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NOVATIEN. LE SCHISME


noncer sur le cas de ces malheureux. Elle ne leur interdit pas d’espérer ; elle les engage à le faire, à apaiser la justice divine, à se concilier par leur pénitence un pardon toujours possible. Mais elle ne veut pas prendre sur elle de présumer, à aucun moment, de ce pardon. L’exclusion des apostats restera donc définitive. Aussi bien, et cette considération est capitale, l’appartenance à l’Église n’est pas une condition sine qua non de salut ; on peut se sauver en dehors de l’Église, encore que le fait de lui appartenir soit un gage tout à fait sûr et une condition suffisante de salut. A cette assurance absolue les malheureux que l’Église a rejetés n’ont plus de part sans doute, mais, à leurs risques et périls, ils peuvent encore travailler à se garantir du malheur éternel. C’est le cas de leur répéter le mot de Pierre à Simon : Age pœnilenliam si forte remitlatur tibi, Act., viii, 22. — Cette reconstitution de la doctrine de Novatien surtout d’après le Contra Novatianum de pseudo-Augustin, P. L., t. xxxv, col. 2303-2313.

in. l’église novatienne. - i. Développement et affermissement. II. Ère de dispersion (col. 845). III. Histoire ultérieure (col. 846).

I. Développement et affermissement de l’Église novatienne. — Simple schisme romain, au début, le parti de Novatien ne tarda pas à recruter des adhérents un peu dans toutes les parties de l’empire et se constitua ainsi en une Église importante, rivale de l’Église catholique. C’est seulement après avoir pris cette extension que l’Église novatienne fixa définitivement ses doctrines.

La propagande novatienne.

Peu après la

double élection de Corneille et de Novatien, un synode romain, nous l’avons dit, col. 838, avait excommunié Novatien et les prêtres qui s’étaient joints à lui. La lettre du pape Corneille à Fabius d’Antioche représente le groupe schismatique fondant comme neige au soleil, surtout après que les confesseurs romains qui lui avaient d’abord été favorables s’en furent séparés. Elle parle des vains efforts faits par l’antipape pour conserver ses adhérents, dans H. E., VI, xliii, P. G., t. xx, col. 628-629. Peut-être y a-t-il un peu d’optimisme dans la manière dont Corneille décrit les déceptions de son rival. S’il avait été aussi restreint que le pape le dit, le petit troupeau groupé sous la houlette de Novatien n’aurait pu exercer la force d’attraction que l’histoire est bien obligée de reconnaître.

Se réclamant avec véhémence de l’antique discipline, prétendant conserver à l’Église son ancienne pureté, se refusant à considérer la maison de Dieu comme une arche de Noé où auraient voisiné le pur et l’impur, le schisme novatien apparut, au lendemain d’une persécution où l’honneur de l’Église avait quelque peu souffert, comme la protestation des chrétiens intransigeants devant la capitulation des lâches, comme la réaction des forts contre les complaisances de l’autorité ecclésiastique à J’endroit des faibles. Son succès qui fut réel ne peut s’expliquer que par les racines profondes qu’avait poussées la doctrine des péchés « irrémissibles ». Devant l’atteinte jadis portée à la vieille discipline par « l’édit de Calliste », des protestations s’étaient fait entendre un peu partout. Il ne s’agit pas seulement des véhémences plus ou moins suspectes d’un Tertullien ou d’un Hippolyte. En Afrique, il y avait eu des évêques, au témoignage de Cyprien, pour penser « qu’on ne devait pas donner la paix aux adultères, et qu’il fallait complètement exclure de la pénitence ceux qui avaient commis cette faute. » Episl., lv (52), n. 21. On pense si les nouvelles concessions, rendues obligatoires, il faut bien le reconnaître, par la persécution, durent en beaucoup d’esprits amener des résistances plus vives encore. Devant

l’invasion d’un laxisme qui leur paraissait inquiétant beaucoup degens se cabraient. Les « puritains » sont de toutes les époques.

