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NESTORIENNE (L’EGLISE) SOUS LES SASSANIDES


Après trente-huit ans de règne, Khosrau II fut assassiné ; son lils Siroi, qui aurait été chrétien en secret, le remplaça sur le trône. Il s’empressa de faire la paix avec Héraclius et permit aux chrétiens de se choisir un catholicos. P. O., t. xiii, p. 551 [231 ]. Ancien élève de l'école de Nisibe, d’où il était sorti par aversion pour l’enseignement de Hënânâ, Iso’yahb était devenu évoque de Balad, bientôt exilé par Khosrau If. Nous ne savons rien sur les circonstances de son élection, pas même si elle fut réalisée avant la mort de Siroi. Les troubles, qui suivirent la mort de celui-ci après six ou huit mois de règne, ne lui laissèrent pas l’opportunité de réunir un synode. L’ambassade auprès d’Héraclius, dont il fut chargé par la reine Bôrân en 629, si elle eut quelque succès diplomatique et lui gagna la faveur des monarques, eut pour conséquence de lui rendre très difficile l’exercice de son pontificat. Il avait remis au basileus une confession de foi rédigée en des termes conciliants, avait été admis à la communion et avait accepté de célébrer les saints mystères avec participation du monarque, sans nommer les trois docteurs, Diodore, Théodore et Nestorius, pourvu qu’on ne l’obligeât point à mentionner Cyrille. Mais plusieurs évcques, et surtout Barsaumâ de Suse, lui reprochèrent amèrement cette tentative de rapprochement -avec les chalcédoniens. P. O., t. xiii, p. 561-579 [241-2501.

Bôrân se retira peu après le retour de son ambassadeur, et les années suivantes s'écoulèrent dans une série de compétitions pour la couronne de Perse. Lorsque Yazdegerd III prit le pouvoir en 632, il était trop tard pour galvaniser l’empire et le dresser contre l’Islam, qui l’attaquait à la frontière du désert. En juillet 637, la capitale des Sassanides tombait aux mains des Arabes.

Voir sur l’ensemble de cette période : Chronique de Séert, dans P. O., t. vii, p. 128-201 [36-109 Jet t. xiii, p. 437-582 [117-262] ; Mari, p. 46-61, trad., p. 40-54 ; Amr et Sliba, p. 35-54, trad., p. 21-32 ; Barhébneus, Chronicon ecclesiaslicum, t. iii, col. 81-128 ; une chronique anonyme, composée par un nestorien entre 670 et 680, a été publiée par I. Guidi, Un nuovo ieslo siriaco sulla storia degli ultimi Sassanidi, dans les Actes du huitième congrès international des orientalistes, tenu en 1889 à Stockholm et Christiania, Leyde, 1891-1893 ; réimprimée par le même avec traduction latine sous le titre de Chronicon anonymum, dans Corpus scriptorum christianorum orienlalium, Scriptores syri, ser. III, t. iv, p. 15-39, trad., p. 13-32 ; préférer la traduction allemande par Th. Nôldeke, accompagnée de notes excellentes, Die « on Guidi herausgegebene syrische Chronik, dans Sitzungsberichte der k. Akademie der Wissenschaften, phil. hist. Classe, Vienne, 1893, t. cxxviii, IX Abhandlung ; J. Labourt, Le christianisme…, p. 154-246 ; W. A. Wigram, An introduction…, p. 172-264, 299-312. Sur les causes de la décadence de la dynastie sassanide et la situation des chrétiens dans leur empire, très bon exposé de L. Cætani : Cause délia decadenza dell’impero Sassanida et I popoli crisliani sottomessi ai Sassanidi, dans Annali dell' Islam, Milan, 1907, t. n b, p. 861-S82 et 890-912.

Le monaclusme en Perse.

