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ORDINATIONS ANGLICANES. PRATIQUE DE L'ÉGLISE


la sainte Église catholique, en pleine communion avec l'Église d’Angleterre », présents à la conférence de Lambeth, en 1920, au nombre de 252, adressèrent, sous la signature de l’archevêque de Cantorbéry, un Appel à tous les membres de la chrétienté. Il y est fait allusion, de façon vague et générale, à la question des ordinations. Les auteurs de l’Appel se déclarent persuadés que les évêques et le clergé de leur communion sont prêts, en vue de l’union, si toutes choses par ailleurs sont réglées relativement à la doctrine et si l’accord est conclu sur un régime de discipline, à accepter des autorités des autres Églises ce que cellesci jugeraient nécessaire pour que le ministère du clergé anglican fût reconnu par elles : We are persuaded that, terms of union having been otherwise satisfactorily ajusted, bishops and clergij of our Communion would willingly accept from thèse authorities a form of commission or récognition which would commend our ministry to their congrégations as having ils place in the one famihj lije. An appeal to ail Christian people, § 8, dans Lord Halifax, The Conversations at Matines, 1921-1925, Londres, 1930, p. 65-70.

Cette attitude nouvelle de l'épiscopat anglican retint l’attention des catholiques et des anglicans présents aux Conversations qui eurent lieu à Malines, les années suivantes. Amorcée à la Première conversation, 6-8 décembre 1921, la question des ordinations fut reprise à la Deuxième conversation, 14-15 mars 1923. Présidées par S. E. le cardinal Mercier, ces deux assemblées comprenaient, du côté catholique, Mgr Van Roey, vicaire général, et M. Portai, prêtre de la Mission, et, du côté anglican, Lord Halifax, le Tr. Rev. A. Robinson, doyen du chapitre de Wells et le Rev. Fr. W.-H. Frère, de la communauté de la Résurrection.

On établit d’abord la véritable portée de la phrase de V Appel traitant des ordinations. Le Rev. A. Robinson, à la suite du P. Frère, fit remarquer que ce à quoi « on a pensé d’abord, ce n’est pas aux Églises épiscopales, mais plutôt à d’autres, comme, par exemple, aux presbytériens d’Ecosse qui prétendent avoir un ministère presbytéral venant des Apôtres, ou encore aux méthodistes, qui se servent dans une large mesure du Prayer Book de l'Église d’Angleterre. Nous les avons invités à régulariser leur ministère par une ordination épiscopale, et nous avons offert de notre côté d’accepter notre ministère auprès de leurs fidèles. L’offre ainsi exprimée en termes généraux amena la conviction que nous devions être prêts à accepter une régularisation de notre position, si les autorités des Églises d’Orient ou de Rome le jugeaient nécessaire. » Réunion du 7 décembre 1921, Lord Halifax, op. cit., p. 23-24.

Ce qui serait jugé nécessaire par les autorités catholiques, Mgr van Roey l’expose dans un sens légèrement différent de celui de l’encyclique Apostolicæ curæ, qui exigeait une réordination absolue. Il indique que la « rectification admise par la conférence de Lambeth pourrait se faire par l’imposition des mains sous condition, d’abord pour l’archevêque de Cantorbéry par le pape ou par son légat et, ensuite, par l’archevêque pour ses suffragants ». Réunion du 14 mars 1923, Lord Halifax, op. cit., p. 32. Lord Halifax aurait voulu que l’on se contentât d’une rectification par la porrection des instruments, après quelque déclaration qui mettrait hors de doute l’intention de l'Église anglicane. Mais Mgr Van Roey fit remarquer que, les ordinations anglicanes étant au moins douteuses objectivement, l’imposition des mains, tout au moins sous condition, serait jugée nécessaire. Et, comme, au témoignage du Rev. Robinson, répondant à une question du cardinal Mercier, l’archevêque de Cantorbéry se résignerait à accepter de telles conditions, on conclut que c'était dans ce sens qu’il fallait diriger les

