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NOMS DIVINS

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d’attribution ne peut s’affirmer que d’une unique façon, en tant que Dieu possède par essence les perfections qu’on lui attribue, tandis que les créatures ne possèdent les mômes perfections qu’en dépendance et en participation de Dieu. Dieu est ici le premier analogue auquel se réfèrent les autres. Cf. S. Thomas, Cont. Génies, t. I, c. xxxiv ; Compendium theol., c. xxvii. Mais il y a aussi l’analogie de proportionnalité, laquelle se fonde sur la similitude de proportion qui existe entre l’exigence de la déité par rapport aux perfections Infinies de Dieu, et l’exigence de la nature créée, angélique ou humaine, par rapport aux perfections créées, finies et participées. « Appliquant la chose à notre cas, nous ne dirons pas qu’il y ait, de la créature à Dieu, un rapport déterminé quelconque et des formes d’existence réellement communes ; mais il y a similitude de rapport de Dieu à Dieu d’une part, de la créature à la créature de l’autre. Dieu est à Dieu, envisagé dans la plénitude de son être et de sa perfection, ce que l’homme est à l’intelligence de l’homme, à sa bonté, à sa puissance, à tout ce qu’on peut lui attribuer, à lui ou à toute créature, sans qu’une imperfection y soit incluse. » Sertillanges, op. cit., p. 72. Sur cette analogie de proportionnalité, cf. S. Thomas, De veritate, q. ii, a. Il ; Gajétan, De nominum analogia, c. VI.

d) Les termes qui désignent des perfections mixtes et ne s’appliquent que métaphoriquement à Dieu comportent aussi une certaine analogie ; mais, parce que ces termes ne conviennent proprement qu’aux créatures, il ne saurait y avoir ici qu’une analogie d’attribution dont le premier analogue est la créature, S. Thomas, q. xiii, a. 6. —

Après ce qui a été exposé, cette proposition est claire. Rien n’existe en Dieu qui puisse être, en toute propriété des termes, désigné par les noms se référant aux perfections mixtes. Par exemple dire que Dieu s’irrite, parle, marche, sont des anthropomorphismes qui ne posent en Dieu qu’une analogie fort lointaine avec les sentiments essentiellement humains exprimés par ces termes. C’est donc de l’homme, et non de Dieu, que ces termes pourront être entendus proprement. Ils ne seront appliqués ensuite à Dieu que métaphoriquement, par relation aux sentiments humains dont notre esprit pense trouver en Dieu un équivalent lointain, tout au moins quant à certains effets.

e) Enfin, certains noms, comportant une relation de Dieu à l’existence même des créatures, ne peuvent être appliqués à Dieu de toute éternité, mais seulement dans le temps, S. Thomas, ibid., q. xiii, a. 7. —

Quand l’Écriture appelle Dieu notre Père, notre Seigneur, notre Créateur, etc., ces noms sont essentiellement relatifs aux créatures déjà existantes. Il est évident que de telles expressions ne peuvent être appliquées à Dieu de toute éternité, « car une relation actuelle exige l’existence actuelle de ses deux termes ; donc il est impossible que Dieu soit présenté comme actuel principe de la créature, alors que la créature n’existe pas encore ; or t l’existence des créatures est, non de toute éternité, mais dans le temps. » S. Thomas, In i am Sent., dist. XXX, a. 1. Une telle. attribution dans le temps n’apporte cependant aucun changement en Dieu ; tout le changement est du côté de la créature qui, après le néant, commence d’exister. Voir Création. Cette attribution n’implique pas non plus qu’il y ait eu, dans l’éternité, un instant où ces noms n’étaient pas applicables à Dieu ; elle implique seulement qu’ils né conviennent à Dieu que par dénomination extrinsèque, en raison d’un effet mesuré, non par l’éternité, mais par le temps.

Dans l’ordre de la connaissance surnaturelle.