On a vu dans les

cinq paragraphes précédents les vicissitudes de l'Église officielle sous les monarques sassanides. Après la violente persécution de Sapor IL dirigée surtout contre le clergé, la chrétienté persane passa tout d’un coup, au début du ve siècle à un régime qu’on aurait pu croire concordataire, mais qui fut bientôt un régime d’asservissement. Il avait été entendu, lors de l’ambassade de Marouta de Maypherqat, que le Roi des rois devenait le protecteur de l'Église en Perse comme l'étaient, dans l’empire romain, les successeurs de Constantin. Mais les circonstances n'étaient pas identiques : les autocrates sassanides avaient une religion officielle, et cette religion n'était pas le christianisme. Leurs prêtres ne toléraient d’ailleurs aucun syncrétisme, proscrivaient de tout

leur pouvoir les autres religions. D’autre part, les basileis, si personnels qu’ils voulussent être, étaient liés par les habitudes juridiques de Rome, tandis que rien ne venait limiter l’autorité du monarque persan, dont les édits étaient immédiatement exécutables. De là cette perpétuelle inquiétude de la chrétienté persane, la mise hors la loi de tout néophyte venu du mazdéisme, l’option souvent offerte aux chefs de l'Église entre des actes que leur conscience réprouvait et la prison, l’exil ou la mort.

On s'étonne que dans de telles conditions, avec un lias clergé marié et un haut clergé en proie à de nombreuses dissensions, le christianisme ait pu faire des progrès. Mais, de même que dans le haut Moyen Age occidental, au milieu des barbares lentement christianisés, les moines surent maintenir l’idéal de sainteté chrétienne, de même en Perse ils furent à la fois les mainteneurs du dogme et de la morale, et les missionnaires convertisseurs.

L’origine de l’institution monastique en Perse est inconnue. Au ive siècle, il y avait à côté des simples fidèles des « fils » et « filles du pacte », bnaï qiijâmâ, dont les « démonstrations » d’Aphraate et les actes des martyrs nous révèlent l’existence. Ils étaient consacrés à Dieu, vivaient dans le célibat, s’adonnaient à la prière, à la lecture, à l'étude, jeûnaient fréquemment ; fils et filles du pacte ne devaient pas cohabiter. Il est impossible de déterminer exactement quelle était la place occupée par ces voués dans l’organisa Mon ecclésiastique. La distinction entre clercs et « lils du pacte » n’apparaît pas dans cei tains textes. Le premier écrivain chrétien de Perse, Aphraate ou Jacques, surnommé le Sage persan, était « fils du pacte » ; or il semble avoir réuni la dignité épiscopale et les fonctions de chef de monastère. Sa sixième démonstration est une exhortation aux « lils du pacte », édit. Parisot, dans Palrologia sijriaca, part. I, t. i, col. 239-312 ; cf. p. xxiv, lxv.

Cette institution monastique autochtone, à côté de laquelle existaient des ascètes isolés ou ermites, auxquels la région montagneuse qui borde le plateau iranien fournissait des « déserts » en abondance, ne put guère rester sans subir l’influence de l’ascétisme égyptien, après que Marouta de Maypherqat eut essayé de fonder solidement l’unité de foi et de pratiques, entre les deux Églises grecque et perse. La tradition postérieure place à ce moment l’arrivée dans la région de Nisibe d’un Égyptien, Eugène (Awgin), originaire de Clysma, près de Suez, formé au cénobilisme pakhomien, qui aurait émigré avec soixantedix compagnons. M. Labourt a discuté avec beaucoup d’acribie, Le christianisme…, p. 302-315, les traditions nestoriennes du cycle eugénien et n’en laisse subsister à peu près rien. Il estime que le monastère de Mar Eugène, probablement monophysite avant le vuie siècle, aurait été colonisé par les nestoriens, après une période d’abandon, entre 750 et 800, la légende relative à Mar Eugène comme fondateur du monachisme oriental se développant dès lors pour atteindre son plein développement vers le commencement du xie siècle, époque à laquelle de nombreux monastères revendiquent comme fondateur un disciple immédiat de Mar Eugène.

Le fait que la Chronique de Séert connaît aussi l’histoire d’Eugène et de ses disciples, ne fournit pas d’argument à opposer à ceux de M. Labourt, puisqu’elle appartient au début du xi° siècle. Elle donne naturellement une notice sur Mar Eugène et cite parmi ses compagnons Yonan, Sari, Jean, Ahâ et Sallità, P. O., t. iv, p. 234-236 [24-6] ; t. v, p. 250-252 [138150], 259 [147 ]. Elle, relate en outre d’autres fondations distribuées dans la trame du récit, selon l’ordre chronologique. C’est ainsi qu’avant la fin du iv siècle, on