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ORDINATIONS ANGLICANES. LA CONTROVERSE


Gasparri. De la valeur des ordinations anglicanes, dans la Revue anglo-romaine, t. 1, émettent des doutes sur la validité. Mgr L. Duchesne prend position pour la validité. Bulletin critique, 1894. Les anglicans Denny et Lacey publient, en latin, pour lui donner une plus grande diffusion, De hierarchia anglicana. Dissertalio apologetica, avec une préface de l'évêque de Salisbury, Londres, 1895. A Rome même, on s’intéressait à l’union des Églises : la Lettre encyclique de Léon XIII, Orientalium, 30 novembre 1894, sur l’union des Églises orientales, sa Lettre Pr.rclara, 20 juin 1894, avaient rendu plus vivant l’espoir de voir se rétablir l’unité cle l'Église.

En septembre 1894, l’abbé Portai était appelé à Rome. Il revint convaincu que Léon XIII était disposé à faire des ouvertures directes aux archevêques d’York et de Cantorbéry, s’il pouvait s’assurer des dispositions amicales des chefs de l'Église d’Angleterre. Une lettre du cardinal Vaughan, adressée à l’archevêque de Tolède et publiée dans le Times, où il affirmait la nullité des ordinations anglicanes et représentait l'Église d’Angleterre comme une secte protestante soumise au pouvoir civil, augmenta la méfiance de l’archevêque de Cantorbéry, qui doutait déjà de la réalité des dispositions favorables de Léon XIII. Cf. Vise. Halifax, Léo XIII and anglican Orders, p. 17.

Lord Halifax résolut alors de se rendre à Rome, mars 1895. Il fut reçu par Léon XIII, à qui il remit le De hierarchia anglicana et un mémorandum. Dans ce mémorandum, il rendait compte de l’entrevue que l’abbé Portai avait eue avec l’archevêque de Cantorbéry, donnait au pape l’assurance que toute proposition venant de Rome de faire discuter entre théologiens catholiques et anglicans la question des ordres serait bien accueillie, que l’envoi d’une lettre du SaintSiège aux archevêques d’York et de Cantorbéry produirait un effet excellent, que le moment de l’envoyer semblait venu, à cause de la réunion prochaine des évêques d’Angleterre, d’Amérique et des colonies, pour le treizième centenaire de la venue de saint Augustin. En fin d’audience, il fit allusion au bruit qui courait à Rome que le Saint-Office allait intervenir contre les ordinations anglicanes. Il s’agissait, en effet, des publications de l’abbé Portai et de Mgr Duchesne, que l’on disait déférées au Saint-Office. Cf. dom A. Gasquet, Leaves from my Dianj, p. 24-25. Léon XIII répondit qu’il n’en serait rien ; et. faisant allusion au De hierarchia anglicana, il dit qu’il étudierait lui-même la question. Une nouvelle audience était accordée à l’abbé Portai et à Lord Halifax, le 18 avril ; trois jours après, était publiée la Lettre Ad Anglos, 20 avril 1895, adressée, non pas aux archevêques d’York et de Cantorbéry, mais au peuple anglais. Le cardinal Vaughan avait réussi à détourner le pape de suivre le conseil que lui avait donné Lord Halifax. Cf. dom Gasquet, op. cit., p. 9 sq.

Son influence fut également prépondérante pour décider le pape à nommer une commission d’enquête, pour l'étude des ordinations anglicanes. Au mois de mai, Léon XIII était encore indécis ; il hésitait à faire examiner officiellement la question ; il était plutôt disposé à apporter, par bienveillance, un changegement à la pratique alors en usage. Mais le cardinal Vaughan pressa le souverain pontife de ne « rien changer à une pratique usitée dans l'Église depuis trois siècles, sans un examen approfondi et sans la coopération des représentants de l'Église catholique en Angleterre. » Dom Gasquet, op. cit., p. 35-37.

L’enquête à Rome.

