dans quelque partie du pays que ce soit, adopteront nos opinions. Bien plus, il donnera au mouvement une façade et le fera connaître dans le monde entier. » Church, op. cit., p. 1 33-134. Second chef du mouvement, en pleine sympathie avec le premier, bien que différant de lui à certains points de vue, il sera aux yeux du monde le chef officiel du mouvement : le newmanisme devient le puseyisme.

Son adhésion au Mouvement d’Oxford eut encore une autre importance : elle modifia la conception des Tracts. Pusey était habitué aux études théologiques