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    1. NOMINALISME##


NOMINALISME. PROBLÈME DE L’UNIVERSEL

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il examine sa propre interprétation de Duns Scot : ista opinio est, ut credo, opinio subtilis Doctoris, q. vi, B.

Entre ces trois opinions, un nouveau classement s’établit ; il y a deux façons pour la nature de se distinguer de l’individu ex natura rei : a. rcaliter, b. formaliter.

a. Realiter.
La distinction réelle se retrouve dans les questions iv et v, dont il nous faut maintenant comprendre la division.

A la question iv, chacun des universaux réalisés dans les individus reste un et le même à travers leur multiplicité : omnes istæ res [universelles] in se nullo modo multiplicantur, quantumeumque singularia mulliplicentur, q. iv, B.

A la question v, l’universel se diversifie à travers les individus : universale estvera res extra animam distincta realiter ab una differentia contrahenle, realiter lamen multiplicala, et variata per lalem differenliam conlrahentem, q. v, B.

b. Formaliter.
A la question vi, l’individu s’analyse, comme à la question v, en une nature spécifique et la différence qui le fait individu, mais la distinction de l’une et de l’autre n’est plus réelle : in re extra animam est natura eadem realiter cum differentia contrahenle ad determinatum ind.widu.um, distincta tamen formaliter, q. vi, A. Nature et différence ne sont plus deux choses, mais se distinguent encore dans la chose, indépendamment de l’esprit : nous retrouverons cette distinction formelle.

b) Secundum rationem.
La différence de raison suppose qu’un intellect considère la chose. Nous la trouvons dans les trois doctrines qu’examine la question vu : omnes istæ opiniones ponunt quod universale et singulare sunt eadem res realiter, nec differunt nisi secundum rationem ; et in hoc discrepant a tribus opinionibus recilatis in tribus quæstionibus precedentibus, q. vii, F.

Nous pouvons maintenant embrasser du regard l’ordre de nos quatre questions. Mais surtout, nous comprenons, en le suivant, le progrès de la pensée qui va de la première à la dernière.

Il s’agit du mode d’existence de l’universel dans les choses : le degré de réalité qu’il y possède se mesure, pour ainsi dire, à la plus ou moins grande distinction qui le sépare des individus où il se réalise.

Distinction maxima à la question iv, où l’unité de l’universel se moque de la multiplicité des individus.

Distinction moindre à la question v, où l’universel, sous la différence qui le prend, se diversifie d’un individu à l’autre.

Distinction encore moindre à la question vi, où la nature universelle et cette différence ne font ptus deux choses.

Distinction minima à la question vii, où l’universel ne se distingue de l’individu que sous le regard de l’esprit.

Examinant toutes les façons de réaliser l’universel dans les choses, omnes quosvidi… ; cf. supra ; Occam ne peut en admettre aucune. Sa critique du réalisme se présente, comme celle d’Abélard, sous la forme d’une enquête.

3. L’universel in anima.

Repoussé des choses, l’universel se réfugie dans l’âme : va-t-il y exister subjective, comme l’accident dans la substance ? C’est le problème traité par la question viii, qui n’expose pas moins de cinq solutions, q. viii, B, C, D, E, F.

Dès l’abord, Occam situe les thèses qu’il va examiner par rapport à celles déjà critiquées : Ad islam quæstionem passent esse diversie opiniones, quorum militas repulo simpliciler falsas, quorum lamen quamlibet unleponerem quam aliquam improbalam in prsecedentibus quæstionibus, q. viii, A. Une notion fausse de l’existence de l’universel in anima vaut mieux qu’une doctrine qui réalise celui-ci extra animam.

Ayant exposé les trois premières doctrines de l’universel in anima, Occam écrit encore : Istæ opiniones non possunt faciliter probari, nec sunt ita improbabiles, nec ita evidenter falsilatem continent sicut opiniones improbatæ in aliis quæstionibus, q. viii, D. En passant des questions iv-vn à la question viii, nous tombons de l’ordre de l’évidence à celui de la probabilité. L’évidence décide contre tout mode d’existence de l’universel extra animam : elle ne décide pas entre les modes d’existence in anima.

Occam nous laisse finalement devant trois opinions, entre lesquelles nous pouvons choisir, à savoir la première, la seconde et la cinquième, q. viii, B, C, F : quamlibet istarum trium opinionum reputo probabilem, q. viii, Q ; cf. quelques lignes plus haut : Cui non placel ista opinio de lalibus fictis in esse objectivo, potest tenere. Mais, après nous avoir laissé ce choix, Occam nous rappelle qu’il est une position qu’il tient avec force : hoc tamen teneo, quod nullum universale, nisi forte sil universale per voluntariam inslilutionem, est aliquid existais quoeumque modo extra animam, sed omne illud quod est universale prædicabilede pluribus ex natura sua est in mente vel subjective, vel objective, et quod nullum laie est de essentia seu quiddilate cujuslibet substantiæ et sic de aliis conclusionibus negatis quas dixi in quæstionibus præcedentibus, q. viii, Q. A propos de ce texte, Geyer observe justement que la manière d’être de l’universel, in mente, vel subjective, vel objective, n’est pas de première importance dans la pensée d’Occam, Grundriss, p. 577-578. Pour nous, ces lignes nous invitent à chercher l’essentiel du nominalisme dans les questions iv à vii, critique du réalisme. Il importe avant tout que l’universel ne se retrouve d’aucune façon dans l’essence des choses, autrement dit : que toute substance soit radicalement individuelle. Le drame se joue-t-il, comme chez Abélard, entre l’universel, prædicabile de pluribus, et le réel qui l’exclut et paraît finalement n’être que singulier. Précisons d’abord ce qu’est l’universel et quel problème il pose.

Le problème de l’universel.

Nous sommes en théologie : il s’agit de faire la science de Dieu ; mais peut-on la construire avec les mêmes matériaux qui servent à la science des créatures, an Deo et creaturæ sit aliquod commune univoce prædicabile essentialiler de utroque, q. iv, A ; est-il possible de trouver entre Dieu et ses créatures, quelque chose de commun qui, restant en soi le même, s’attribue cependant à l’essence de l’un et de l’autre ? Nous voyons paraître la notion classique de l’universel, prædicabile de pluribus, et il va falloir d’abord éclaircir sa nature : ista quæslio… dependet ex notilia naturæ univoci et universalis, ideo… quæram primo aliquas quæstiones de natura universalis et univoci, q. iv, A. Voici nos questions dont l’énoncé et la discussion ramènent sans cesse commune, u : iivocum, universale, prædicabile, termes souvent joints et quelquefois surajoutés : Occam aime une certaine abondance de précision et comme un excès de rigueur. Belisons son texte pour préciser la notion de l’universel et le problème de sa nature.

1. Genres et espèces.

Dès l’abord, il s’agit de déterminations essentielles, essentialiler, telles que genres et espèces. La première doctrine examinée traite de omnibus generibus et speciebus, q. iv, B. Les universaux d’Occam sont ceux de Porphyre et d’Abélard.

2. L’universel dans la proposition.

Prœdicabile dit une proposition, au moins possible, dont l’universel sera un terme. Quelques remarques, propter aliquos inexercitatos in logica, q. iv, A, nous aiderons à retrouver ce point de vue. Nous avons rencontré l’universel à propos de la science de Dieu. Mais de quoi donc est