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OCCASION, OCCASIONNAIRES


à augmenter l’énergie chrétienne nécessaire à ce combat spirituel : la prière, répétée surtout sous forme d’oraisons jaculatoires, lesquelles ont une merveilleuse efficacité pour fixer l’attention sur le secours à attendre de Dieu et faire vivre l’âme dans une sorte d’atmosphère surnaturelle ; de même l’appel à la bienveillance de l’ange gardien, la confession fréquente, la réception de la sainte eucharistie, pain des forts préparé pour ceux qui luttent, la résolution maintes fois répétée de ne plus pécher et de sortir de l’occasion, dès que faire se pourra, etc. Cf. Saint Alphonse de Liguori, Theologia moralis, t. VI, n. 454.

Tous ces moyens, dont le confesseur imposera l’emploi avec discrétion suivant l’âge, l’éducation, la situation et les aptitudes du sujet, sont propres à sauvegarder contre les rechutes. Leur efficacité pourra rendre éloignée toute occasion prochaine involontaire, qu’elle soit nécessaire physiquement ou moralement, continue ou interrompue. Promettre sincèrement d’en user, c’est montrer que l’on est dans les dispositions requises pour l’absolution. « La raison en est, dit saint Alphonse de Liguori, que l’occasion de pécher n’est pas en soi un péché, ni une nécessité de pécher ; c’est pour quoi peut coexister avec elle une vraie détestation du péché ainsi qu’un ferme propos de ne plus retomber et de prendre les moyens pour cela. Et, quoique le précepte d’éviter l’occasion prochaine oblige par lui-même à ne pas demeurer dans cette occasion, cependant il faut entendre cela de celui qui se maintient volontairement en cette occasion, mais non pas de celui qui y demeure par nécessité. » Theol. mor., t. VI, n. 454.

En conséquence, si le confesseur juge que son pénitent est présentement dans les dispositions requises, il le peut absoudre une première fois, et même une deuxième et troisième fois. Après une première absolution, » on convient cependant qu’il est utile de différer quelque temps l’absolution, quand ce ne serait que pour rendre les pénitents attentifs à pratiquer les moyens prescrits. » Cf. Gousset, Théol. mor., t. ii, n. 569. Mais si, après avoir été averti, le pénitent revient avec les mêmes fautes aussi nombreuses et sans aucun progrès en sa correction, il devra être considéré comme récidiviste. Nous reparlerons de lui dans la deuxième hypothèse.

2. Si le pénitent se trouve dans une occasion volontaire et libre, deux cas se présentent.

1° cas : le pénitent se refuse à quitter cette occasion.

— Alors on ne peut jamais l’absoudre. Il n’est pas en effet dans les dispositions requises, car il conserve des attaches au péché. Cela ressort de la condamnation portée contre la proposition suivante : « On peut quelquefois absoudre celui qui se trouve dans une occasion prochaine, qu’il peut mais ne veut pas quitter, bien plus, qu’il recherche directement et à dessein ou dans laquelle il s’engage. » Denzinger-Bannwart, n. 1211.

2e cas : le pénitent accepte de quitter l’occasion prochaine. — Il faut ici considérer le caractère de l’occasion, comme fait saint Alphonse de Liguori en invoquant l’autorité de saint Charles Borromée. Theol. mor., t. VI, n. 454. Si elle est interrompue et ne se présente que par intervalles, on donnera l’absolution, pourvu que le pénitent promette sincèrement d’éviter la cause de son péché, par exemple, de fuir les mauvaises compagnies, les spectacles dangereux, etc. Et cela « une fois, deux fois, voire trois fois », dit saint Alphonse, avant qu’il n’ait mis sa résolution en pratique. Après cette expérience, s’il ne se corrige pas, il faudra différer l’absolution jusqu’à ce qu’il ait donné des preuves de véritable amendement. Autrement il serait traité comme un récidiviste. Nous le retrouverons.

