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ODON DE SOISSONS — ODORIC DE PORDENONE

Il n’est pas impossible que plusieurs ouvrages qui portent dans les mss. le nom de maître Odon ou Othon, ne doivent être rapportés à notre Odon, en particulier une Philosophia moralis (ou Philosophia nwralis ex dictis oratorum, poetarum… imo ex S. S. ou encore Isagoge in moralem philosophiam). Voir Montfaucon, Bibliotheca bibliothecamm, t. ii, p. 1135 A, p. 1256 B, 1259 A, D, 1251 A. Mais Odon de Soissons est certainement l’auteur d’un ouvrage intitulé Quæstiones ou Sententiæ M. Odonis Suessionensis poslea abbatis Ursi Campi, tandem episcopi Tusculanensis, sur lequel Hauréau a d’abord attiré l’attention et qui a été publié, au moins partiellement, par Pitra, d’après le ms. lat. 3230 de la Bibliothèque nationale. Pitra distingue, dans le ms. qu’il édite, deux parties de caractère assez différent, bien que le ms. ne porte aucune espèce de division. Dans la première qui compte 125 courts paragraphes, la réponse à la question posée dans le titre est donnée par un appel à une autorité soit scripturaire, soit patristique. A cette question par exemple : Quænam dœmonum potestas et qualis conceditur in peccatores ? n ; 88, l’auteur répond en alléguant le texte de Matth., viii, 31, un mot de Bède, quelques sentences de saint Augustin et de saint Ambroise. Dans la seconde partie distinguée par Pitra, la méthode est toute différente, et la discussion des divers aspects du problème posé tient une grande place, diverses solutions sont proposées, après quoi la réponse est donnée soit par un appel à une autorité, soit par un dicimus quod (quelquefois sous ce titre : déterminât io). Dans les questions qui suivent le n. 288 (p. 98 de Pitra), intervient assez ordinairement un magister : De hac dubitat magister, concedit magister, dicil magister. Le magister en question est certainement à plusieurs reprises Pierre Lombard dont les Sentences sont expressément citées ; voir p. 140 : non audemus (determinare) quoniam obviunt auctoritates et forte oeritas et Magistri nostri in Sententiis votuntas ; cf. p. 158 ; p. 183 : sicut habetur in Sententiis ; p. 187 : Magister P. L.. non erat in hac sententia. Mais ailleurs le magister est Odon lui-même ; ainsi à cette même page 187, à la suite de la citation du Lombard, on lit : Et nos ergo, dicit magister, sequentes magistrum nostrum, similiter dicimus. On lit, p. 118, solutio secundum magistrum O(donem) etc. Pitra avait proposé la solusion suivante : Sauf dans les passages où Pierre Lombard est explicitement désigné, le magister est Odon lui-même. Le texte que nous lisons dans le ms. n’est pas une rédaction personnelle d’Odon, mais d’un de ses disciples, celui que, dans une lettre conservée, il appelle son præpositus scholæ et cette rédaction nous donnerait la physionomie des leçons d’Odon, faisant débattre le pour et le contre des problèmes par ses élèves, intervenant finalement pour clore la discussion. Hauréau n’a pas souscrit entièrement à cette thèse. Selon lui, et le P. Chossat s’est rallié à ce point de vue, ceci n’est vrai que de la partie du ms. correspondant aux p. 98-187 de l’édition. Ce qui précède, au contraire, ce seraient les notes d’Odon lui-même ; cette vue semble confirmée par l’étude comparative des autres mss. En tout état de cause, le ms. 3230 donnerait une idée assez exacte des questions soulevées dans les cours de théologie au milieu du xiie siècle. Malheureusement les notes ici accumulées demanderaient un classement ; quelque liberté que l’on suppose à la discussion, il est trop clair que l’exposé théologique devait suivre une marche rationnelle ; or on serait bien embarrassé de trouver un plan quelconque dans les Quæstiones d’Odon d’Ourscamp. Le ms. de Douai, n. 434 contient, fol. 49 sq., des Quæstiones diversæ sec. Cancellarium, magistrum Odonem, magistrum Petrum de Barro, et autres docteurs anciens qu’il y aurait intérêt à comparer avec celles-ci.

