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OSEE. LE LIVRE

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les rois et leurs alliances n’y pourront rien, Israël sera dévasté comme jadis Beth-Arbel par Salman. x, 1-15.

Ce qui rend l’infidélité d’Israël plus grave, c’est que Jahvé, depuis les jours lointains de l’Egypte, n’a cessé de multiplier, à l’adresse de celui qu’il appelle son fils, les marques de son amour. Selon la juste remarque d’un commentateur moderne, le c. xi est un des plus beaux et des plus puissants oracles du livre, à condition toutefois d’en maintenir la réelle unité (Sellin). Il s’agit ici, non plus comme au c. ii, du relèvement d’Israël, mais de son éducation aux soins de laquelle Jahvé n’a point ménagé ses tendresses paternelles. Dès l’enfance de son peuple, il l’a conduit « avec des liens d’amour » pour le retenir auprès de lui, alors que déjà il s’en éloignait pour offrir sacrifices et encens aux idoles ; le rude châtiment qu’il lui inflige n’est pas pour sa perte, il ne détruira pas de nouveau Éphraïm, car un père ne saurait anéantir ses enfants ; à son appel puissant ils reviendront de la terre d’exil et habiteront dans leurs maisons, xi, 1-11.

Les trois derniers chapitres, xii-xiv, reprennent le thème général du livre : reproches, menaces, châtiment avec promesse de restauration finale. Le c. xii contient surtout des reproches entremêlés d’allusions assez énigmatiques à des événements et des personnages d’un passé lointain ; un mot résume l’attitude d’Israël vis-à-vis de Jahvé : la fausseté, la fourberie. Elle se manifeste de bien des façons : dans les alliances étrangères ; dans l’usurpation de Jacob et sa lutte contre Dieu (si toutefois les ꝟ. 4-7 et 13 ne visent pas l’opposition entre la conduite de l’Israël actuel et celle de ses ancêtres) ; dans les relations commerciales ; dans les sacrifices idolâtriques de Galgal. Tout cela a provoqué l’amertume de Jahvé qui rendra à Éphraïm son outrage, xii. 1-xiii, 1. De nouveau, le prophète parle des images de Jahvé et de la royauté pour les stigmatiser comme deux des plus graves péchés d’Israël, car ces images de Jahvé ne sont pas autre chose que les images de Baal et les rois ne seront d’aucun secours ; les unes seront détruites et les autres anéantis avec le peuple, xiii, 2-11. Désormais l’inévitable ruine est proche, « Samarie sera punie… ses habitants tomberont par l’épée. » xiii, 12-xiv, 1.

A ce sombre tableau succède, pour clore le livre, la vision réconfortante de la conversion d’Israël suivie du pardon et du salut divins : « Reviens Israël à Jahvé. » Invité au repentir, le peuple de Dieu renoncera aux péchés si souvent dénoncés par le prophète : à l’ofïrande des sacrifices impies, aux alliances païennes, au culte des images. Alors Dieu le guérira, de nouveau il l’aimera et lui rendra le salut : « Sa gloire sera comme celle de l’olivier et son parfum comme celui du Liban. » xiv, 2-9. Une remarque sur la sagesse requise pour comprendre les oracles d’Osée sert de conclusion au livre, xiv, 10.

Plan.

On a recherché selon quel ordre, logique

ou chronologique, avaient été répartis les éléments du livre d’Osée. Si un tel ordre n’est pas facile à reconstituer, il n’est pas toutefois complètement absent.

C’est d’après l’ordre logique que se trouve dans les trois premiers chapitres tout ce qui est en rapport avec le mariage d’Osée et que sont groupés dans la belle prophétie de la fin, xiv, 2-9, les espérances messianiques ; d’autres oracles, à l’intérieur du livre, sont réunis vraisemblablement d’après l’identité de situation.

