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ORDRE. LA THEOLOGIE MODERNE


oder die Bischofsweihe ein Sacrament, Paderborn, 1883 ; Zardetti, Die Bischofsweihe, Einsiedeln, 1889.

Le ministre de l’ordre.

La question du ministre

ordinaire du sacrement de l’ordre est résolue conformément à l’enseignement traditionnel, sanctionné par le concile de Trente, sess. xxiii. can. 7, et par la discipline de toutes les Églises orientales. Quod ministrum sacramenti çrdinis esse solum episcopum, ut in tota Dei Ecclesia, ita et apud Orientales pro irrefragabili fundamenlo semper habitum est. Denzinger, Rit. orient., t. i, p. 141. Voir sur cette question du ministre ordinaire, Yasquez, disp. CCXLIII, c. i, et Tanner, disp. VII, c. iii, dub. 2, lequel ajoute cette remarque opportune : « dans tout royaume, il appartient au prince seul de distribuer les emplois publics ; or, dans l'Église, les évêques sont comme les princes. » Au point de vue de la licéité, le ministre ordinaire de l’ordre est l'évêque propre (voir plus loin, col. 1400). Mais sur cette doctrine générale se greffent des questions secondaires relatives au ministre extraordinaire de l’ordre et au ministre de l'épiscopat.

1. Le ministre extraordinaire de l’ordre.

a) Ordres mineurs et sous-diaconat. — La question du ministre extraordinaire, en ce qui concerne les ordres mineurs et le sous-diaconat, est résolue conformément à la doctrine des scolastiques avant le concile de Trente. Autrefois, un évêque pouvait donner au simple prêtre la délégation nécessaire à cet effet. Voir les témoignages dans Hallier, op. cit., part. II, sect. v, c. i, a. 2, n. 9 sq. Mais ce pouvoir a été retiré aux évêques par Grégoire IX, Décrétai., t. III, tit. xl, c. ix. Aussi les théologiens enseignent-ils communément que seul le pape peut donner à ce sujet une délégation : Vasquez, disp. CCXLIII, c. iv, n. 73 ; Hallier, loc. cit., a. 3, n. 9 ; Tanner, disp. VII, q. ni, dub. 2 ; Wirceburgenses, De ordine, n. 145. Le concile de Trente est formel en ce qui concerne le pouvoir qu’ont les abbés de conférer à leurs sujets les ordres mineurs. Sess. xxiii, c. x, de reformat. S’il y a eu quelques hésitations pour l’assimilation du sous-diaconat aux ordres mineurs, elles sont aujourd’hui dissipées ; cf. Gasparri, De sacra ordinatione, t. ii, n. 941 sq.

b) Prêtrise. — On ne saurait s’arrêter à l’hypothèse émise par certains auteurs, très rares, d’une délégation pontificale accordant à un simple prêtre le pouvoir de conférer la prêtrise. L’argument des ordinations faites par les chorévêques n’a aucune valeur, beaucoup de chorévêques ayant possédé véritablement le caractère épiscopal ; voir Évêques, t. v, col. 1693. On prête cette opinion à Auriol ; il n’est pas certain que cet auteur l’ait tenue : il écrit simplement : Minister sacramenti ordinis est episcopus, licet ex dispensalione possit esse sacerdos. In IV" m Sent., dist. XXV, a. 1. Il ne dit pas, en effet, que le prêtre peut être par délégation ministre de tous les ordres. Vasquez s’appuie sur Auriol pour émettre l’hypothèse que nous avons soulignée, loc. cit., n. 39. Mais cet auteur se laisse guider par la considération d’un fait, dont nous allons parler.

c) Diaconat. — C’est la doctrine commune de tous les théologiens, après comme avant le concile de Trente, que le simple prêtre, même par délégation pontificale, ne peut administrer le diaconat. Mais, en fait, Vasquez et quelques autres soutiennent que pareille délégation a été donnée jadis en quelques cas. Il s’agit, en l’espèce, très particulièrement de la bulle d’Innocent VIII (1489) accordant aux abbés cisterciens le pouvoir de conférer le sous-diaconat et même le diaconat à leurs sujets. Bien plus, récemment, dom Fofi a publié, dans la Scuola cattolica de Milan (mars 1924), une bulle de Boniface IX (1400) accordant à l’abbé de Saint-Osithe, en Angleterre, et à ses successeurs le pouvoir d’ordonner leurs sujets sous diacres, diacres et même prêtres. L'évêque de Londres ayant réclamé, voyant en ce privilège un attentat à sa juridiction, le pouvoir fut retiré en 1403. Les textes sont aux archives vaticanes, Reg. lat. 81, fol. 264, pour la concession ; Reg. lat. 108, fol. 132, pour la révocation.

