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ONTOLOGISME. INTERVENTIONS ROMAINES


vu les rapports des examinateurs, que l’ontologisme de Malebranche fut la raison ou l’une des raisons de ces condamnations.

2. Nous sommes mieux renseignés sur la genèse du décret du 14 janvier 1852, prohibant de Gioberti les Opéra omnia, quocumque idiomate exarata. Annales, février 1852, p. 155, 158. En effet, un décret du 30 mai 1849 avait déjà condamné Le jésuite moderne de Gioberti, conjointement à deux ouvrages de Rosmini : Des cinq plaies de la sainte Église et La constitution selon la justice sociale. Rosmini s’était soumis, mais Gioberti avait gardé le silence. Ibid., p. 286287.

Le 4 octobre 1849, les archevêques de Ravenne, Ferrare et Imola, les évêques de Comæchio, Fænza, Cervia, Romani et Césène, réunis à Imola pour la célébration du synode provincial, écrivirent au pape « une longue lettre, dans laquelle, en présentant à Sa Sainteté un volume intitulé : Eximen du système philosophique et théologique de V. Gioberti, par T. Jaselli, ils expriment l’espoir de pouvoir hâter l’examen et la critique de toutes les œuvres de ce philosophe. » Annales, janvier 1850, p. 72. Le pape leur répondit aussitôt qu’il avait envoyé copie de la lettre à la Congrégation de l’Index « afin qu’elle procédât ainsi qu’il lui appartient. » P. 73. La procédure adoptée en cette circonstance fut exceptionnelle, au dire du cardinal d’Andréa, préfet de la Congrégation de l’Index : « L’histoire de cette dernière Congrégation, écrit-il, dans une lettre à Antonelli, secrétaire d’État, ne présente aucun cas dans lequel les questions agitées devant elle aient été ensuite portées à la discussion devant le Saint-Office, excepté le cas de l’examen des œuvres de Gioberti, qui, à l’instigation des jésuites, fut faite par les deux Congrégations réunies ; mais il faut observer que la cause était vierge… » Cf. Annales, mars 1862, p. 173. — Notons ici, car la chose en vaut la peine, que l’examen des ouvrages philosophiques de Rosmini par la Congrégation de l’Index aboutit, le 3 juillet 1854, à une sentence d’absolution : dimittantur opéra Anionii Rosmini Serbati. L’histoire de cette affaire est racontée en détail par YAraldo de Lucques, 30 septembre 1857, reproduit par les Annales, juillet 1860, p. 79-83. « Cette sentence n’a été rendue publique que le 20 juin 1876, par un Monitum adressé à V Osservatore cattolico de Milan, qui l’a publié dans son n° 147 de la même année. » Trullct, Examen des doctrines de Rosmini… trad. par Silvestre de Sacy, Paris, 1893, p. vin. Ce livre du P. Trullet, conventuel mineur, consulteur de la Congrégation de l’Index, n’est autre chose que l’avis motivé émis par lui dans la cause en question, avis qui entraîna finalement la décision.

3. Parmi les ouvrages ontologistes de Mamiani mis à l’Index, signalons : Dialoghi di scienza prima el Dell’ontologiae del metodo, prohibés le 12 janvier 1850 ; Compendioe sintesi délia propria filosofia, ossia nuovi prolegomeni ad ogni présentee futura metafisica ; Confessioni di un metafisico et Le medilazioni cartesiane rinnovate nel secolo XIX, condamnés le 14 février 1881.

4. Enfin les Studi filosofici de Tommaseo étaient inscrits à l’Index de 13 septembre 1842, et Y Essai sur l’histoire de la philosophie en Italie au dix-neuvième siècle, de L. Ferri, le Il décembre 1874.

2° Le décret du Saint-Office du 18 septembre 1861. — 1. Le texte du décret.