Outre les Quæstiones magistri Odonis, le ms. 561 (anc. 519) de Cambrai contient quinze sermons du même et onze lettres ; les trois dernières ne laissent aucun doute sur son élévation à l’évêché de Tusculum ; la ixe annonce aux abbés de Cîteaux et de Clairvaux sa promotion à ce siège la xe répond à O., consul de Borne, qui l’a félici té de sa nouvelle dignité, dans la xi », où il se dit ministre de l’Église de Tusculum, Odon consulte l’abbé de Cîteaux sur des difficultés qu’il éprouve. De ces lettres, Pitra a publié la i rc et la vu 8, adressées au pape Alexandre III, et la vi 8 adressée à Thomas Beckct : il a donné aussi un des sermons sur le texte Egredietur virga de radice Jesse. Ce sermon est aussi fourni par le ms. de Tours, n. 472, p. 169.

Le texte des Quiesliones a été publié pour la première fois par J.-B. Pitra, dans Analecla novissima, t. ii, Paris-Tusculum, 1888, p. 1-187 ; les lettres et le sermon cité, ibid., p. xxxix-xlvii. Il faudrait tenir compte, pour une étude, du texte des autres mss. : Paris, lat. 3230, 14 807, 14 868, i-T 990 ; Cambrai, n. 561 (ancien 519) ; Troyes, n. 140 ; Dijon, n. 219.

La question des personalia d’Odon de Soissons, est bien débrouillée par B. Hauréau, dans Notices et extraits des mss. de la Bibliothèque nationale, t. xxiv b, 1876, p. 204235, où Odon de Soissons est clairement distingué d’Odon de Châteauroux ; Pitra, loc. cit., p. îx-xx, ajoute quelques précisions à l’aide des lettres du ms. de Cambrai ; Hauréau revient sur la question dans le Journal des Savants, 1888 p. 357-366. — Cf. M. Grabmann, Die Gesch. der scholastichen Méthode, t. ii, 1911, p. 25 sq. et passim ; J. de Ghellinck, Le mouvement théologique au XIIe siècle, Paris, 1914, p. 128 ; M. Chossat, La Somme des Sentences œuvre de Hugues de Mortagne, Paris-Louvain, 1923, p. 48-57, ce dernier a bien montré comment l’on a pu faire à maître Odon (de Soissons) l’attribution de la fameuse Summa Sententiarum, faussement donnée à Hugues de Saint-Victor, et qui n’est pas davantage d’Odon de Soissons, ni d’Odon de Saint-Père.

É. Amann.

8. ODON DE SULLY, évêque de Paris de 1196 à 1208. — Né à la Chapelle d’Angilon (département du Cher), Odon était d’une famille très illustre, apparentée aux maisons de Champagne, d’Angleterre et de France. Au témoignage de Pierre de Blois, il fit à Paris de brillantes études, et se fit également remarquer par sa grande piété. De bonne heure nommé chantre de Bourges, dont son frère Henri était archevêque, il fut élu en 1196 au siège de Paris ; il n’avait guère qu’une trentaine d’années. Nous n’avons pas à mentionner ici les actes de son épiscopat ; Odon mourut le 13 juillet 1208. — Le théologien doit connaître les Synodicæ constitutiones, qu’il fit rédiger et qui ont été considérées comme les plus anciens Statuts synodaux du clergé de Paris. Elles n’intéressent pas seulement l’historien de la discipline ecclésiastique, mais encore et surtout l’historien des sacrements, particulièrement de l’eucharistie, de la pénitence et du mariage.

Texte des Constitutiones, dans les diverses collections conciliaires et finalement dans P. L., t. ccxii, p. 57-68. — Notices littéraires et historiques : Fabricius, Bibliotheca latina mediæ et infimæ ætatis, t. v, Hambourg, 1736, p. 465-466 ; Gallia christiana, t. vii, 1744, col. 78-86 ; Daunou, dans Hist. litt. de la France, t. xvi, 1824, p. 574-583, notice reproduite partiellement dans la 2e édit. de Ceillier, Hist. des aut. ecclés., t. xiv b, 1863, p. 890-893 ; Denifle et Chatelain, Chartularium universit. Parisien., t. i, 1899, p. 12, 35, 63, 82, 87, 88.

É. Amann.

ODORIC DE PORDENONE (Le Bienheureux), frère mineur (xiiie-xive siècle). — Né à Pordenone, dans le Frioul, vers 1265, d’un soldat d’Ottokar, roi de Bohême, il revêtit la bure franciscaine, à l’âge de quinze ans, soit en 1280 environ. Ordonné prêtre dans sa vingt-cinquième année, il passa, avec l’assentiment de ses supérieurs, quatre ou cinq ans,