efforts de conciliation entre catholiques et anglicans, sans rouvrir cependant, comme le Rev. Robinson en exprimait le vœu, la discussion sur la validité de ces ordinations. Le point essentiel qui ressort de cet échange de vues, c’est que désormais « il n’y aurait pas de difficulté de la part des évêques anglicans à accepter tel élément d’ordination qui paraîtrait nécessaire à l'Église romaine pour mettre hors de doute, aux yeux de tous, la validité de leur ministère (ministry) », Mémoire présenté par les catholiques présents à la conférence de Malines des Il et 12 octobre 1926. Compte rendu des Conversations de Malines de 1921192 j, dans Lord Halifax, op. cit., p. 299. Ce mémoire était présenté par Mgr van Roey, archevêque de Malines, M. Portai, Mgr Batilïol et M. l’abbé Hemmer.


III. Les arguments contre la validité des ordinations anglicanes. — Ils sont au nombre de trois, énumérés dans la bulle Aposto’licse curæ : 1. La pratique de l'Église ; 2. Le rite ; 3. L’intention.

I. la pratique de L'ÉGLISE. — Elle se forma pendant la courte restauration catholique, sous le règne de Marie Tudor, et fut confirmée par les décisions de 1684 et de 1704.

1° Sous la reine Marie (1553-1558). — Le cardinal Pôle fut désigné par Jules III pour réconcilier l’Angleterre avec le Saint-Siège ; les pouvoirs nécessaires à cet effet lui furent concédés par diverses lettres pontificales, du 5 avril 1553 au 8 mars 1554, et confirmés par une bulle et un bref de Paul IV.

Avant l’arrivée du légat en Angleterre, la reine Marie avait déjà, sans doute après entente avec celuici, pris position relativement aux clercs ordonnés sous Edouard VI. Le 4 mars 1554, elle écrivait aux évêques : « Quant à ceux qui ont été promus à quelqu’ordre, d’après le nouveau mode d’ordination, comme ils n’ont pas été vraiment ordonnés (in very deed), l'évêque diocésain… pourra, s’il le juge bon, les admettre à l’exercice du ministère, en suppléant ce quia fait défaut, may supply thaï thing which wanted in them before », Documenta ad legationem Poli speclanlia, p. 4 ; Tablel, 10 juillet 1897, p. 47. C’est bien l’Ordinal d’Edouard VI qui est en vue ici et c’est de véritables réordinations qu’il s’agit, le terme supj>ly, supplere, est bien l’expression technique, signifiant remédier à un défaut de rite. Cf. Innocent III, De sacris non iterandis, cap. Pastoralis : In talibus non est aliquid ilerandum, sed caute supplendum quod incaute fueral prœtermissum.

Mais ce sont les documents relatifs à la mission de Pôle qu’il importe surtout d'étudier. Après les avoir examinés, les auteurs du De hierarchia anglicana concluent : nihil invenimus quod nullitatem ordinationum anglicanarum recto inducat, multa quæ eas pro validis tune habitas sallem interprétative ostendant, Denny et Lacey, op. cit., p. 249. De même, dans la réponse à la bulle Apostolicæ curæ, les archevêques d’Angleterre écrivent : Et cum multi sacerdoles Edwardiani propter varias causas et præsertim ob conjugium initum inveniantur deprivati, ob defectum ordinis, quantum scimus, nulli.., Lacey, A roman Diary, p. 359-360.

Les instructions données au cardinal légat sont contraires à ces conclusions. On n’y trouve pas sans doute d’affirmation explicite de l’insuffisance de l’Ordinal d’Edouard VI ; c’est une question dont Pôle devait juger sur place, d’après les principes de la théologie ; mais il reçoit des pouvoirs pour remédier aux défauts qu’il constatera dans la hiérarchie anglicane, pour réordonner ceux dont l’ordination serait invalide.

Dans le bref du 8 mars 1554, Jules III prescrit au légat de relever de leurs censures ceux qui, ayant été promus ou ordonnés rite et légitime, sont tombés dans l’hérésie ; quant aux autres (à ceux qui n’ont pas été