A la fin de 1895, l’abbé

Portai que, sur le désir du pape et du cardinal Rampolla, ses supérieurs avaient fait venir à Paris, pour qu’il pût s’occuper plus facilement des questions an glicanes, commençait la publication de la Revue angloromaine, 15 décembre, qui devait donner un certain nombre d’articles sur les ordinations anglicanes. Enfin, au début de 1896, on apprit que Léon XIII avait décidé de nommer une commission pour enquêter sur la validité des ordres de l'Église anglicane. Le cardinal Vaughan avait envoyé à Rome le chanoine Moyses, dom Gasquet et le franciscain Flemming, chargés de défendre la position des catholiques anglais, opposés à la validité de ces ordres, comme à une réunion en corps de l'Église d’Angleterre à l'Église romaine ; cf. dom Gasquet, op. cit., p. 35. De l’autre côté, Rome désigna Mgr Gasparri, Mgr Duchesne et le P. de Augustinis, connus pour être favorables à leur validité. On leur adjoignit plus tard le P. Scannel et le P. J. Calasanzio de Llevaneras. Mgr Gasparri, afin de pouvoir se mieux documenter sur le côté historique de la question, demanda l’autorisation de communiquer par télégraphe avec Lacey, l’un des auteurs du De hierarchia. On jugea préférable de faire venir ce dernier à Rome, accompagné du P. Puller, de la Société de Saint-Jean l'Évangéliste de Cowley.

Ce n'était pas tout à fait ce qu’avaient espéré les promoteurs du mouvement qui auraient désiré l’institution d’une commission composée de catholiques et d’anglicans, ces derniers représentés par les évêques de Salisbury et de Peterborough ; cf. dom Gasquet, op. cit., p. 25. Néanmoins l'Église anglicane était représentée officieusement par Lacey et Puller. Sur la demande d’un des cardinaux qui devaient s’occuper de la question, Lacey composa un petit opuscule. De re anglicana, destiné à éclairer celui-ci sur l’histoire et la doctrine de l'Église anglicane qu’il ignorait. Dom Gasquet et le chanoine Moyses produisirent immédiatement, pour être distribué aux cardinaux, une Riposta ail' opuscolo De re anglicana ; cf. Lord Halifax, Léo XIII and anglican Orders, p. 360-367 ; Lacey, A roman Dianj, c. vii, The pamphlet De re anglicana and ils crilics. p. 195-249.

Les douze sessions de la commission eurent lieu du 24 mars au 7 mai 1896 ; cf. dom Gasquet, op. cit., p. 45-63. Il est difficile de dire ce qui s’est passé à la commission, le secret ayant été imposé aux consulteurs. On a certainement étudié de près le côté historique, puisqu’on a fait venir à Rome Lacey et Puller. Lord Halifax reproche à la commission d’avoir consacré la plus grande partie des séances à la discussion d’un point d’histoire, aujourd’hui incontestable, le sacre de Barlow, et de n’avoir examiné que superficiellement ce qui était essentiel et discutable, la validité des formules contenues dans l’Ordinal d’Edouard VI et l’intention des évêques consécrateurs, op. cit., p. 28-29 ; il s’en prend aux défenseurs de la validité des ordinations anglicanes, à qui aurait fait défaut « une information suffisamment pleine et exacte, sur l’histoire du xvi c siècle et les opinions théologiques en honneur à cette époque, information qui leur eût été nécessaire pour apprécier justement le rite anglican. » Op. cit., p. 29. L’ordre des discussions donné par dom Gasquet, op. cit., p. 45-63, et ce que l’on sait de la compétence historique et théologique de Mgr Gasparri, de Mgr Duchesne et du P. de Augustinis suffisent pour montrer combien ces allégations sont inexactes et injustes. Ces trois consulteurs inclinaient vers une réponse favorable aux ordres anglicans, et leurs mémoires furent rédigés dans ce sens. Les anglicans pouvaient croire la partie gagnée ; ils considéraient au moins comme impossible une déclaration de nullité absolue. Mais, « c’est quelquefois ce qui est impossible qui arrive », fit observer Scannel à l’abbé Portai. Lacey, op. cit., p. 70. Et. de fait, la thèse de la nullité, soutenue notamment par dom Gasquet. qu’inspirait le cardinal Vaughan. devait finir par triompher