Au contraire si l’occasion est continue’et toujours présente, c’est-à-dire mêlée à la vie de sa victime, le

confesseur devra user d’une réserve plus grande à son égard. Ordinairement, dit saint Alphonse (n. 454), on ne doit pas absoudre le pénitent, avant qu’il ne se soit préalablement libéré de l’occasion. Une promesse ne suffit pas, car sa réalisation est si difficile et exige un tel elTort, que l’on a tout lieu de craindre que, malgré ses protestations actuelles, il ne l’exécutera pas. Saint Alphonse admet cependant deux exceptions.

La première : si le pénitent donne des signes tellement extraordinaires de repentir, que le confesseur puisse estimer que, sans aucun doute, le pénitent tiendra sa promesse. Encore serait-il mieux de différer l’absolution, si la chose pouvait se faire commodément. La deuxième exception serait de mise « dans le cas où, l’absolution étant différée, le pénitent ne pourrait revenir de longtemps vers son confesseur… Car alors si, après que le pénitent a confessé ses péchés, le confesseur peut juger prudemment qu’il a la ferme volonté d’éloigner l’occasion, dès que ce sera possible, le confesseur peut et doit l’absoudre aussitôt… Cela cependant ne pourrait être admis, si le pénitent avait déjà été averti par un autre confesseur, qu’il devait écarter l’occasion et s’il ne l’a pas fait. Alors, en effet, il devrait être considéré comme récidiviste et ne devrait pas être absous, à moins qu’il n’apporte des signes extraordinaires de repentir, ainsi qu’il a été dit plus haut. » A ces exceptions les théologiens en ont ajouté d’autres, dont la prudence du confesseur aura à juger. Voici les principales : a) Le pénitent est arrivé jusqu’à ce jour sans remarquer l’occasion prochaine et le danger qui l’accompagne, ni l’obligation où il était de s’en éloigner. En ce cas, on peut l’absoudre une première fois, mais une fois seulement, avant qu’il ait quitté l’occasion, pourvu que par ailleurs il soit bien disposé. — b) De même, si le pénitent ayant des raisons graves de recevoir l’absolution tout de suite, donnait des marques non équivoques de repentir, on pourrait l’absoudre, après l’avoir affermi dans ses résolutions. « Le soin de s’assurer si le pénitent ne retombera pas, est moins essentiel que celui de voir s’il a les dispositions requises pour recevoir l’effet du sacrement. Ce dernier soin est indispensable, puisque le défaut de dispositions entraîne la profanation ou au moins la nullité du sacrement. Le premier est sans doute nécessaire ; mais si, en voulant prendre toutes les précautions usitées pour assurer la conservation de la grâce, on s’expose à des inconvénients très graves ; si l’on expose le pénitent à la tentation de persister dans le péché ou à celle de recevoir un sacrement, qui demande l’état de grâce, sans avoir reçu l’absolution, la prudence et le bien de cette âme demandent qu’on se relâche de ces précautions. En voulant garantir le pénitent du malheur de perdre la grâce après l’avoir recouvrée, on l’exposerait à un malheur non moins grand et peut être beaucoup plus probable. » Cf. La science du confesseur, citée par Gousset, t. ii, n. 562. Tel serait le cas de fiancés se confessant à la veille de leur mariage après avoir depuis longtemps abandonné la fréquentation des sacrements. — c) On cite encore le cas de celui qui a déjà pris des mesures pour écarter la tentation dès qu’il le pourra, par exemple : s’il a donné congé à une servante, qui exige de faire ses huit jours ; s’il a fait les déclarations et démarches nécessaires pour quitter dans les délais légaux une situation, une profession, un commerce pour lui occasions prochaines de péché. Ce sont là des preuves palpables de son ferme propos. — d) Enfin lorsque les pénitents donnant des signes sincères de repentir sont dans la nécessité morale de recevoir les sacrements : par exemple, des fiancés qui, habitant sous le même toit, ne peuvent sans scandale différer leur communion pascale, ou encore un moribond, dont l’état ne permet pas d’attendre qu’il ait renvoyé la personne, qui est pour lui cause de