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ORDRE. ESSAIS DE THÉOLOGIE POSITIVE


doce ; le nom n’en est même pas prononcé et il n’y est pas question de sacrifiée à offrir ; 5° les laïques peuvent consacrer l’eucharistie ; au début de l'Église, la Cène était célébrée par les pères de famille ; plus tard, en l’absence de prêtre, il fut licite aux laïques de la consacrer et de la distribuer ; 6° au temps de Clément, les prêtres et les évêques étaient des laïques révérés comme la partie la plus honorable du peuple chrétien : 7° les vaudois et Luther ont eu raison de ne pas conserver le sacerdoce, et ont cru avec raison que les laïques justes et fidèles peuvent faire tout ce qu’il est nécessaire de. faire dans l'Église, ayant reçu pour cela la vraie imposition des mains, celle du presbytérium, c’est-à-dire du sénat laïque et non ecclésiastique ; 8° les laïques sont tous prêtres, comme l’enseigne saint Pierre, I Pet., it, 9, et, en enseignant ce point, Saumaise se prétend (avec raison) d’accord avec vérius, les vaudois et Wiclef ; 9° il n’y a pas de chef visible dans l'Église : la papauté est une tyrannie ; 10° l'évêque ne peut infliger aucune peine ou excommunication : l'Église seule a ce pouvoir ; l'évêque n’est le juge ni des bons ni des mauvais ; 11° si JésusChrist a donné aux apôtres le pouvoir de lier et de délier, là n’est pas la juridiction des évêques ; elle n’existe qu’au for interne ; 12° l'évêque a été institué pour gouverner l'Église en vue du bien commun, par une nécessité sociale ; mais aujourd’hui la tyrannie épiscopale est devenue telle que le mal qu’elle provoque est plus considérable que le bien qu’on attendait de l’institution de l'épiscopat. — 11 était bon de noter ici la portée apologétique de l'œuvre de Petau.

Dans les Dissertationum ecclesiasticarum libri duo, Petau aborde, au t. I, la question des évêques, de leur juridiction et dignité, et prouve contre les protestants, en interrogeant les documents de la tradition, que l'épiscopat n’est pas seulement une dignité, mais qu’il est un pouvoir véritable. Le c. i du 1. II traite des diacres et des degrés de la hiérarchie. Le reste du 1. II n’intéresse pas le sacrement de l’ordre.

2. Défense de la discipline par Thomassin : Vêtus et nova Ecclesiæ disciplina. — Nous ne pouvons que signaler la portée de cet ouvrage, quant à la défense de la discipline « nouvelle » de l'Église, par rapport à l’ancienne, relativement aux règles de vie et aux défenses comme aux obligations imposées au clercs, aux irrégularités, aux obligations des évêques et particulièrement à la résidence, aux élections épiscopales et aux consécrations. A noter tout particulièrement, t. II, part. I, c. xxix-xxxvi, les intéressantes considérations relatives aux sous-diacres et aux ordres mineurs.

L’histoire des liturgies anciennes et orientales.