Sur la bulle d’Innocent VIII, on s’accorde généralement à en admettre l’authenticité ; mais il s’agit de savoir si la concession relative au diaconat s’y trouve. Le cardinal Gasparri déclare avoir inspecté le document aux archives vaticanes et n’avoir pas trouvé mention du diaconat. De sacra ordinatione, t. ii, n. 798. Voir sur cette bulle et sa portée Ch. Pesch, op. cit., n. 667-668 ; Tixeront, L’ordre et les ordinations, p. 192 sq., qui, tout en inclinant vers l’authenticité de la bulle, fait opportunément remarquer à la suite de L. Pastor, Hist. des papes, tr. fr., t. v, p. 330, 340, « qu’il existait à Borne, précisément en 1489, une officine fabriquant de fausses bulles pontificales et retirant de ce commerce des profits scandaleux. » Même en admettant et l’authenticité de la bulle’et la concession, la question dogmatique demeurerait entière, ce serait « une discipline momentanément autorisée par l'Église et qui ne préjuge pas la question de droit. » J. Bivière, art. Ordre, dans le Dictionnaire pratique des connaissances religieuses, t. v, col. 134. C’est d’ailleurs la solution donnée par tous les théologiens qui, depuis Vasquez, se sont occupés de cette bulle. Un de ceux qui ont le mieux discuté sur ce point la question de droit est Noël Alexandre, op. cit., De sacramento ordinis, p. 764.

Quant à la bulle de Boniface IX, si elle était authentique et comportait la concession exorbitante qu’on pense y trouver, la solution serait la même ; cf. Hugon, Revue thomiste, 1924, p. 490 sq. Mais la question serait de savoir s’il ne convient pas de donner un sens différent à la bulle. Dans les Esludios ecclesiasticos, avril 1925, le P. J. Puig de La Bellacasa pense qu’il s’agit, non pas du pouvoir physique qui serait donné à un simple prêtre de conférer le diaconat et le sacerdoce, mais d’une autorisation accordée à la communauté pour que les ordinations soient faites dans le monastère même, sans passer par la juridiction de l'évêque de Londres. On comprend alors plus facilement le sens de la réclamation de ce dernier. La bula « Sacræ religionis » de Bonifacio IX. Cf. Hugon, Ulruin possit summus pontifex delegare simplicem presbylerum ad conferendum diaconatum vel eliam presbyteralum, dans Divus Thomas, de Plaisance, janvier 1905, p. 100-104.

A propos des deux bulles, on trouvera un bon exposé de toute la question dans L’Ami du clergé, 1 926, p. 468469 ; 1928, p. 370-373.

2. Le ministre de l'épiscopat. — On a vii, col. 1248, que dès la plus haute antiquité, trois évêques furent requis pour la collation de l'épiscopat. Les théologiens modernes, recevant cette discipline traditionnelle, se demandent si la présence des trois évêques et leur participation au sacre sont nécessaires pour la validité du sacrement. Trois réponses ont été faites.

La première opinion est celle de J. Morin, De sacris ordinal., part. II, exerc. iv, c. n ; de Gonet, De ordine, disp. IV, a. 3 ; de Tournely, De ordine, q. vi, a. 1, § De ministro ordin. episcopalis, concl., qui déclarent la participation des trois évêques (Tournely dit : au moins de deux) tellement indispensable qu’il n’est pas probable même qu’une dispense du pape y puisse suppléer. Les faits qu’on oppose à cette thèse absolue sont purement et simplement révoqués en doute. — La deuxième opinion tient pour valide la consécration donnée par un seul évêque, lorsqu’elle se fait avec permission expresse du pape. Ainsi Cajétan. Opusc. de potestate papie. Bellarmin, De con-