Nous rempruntons à Zigliara, t. iii, p. 170-172, ainsi que la traduction française qui l’accompagne :

A sanct : e romance et uniIl a été demandé a la

versalis Inquisitionis Consainte congrégation de l’In gregatione postulatum est quisition romaine et univer 1 1 1 r mu) sequentes proposiselle, si l’on pouvait ensei tiones liilo tradi possent :

I. Immediata Dei cognitio, habilualis saltem, intellectui humano essentialis est, ita ut sine ea niliil cognoscere possit ; si quidem est ipsum lumen intelligibile.

II. Esse illud quod in omnibus, et sine quo nihil intelligimus, est esse divinum.

III. Vniversalia a parle ici considerata a Deo realiter non distinguuntur.

IV. Congenita Dei tanofuam entis simpliciter notitia omnem aliam cognitionem eminenti modo involvit, ita ut per eam omne eus, sub quocumque respectu cognoscibile est, implicite cognitum habeamus.

V. Omnes ali : e idese non sunt nisi modificationes iderc qua Deus tanquam ens simpliciter intelligitur.

VI. Res creatse sont in Deo tanquam pars in toto, non quidem in toto formali, sed in toto infinito, simplicissimo, quod suas quasi partes absque ulla soi divisione et diminutione extra se ponit.

VII. Creatio sic explicari potest : Deus ipso actu speeiali quo se intelligit et vult tanquam distinctum a determinata creatura, homine v. g., creaturam producit.

gner en sécurité les propositions suivante-- :

I. I.a connaissance immédiate de Dieu, au moins habituelle, est essentielle à l’intellect humain, de sorte que sans elle il ne peut rien connaître, attendu que cette connaissance est la lumière intellectuelle elle-même.

II. Cet être que nous connaissons en toutes choses et sans lequel nous ne connaissons rien, est l’être divin.

III. Les universaux considérés objectivement ne sont pas réellement distincts de Dieu.

IV. La connaissance innée de Dieu, comme être simplement dit, renferme éminemment toute autre connaissance, tellement que par elle tout être, sous quelque aspect qu’il soit connaissable, nous est implicitement connu.

V. Toutes les autres idées ne sont que des modifications de l’idée par laquelle Dieu est connu comme être simplement dit.

VI. Les choses créées sont en Dieu comme la partie dans le tout, non cependant dans un tout formel, mais dans un tout infini, très simple, qui pose ses quasiparties hors de lui, sans aucune division ou diminution de lui-même.

VIL La création peut s’expliquer ainsi : Dieu par le même acte spécial par lequel il se connaît et se veut comme distinct de la créature déterminée, de l’homme par exemple, produit la créature.

Le mercredi, 18 septembre 1861, dans la congrégation générale tenue au couvent de Sainte-Marie supra Minervam, les cardinaux, inquisiteurs généraux : prwhabito voto DD. consullorum, omnibus et singulis propositionibus superius enunciatis mature perpensis, proposito dubio responderunt : Négative.

2. Le sens général du décret : vise-t-il l’ontologisme ou seulement le panthéisme’.' — On comprend que l’émotion fut grande au camp des ontologistes à la lecture du décret du Saint-Office : l’Église condamnait-elle une doctrine qui leur paraissait la seule planche de salut contre le scepticisme, une doctrine qu’ils estimaient avoir été celle de saint Augustin et de saint Ronaventure ? Cela n’était pas possible. Aussi s’efforcèrent-ils d’établir que le décret ne visait pas et n’atteignait pas le véritable ontologisme, le leur, mais seulement le panthéisme ou tout au plus une caricature de l’ontologisme, qu’ils baptisèrent le pseudoontologisme. Ce fut le cas, notamment, de l’baghs, dans la Revue catholique de Louvain, janvier 1862 et janvier 1863 ; de Fabre, dans sa Défense et dans sa Réponse, et de J. Sans-Fiel, dans sa Discussion amicale et dans sa réponse au P. Kleutgen, De l’orthodoxie de l’ontologisme modéré et traditionnel. « Quelques personnes peu familiarisées avec les systèmes philosophiques modernes et particulièrement avec le panthéisme, disait l’baghs, ont cru que ces propositions se rapportaient à l’ontologisme et que leur rejet par le Saint-Office atteignait, au moins