1. Jean Morin.

Au premier rang des initiateurs,

il faut citer l’oratorien Jean Morin (+ 1659). Dans son ouvrage capital, Commentarius de sacris Ecclesix ordinalionibus, Paris, 1655, Morin expose les différentes formules d’ordinations dans les rites de l'Église universelle. Cette étude, où les rites orientaux sont mis nécessairement en parallèle avec le rite romain, fait ressortir les différences dans la matière et dans la forme du sacrement. Morin a le grand mérite d’avoir, le premier peut-être, esquissé la doctrine théologique seule capable de rendre compte des divergences qu’il signale. Voici comment il s’exprime : « Dans le rite de l’ordination, certaines choses sont d’institution divine, qui conviennent à tout ordre sacré et partout ; telle, par exemple, l’imposition des mains et l’oraison appropriée, que nous retrouvons dans la sainte Écriture et que la pratique de l'Église a toujours observée. D’autres choses sont d’institution ecclésiastique : elles peuvent sans doute être changées, et être observées diverse ment selon les divers temps et les divers lieux ; mais cependant, elles présentent une si grande importance que, tant que l'Église ne les a pas révoquées ou abrogées, leur omission rendrait l’ordination non seulement inconvenante et illicite, mais même invalide et nulle, ne produisant ni son effet, ni la grâce. Toutes ces choses et ces conditions affectent et déterminent la matière du sacrement, de telle sorte que leur défaut rend la matière inapte pour l’ordination. Or, ces conditions peuvent affecter aussi bien le prélat ordinand que le sujet ordonné. Ainsi donc, j’opinerais volontiers que l'Église peut définir dans quelles conditions l'évêque qui fait l’ordination doit user de son pouvoir, de quelles qualités doit être orné le candidat à l’ordination, pour pouvoir recevoir validement l’ordre sacié, de telle sorte que, si l'évêque ou l’ordinand négligent ces prescriptions de l'Église et agissent à leur encontre, l’ordination sera nulle et vaine et qu’elle devra être réitérée pour produire son effet. » A la lecture de cette déclaration, on saisit immédiatement que Morin entend justifier la réitération des ordinations faites jadis par certains hérétiques, et que l'Église a déclarées nulles. On traitera ce point à Rf.ordination. Mais, si, en ce qui concerne les réordinations de ministres hérétiques, la thèse de Morin ne peut êtreapprouvée, en ce qui concerne la détermination par l'Église d’une matière et d’une forme que Jésus-Christ n’aurait indiquée que d’une façon générale, sans descendre aux particularités, cette thèse a fait école et a recueilli le suffrage de nombreux théologiens. Aussi, toute la suite de la déclaration mérite-t-elle, d'être retenue. « De ce sacrement, il faut analogiquement dire ce qu’on dit de la pénitence et du mariage, dont les matières ont reçu fréquemment, de l’autorité de l’Eglise, certaines restrictions qui entraînent, en certaines circonstances, la nullité même du sacrement… D’où il suit qu’en des Églises différentes, les matières de ces sacrements peuvent être différentes et qu’ainsi le mariage célébré, l’absolution donnée, l’ordination conférée en certains lieux sont nuls et sans effet, alors qu’en d’autres lieux ces sacrements, donnés dans les mêmes conditions et les mêmes circonstances, seraient valides, si ces circonstances et conditions y sont considérées, par la pratique même de l'Église, comme substantiellement requises pour la validité. » Op. cit., part. II, exercit. v, c. ii, p. 82-84. La théorie n’est encore qu'ébauchée ; elle a fait fortune. Voir col. 1324, 1332.

2. Mabillon et les bénédictins.

Les travaux des mauristes sur les liturgies antiques ont contribué puissamment à préciser la théologie du sacrement de l’ordre, tout au moins quant à la connaissance des rites essentiels à ce sacrement.

Mabillon est un des grands initiateurs de ce mouvement, par la publication des Ordines romani et du commentaire qu’il y a joint. La série complète des Ordines publiés par Mabillon est de quinze, dans le t. n de son Muséum italicum, édité d’abord en deux vol. à Paris, 1687, puis inséré dans la P. L., t. lxxviii. Ceux qui intéressent le sacrement de l’ordre sont YOrdo viii, De ordinibus sacris ; YOrdo ix, De gradibus rornanæ Ecclesiæ.

De Mabillon, il faut rapprocher dom Martène, dont l’ouvrage capital, en matière liturgique, est le traité De antiquis Ecclesiæ ritibus, en quatre livres, Rouen, 1700, mine extrêmement riche de documents sur les rites anciens de la liturgie catholique. Du même, De antiquis monachorum ritibus, Lyon, 1690. Il faut citer également dom Hugues Ménard, l'éditeur et annotateur du sacramentaire grégorien, P. L., t. lxxviii. Toutefois, le texte grégorien, en cette édition, n’est peut être pas tel qu’on puisse s’y fier absolument. On préfère le texte antérieurement