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N V A T I E N. E X S E I GN E M E X T T l{ I X I T AIRE

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Celle hypostasc (subslanlia), celle personne qui s’appelle le Verbum ou le Sermo de Dieu, el qui préexiste de toute éternité, s’est, aux derniers temps, manifestée sous forme humaine ; ainsi manifestée, nous l’appelons Jésus-Christ. La cliristologie, au sens moderne du mot, tient une très grande place dans les développements de Novaticn ; on ne s’étonnera pas que cette cliristologie soit encore assez loin des précisions de Chalcédoine, et certains critiques ont accuse Novatien des hérésies les plus contradictoires : non seulement il serait arien (sur quoi nous venons de nous expliquer), mais encore et simultanément apollinariste et nestorien !

Qu’il affirme la divinité du Christ au sens transcendant, nous n’avons pas à y revenir. Qu’il veuille aussi affirmer le caractère humain du Sauveur, cela est incontestable ; il n’a aucune tendresse pour le docétisme au sens propre. Voir c. x, où revient plusieurs fois : substanlia corporis, substanlia tamis. Novatien ne veut pas entendre parler d’un corpus fabutarium. Le Verbe a pris en toute vérité notre chair : nostram carnem Sermo suscepit, col. 930 A. A vrai dire, pourtant, l’insistance que met notre auteur à parler de caro, de corpus, de sanguis ne laisse pas d’inspirer quelque inquiétude. Cette caro « prise » par le Verbe, est-ce la « chair animée », la nature humaine, dans son intégralité, dirions-nous, ou ne serait-ce pas seulement le corpus ? Il faut bien reconnaître que Novatien ne parle jamais de l’âme humaine du Sauveur et le très long développement qu’il consacre à la mort de Jésus-Christ a pu donner lieu à cette accusation d’apollinarisme avant la lettre dont nous avons parlé. Pour lui, semble-t-il, la mort du Christ (mort qui ne peut toucher la substanlia divina) consiste en ce que le Verbe dépdse (pour quelque temps) la subslantia carnis, la maleria corporis, qu’il reprendra au jour de la résurrection. Nos Sermonem Dei scimus indulum carnis substantiam, eundemque rursum exuiuin eadem corporis maleria, quam rursus in resurrectione suscepit et quasi indumentum resumpsil. C. xxi, col. 956 C ; tout le développement serait à citer. Le c. xxv fortifierait encore cette impression par la comparaison qu’il institue entre la mort du Christ et la nôtre. Divinilas in Christo non moritur, sed carnis solius subslantia exlinguilur… in céleris hominibus qui non sunt caro tantumModo, sed caro et anima, caro quidem sola incursum inlerilus morlisque patitur, extra leges autem interilus et morlis anima incorrupla cernitur. Col. 963 BC. Et la conclusion de ce même chapitre : mors in Christum adversum solam materiam corporis poluil valere, adversus divinitatem Sermonis non potuit se exercere. Col. 964 B. Peut-être, comme le fait remarquer A. d’Alès, convient-il de ne pas trop insister sur cette comparaison. Pour en faire sortir la vraie pensée de Novatien il faudrait lui donner un développement dans lequel l’auteur n’a pas eu le souci d’entrer, préoccupé qu’il était d’une autre pensée, l’impassibilité de la nature divine. Passons donc condamnation sur elle. Mais, tout considéré, il ne nous apparaît pas que le prêtre romain ait eu une idée très exacte, quand il s’agissait du Sauveur, d’une nature humaine complète, concrète et agissante.