La connaissance surnaturelle, c’est : à-dire acquise par voie de révélation, nous fait déborder le cadre de notre connaissance naturelle. Sans doute, tout d’abord, elle corrobore cette connaissance naturelle en tout ce qui concerne l’existence, la nature et les attributs divins. Mais, de plus, elle nous fait pénétrer dans la vie intime de Dieu, dans le mystère de la Trinité. Pour exprimer notre connaissance, des noms ici encore sont nécessaires, empruntés de toute nécessité aux données de la connaissance naturelle et, de ce chef, l’analogie joue toujours son rôle.

Mais d’autres problèmes se posent que celui de la connaissance analogique que nous avons, par la révélation, des mystères divins. Nous n’avons pas à reprendre l’exposé historique de la révélation concernant les réalités exprimées par ces noms divins et souvent aussi les noms eux-mêmes. Nous devons nous borner à mettre en relief quelques points utiles pour conserver aux termes employés, une signification correcte dans la dénomination des mystères divins.

1. Distinction des noms essentiels et des noms personnels.

Cette distinction est fondamentale en matière trinitaire. Et c’est parce que l’on a confondu hypostase, nom personnel chez les Grecs, avec substantia, nom essentiel chez les Latins, que la mésentente régna si longtemps entre Grecs et Latins en fait de terminologie trinitaire. Voir Hypostase, t. vii, col. 376.

Les noms essentiels désignent directement l’essence ou la nature divine, ou quelque attribut absolu se rapportant à l’essence. Exemples : Dieu, divinité, éternité, tout-puissance, avec les adjectifs correspondants. Ces adjectifs, exprimant en Dieu une perfection essentielle, sont nécessités par notre mode de connaissance abstractive, qui ne peut concevoir les perfections divines qu’en les attribuant à Dieu, alors qu’en réalité ces perfections sont identiques à l’être divin lui-même. Parmi les substantifs que nous appliquons à Dieu, il faut distinguer les termes concrets et les termes abstraits. Sur la signification de ces mots, voir t. i, col. 282.

Les noms personnels désignent directement la personne ou les rapports des personnes entre elles. Ici également, nous employons des adjectifs : engendrant, engendré, procédant. Mais il s’agit surtout de substantifs, et derechef se rencontrent termes concrets : Père, Fils, Esprit-Saint, et termes abstraits : paternité, filiation, spiration, etc. Ces termes abstraits, en matière trinitaire, ont dû être employés pour I a commodité du raisonnement humain dans l’exposition du dogme : ce sont les notions ou propriétés, voir art. Notion.

2. Noms propres et noms appropriés.

Les noms propres sont ceux qui, dans le mystère de la Trinité, conviennent à une seule personne et ne peuvent être appliqués aux autres. Les noms propres de la première personne sont : Père, Principe, Inengendré. Cf. XIe conc. de Tolède ; Conc. de Florence, décret pro Jacobilis, Denz.-Bannw., n. 275 et 704. On exposera à l’art. Père en quel sens ces noms peuvent devenir essentiels.

Les noms propres de la seconde personne sont : Fils, Verbe, Image du Père. Les deux premiers termes sont toujours personnels. Le nom d’Image, emprunté à Col., i, 15 et à Heb., i, 3, est, en soi, un nom personnel parce qu’il ne peut s’appliquer qu’au Fils qui, en vertu de la génération qui lui est propre, est vraiment l’Image de Dieu le Père, ou le caractère, l’image exprimée, de l’hypostase, c’est-à-dire de la réalité du Père. Toutefois, en un sens plus large, l’Esprit-Saint est parfois appelé par les Pères grecs l’image du Père et du Fils, en tant que, procédant d’eux, il leur est semblable par l’identité de nature. Cf. S. Thomas, Cont. errores Grœcorum, c. x. —

Les noms propres de la troisième personne sont : Esprit-Saint, Amour, Don. Ces noms ne sont point propres en raison de leur signification même, mais en vertu