Quant à l’ordre chronologique, la difficulté de dater avec certitude les différentes prophéties ne permet guère de le suivre dans le recueil d’Osée. On peut toutefois affirmer que i-m et iv, 1-v, 7, doivent être datés, selon toute probabilité, du règne de Jéroboam II, le premier de ces passages à cause de i, 5, menace contre la dynastie de Jéhu, et le second à cause de v, 1-7 sur tout ; le fait que le châtiment n’y est pas envisagé sous forme de défaite ou d’exil nous reporte à une époque où une telle éventualité était inconcevable, du temps donc du puissant Jéroboam II. Par contre d’autres passages, tels que v, 8-vi, 6, que des modernes (Alt, Sellin) datent du temps de la guerre syro-éphraïmite, ou encore vii-xi, pourraient trouver place aux premières années du règne de Manahem, les deux attentats contre Zacharie et Sellum étant supposés dans vu, 3-7 ; à moins que la situation, à laquelle il est fait allusion dans ce passage obscur, ne soit plutôt celle des débuts du règne d’Osée, le dernier roi d’Israël, alors que d’autres attentats avaient été commis contre Phaceia et Phacée et qu’Osée, l’élu de l’Assyrie, élevé sur le trône par Téglat-phalasar, envoyait des messagers au roi d’Egypte : « Ils invoquent l’Egypte, ils vont en Assyrie. » Os. vii, 11. Cf. Gry, Osée, vii, 3 sq., et les dernières années de Samarie, dans Revue biblique, 1913, p. 191-206.

Authenticité.

Du rapide aperçu du livre, donné

plus haut, se dégage, malgré le décousu des différents oracles qui le composent, la notion très nette de son unité. L’idée dominante, en effet, aux expressions multiples et variées, de l’infidélité et de l’ingratitude d’Israël envers Jahvé, se retrouve partout, aussi bien dans les reproches et les menaces que dans l’annonce du pardon et du salut. Cette unité est déjà une garantie de l’authenticité, au moins générale, que la critique s’accorde de plus en plus à reconnaître. Selon la remarque d’un des plus récents commentateurs du livre, la phase de la critique inaugurée par Wellhausen, Marti, Nowack, Hôlscher, Volz et d’autres qui considéraient comme de tardives interpolations tous les passages où figuraient des promesses de salut est bien dépassée. Sellin, op. cit., p. 21-22. A part quelques remaniements inévitables, quelques gloses, la prophétie d’Osée s’avère bien authentique, ainsi que suffiront à l’établir les observations suivantes, relatives surtout aux passages les plus communément contestés.

1. Passages où il est fait mention de Juda.

Ces passages sont nombreux ; ne faut-il y voir, comme le veulent maints commentateurs, que des éléments secondaires, tantôt de simples incidentes, inutiles à l’ensemble et souvent en désaccord avec lui, tels que i, 7 ; iv, 15 ; v, 5 b ; vi, 11 ; xii, l b, tantôt de simples parallèles établis entre Juda et Éphraïm et tout à fait étrangers au contexte, uniquement intéressé à Israël, ainsi dans vi, 4 ; viii, 14 ; x, 11 ; xii, 3 ? Le fait, en outre, que ces passages portent sur Juda des jugements fort différents n’apparaît pas non plus favorable à leur authenticité. Selon les uns, en effet, Juda est opposé à Israël pour n’être pas englobé dans la même sentence de réprobation, i, 7 ; iv, 15 ; selon d’autres, au contraire, il est jugé non moins coupable et digne d’un même châtiment, v, 5, 10, 12-14 ; vi, 4, 11 ; viii, 14 ; x, 11. N’y a-t-il pas là des traces manifestes d’un double remaniement du texte, provenant tous deux du pays de Juda : l’un, au jugement favorable, qui doit être antérieur au châtiment qui frappera Juda, donc à l’exil, l’autre, à la condamnation sévère, qui connaissait ce châtiment et se place après 586. Cf. Steuernagel, Einleitung in das Alte Testament, p. 608 ; Harper, Amos and Hosea, p. clx. A ces raisons de mettre en doute l’authenticité des passages en question s’en ajoute une dernière, tirée de la forme poétique, dont la rupture du rythme décèle l’addition tardive.

Pourquoi refuser à Osée toute mention de Juda ? Sans doute il s’intéresse plus spécialement à Israël, mais dans ses perspectives de restauration il ne peut séparer Juda d’Israël ; l’inimitié qui les sépare actuellement fera place un jour à l’antique fraternité ; dans les reproches et les menaces également, ce qu’il sait de l’autre royaume, par sa propre expérience ou les