Ces considérations expliquent comment le mouvement rigoriste et schismatique parti de Rome rallia assez vite, dans tout l’empire, des adhésions importantes. Novatien, dit Socrates, « écrivit à toutes les Églises qu’il ne fallait pas admettre aux saints mystères, ceux qui avaient sacrifié, mais les exhorter à la pénitence, en laissant à Dieu le soin de leur pardonner, car seul il peut remettre les péchés. » H. E., IV, xxviii, P. G., t. lxvii, col. 537 B. Certains évêques, là-dessus, entrèrent en communion avec Novatien et appliquèrent ses principes. C’est le cas de Marcianus, évoque d’Arles, dont saint Cyprien déclare en propres termes « qu’il s’est joint à Novatien, s’est éloigné de la vérité de l’Église catholique et de l’unanimité du corps épiscopal », Epist., Lxviii (67), n. 1. D’autres, comme Fabius d’Antioche, demeuraient hésitants ; cf. H. E., VI, xliii, xliv. Dans l’ensemble pourtant, il ne paraît pas que le corps épiscopal se soit laissé profondément entamer. Hommes de gouvernement, les évêques se rendaient compte qu’à de nouvelles conditions devait correspondre une discipline nouvelle. C’est parmi les simples fidèles, parmi les prêtres, plus ou moins en délicatesse avec leurs supérieurs, que la propagande novatienne avait le plus de chance de succès. En bien des villes des groupes dissidents se formèrent qui furent bientôt munis d’un clergé complet. Ce fut le cas à Carthage, où l’invraisemblable complexité de la question des lapsi amena la constitution, en face de l’Église catholique présidée par saint Cyprien, d’une Église laxiste (l’ancien parti de Félicissime avec Fortunat pour évêque) et d’une Église novatienne à la tête de laquelle fut mis un prêtre nommé Maxime qui trouva le moyen de se faire consacrer évêque : Pars Novaliani, Maximum presbylerum nuper ad nos a Novaliano legatum missum atque a nostra communicatione rejectum nunc istic sibi fecisse pseudoepiscopum dicitur. Cyprien, Epist., lix (55), n. 9. Ce qui s’est passé à Carthage a pu se passer ailleurs. Nous ne pouvons nommer d’autres communautés novatiennes en Afrique : mais nous savons que c’est autour de la question du baptême conféré chez elles que commença la fameuse querelle baptismale. Deux lettres de saint Cyprien aux évêques Magnus et Jubaïen roulent sur la validité du baptême des novatiens, Epist., lxix (76) et lxxiii (73). Si le retour de gens baptisés dans l’Église novatienne pose un problème dès 255, c’est donc que ces communautés schismatiques s’étaient assez vite répandues et organisées.

A Rome, Novatien continuait à diriger la communauté qu’il avait groupée. Les lettres pastorales dont Jérôme a gardé les titres et qui nous sont partiellement conservées (ci-dessus, col. 817), témoignent du souci qu’il avait de la maintenir « ferme dans l’Évangile » : Novatianus plebi in Evangelio perstanti salulem. Tel est le titre du De cibis. Quand il écrit cette lettre (et il faut en dire autant du De spectaculis et du De bono pudicilise), Novatien se trouve séparé de son troupeau. On a conjecturé, non sans vraisemblance, que pendant la persécution de Gallus (253), puis la première année de la persécution de Valérien (257), Novatien, tout comme les évêques légitimes de Rome, avait été exilé à quelque distance de la capitale. C’est peut être cette circonstance qui a fait naître la tradition du « martyre » de Novatien. Elle figure dans Socrates, H. E., IV, xxviii, P. G., t. lxvii, col. 540 A. OStoç jxèv fiaxepov, inl OùaXepiavoû toG PaatXécoç SiWYjjtèv xaxà xP taTiav ûv xivTjaavTOÇ, êu.apTÔpir ; aev. Au vi » siècle, Euloge d’Alexandrie (ci-dessus, col. 831), avait entre les mains une "A0A7]aiç Nauoc-roO èmax-à-nou qui circulait parmi les novatiens de sa ville cpiscopale ;