Et c’est pourquoi il nous semble assez vain de parler, à son sujet, de « nestorianisme », à moins que l’on ne veuille désigner par cette expression, décidément trop élastique, l’imprécision des formules par quoi il veut signifier l’union en Jésus des éléments divin et humain : assumere hominem, induere hominem, assumere filium liominis, etc. La formule la plus complète nous semble bien celle qu’on lit au c. xxiv. Commentant le récit de l’annonciation, Novatien explique que les paroles de l’ange : propterea et quod nescetur ex le sanctum, se rapportent à la nature hu maine (ista carnis corporisque subslantia), tandis que le Fils de Dieu, le Verbe incarné n’est autre que l’être spirituel dont l’ange déclare : spirilus véniel in le et virlus Altissimi obumbrabil libi. Et il continue : llic (i. e. spiritus) est enim légitimas Dei /Mus, qui ex ipso deo est, qui dum sanctum istud assumit et sibi filium liominis anneclit et illum ad se tapit alque Iransducit, connexione suu et permixlionc sociata præstut et filium illum Dei facit, quod Mc, naturaliter non fuit. Dès lors, continue-t-il, le nom de Fils de Dieu revient d’abord et en première ligne à cet être spirituel qui est descendu en Marie ; puis, par voie de conséquence, au fils de Dieu et de l’homme (c’est à dire au fruit né de la Vierge et de l’Esprit), en sorte, que celui-ci est devenu fils de Dieu, alors qu’il ne l’est point en principe, col. 961-962. Et le chapitre se termine sur cette formule : « Ainsi la parole de l’ange, quoi qu’eu aient dit les hérétiques, établit entre le fils de Dieu et le fils de l’homme une distinction en même temps qu’une union (sociatio). Elle voudrait leur faire comprendre que le Christ homme, fils de l’homme, est aussi fils de Dieu, leur faire tenir comme Dieu, c’est-à-dire Verbe de Dieu, cet homme-fils de Dieu, leur faire connaître Noire-Seigneur Jésus-Christ, comme un tissu (contexlum), un agglomérat (concrclum), si l’on ose dire, de l’un et de l’autre (du fils de Dieu et du fils de l’homme), formé qu’il est de l’accord (concordia) de ces deux substances, de l’alliance de ces deux (choses) épinglées l’une à l’autre (mului ad invicem /œderis confibulatione sociatum), homme et Dieu (tout à la fois), comme l’Écriture l’atteste >. Col. 962 C. Évidemment il ne serait pas difficile de faire sortir de ce texte la doctrine des deux fils, de leur union purement extérieure confibulatio, (à comparer avec la auvâçeia des antiochiens), de leur association morale (sociatio, concordia), du pacte qui les unit (mutuum ad invicem fœdus). Mais tout cela serait profondément injuste. Ces formules très inadéquates montrent seulement tout le chemin que la terminologie théologique avait à parcourir pour arriver à quelque précision.

Au total donc, s’il est très ferme pour affirmer la divinité du Verbe au sens transcendant du mot, Novatien n’a pas encore trouvé pour exprimer cette divinité parfaite, pour décrire i’union intime de cette divinité avec une humanité complète et agissante, les formules qui auraient traduit, du moins mal qu’il était possible, la foi de l’Église chrétienne à Jésus-Christ, Dieu et homme.

Le Saint-Esprit.

Sa théologie du Saint-Esprit

est plus rudimentaire encore, bien que l’on constate chez Novatien un sérieux effort pour grouper les textes scripturaires relatifs à l’action de cet Esprit divin. — Son effusion avait été promise dans l’Ancien Testament, mais cela ne veut pas dire que, dès ce temps-là déjà, l’Esprit n’eut pas été à l’œuvre dans les patriarches et les prophètes. Mais, selon l’annonce formelle du Sauveur, c’est à la Pentecôte que s’est fait sur les apôtres une particulière effusion, qui doit amener une collaboration permanente de cet Esprit et des apôtres. Unus ergo et idem Spirilus, qui in prophetis et aposlolis ; nisi quoniam ibi ad momentum, hic semper ; celerum ibi, non ut semper in Mis inesset, hic, ut in Mis semper manerel : et ibi mediocriter distributus, hic lotus effusus ; ibi parce dalus, hic large commodalus ; nec tamen anle. resurrectionem Domini exhibilus, sed per resurrectionem Christi contribulus, c. xxix, col. 972 A. Et Novatien de décrire, en traits rapides mais justes, l’action du Saint-Esprit dans l’Église, depuis l’âge des apôtres, où il rendait ceux-ci intelligents et forts, jusqu’à l’actuelle génération où il continuée sanctifier les âmes et les corps parle baptême, à iaire les martyrs, les vierges, les saints. (Noter au passage l’irrémissibilité du blasphème contre l’Esprit.)