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NICOLAS V


un terme aux querelles locales, où qu’elles existassent. 2° La légation de Jean de Capislran.

Tandis que

Nicolas de Cues déployait son zèle dans l’Allemagne du Nord, un franciscain évangélisait l’Allemagne du Sud, l’Autriche, la Moravie et jusqu’à la Pologne, C’était Jean de Capislran, aussi savant que pieux, possédant un don oratoire assez puissant pour soulever le repentir dans les cœurs de gens qui, pourtant, n’entendaient point sa langue. Le prédicateur parlait sur les places publiques, en latin, à des foules qu’/Eneas Sylvius Piccolomini évaluait à vingt ou trente mille personnes. Son geste, son accent convaincu et son extérieur chélif, exprimant l’austérité de sa vie privée, impressionnaient les auditeurs qui écoutaient avec avidité le prêtre chargé de leur traduire les paroles qui les avaient tant émus.

E. Vanstcenberghe, Le cardinal Nicolas de Cues (141)11464). L’action. La pensée, Paris, 1920, p. 87-139, 475-190 ; L. von Pastor, op. cit., t. ii, p. 98-130, et la 7e édition allemande, t. i, p. 467-193 ; Hefele-Leclercq, Histoire des conciles, t. vii, p. 1201-1227.

III. Le sacre de l’empereur Frédéric III. — Cet événement, à rencontre de ce qui avait eu lieu aux siècles précédents, n’amena pas de complications avec les États italiens. Frédéric s’abstint de paraître en conquérant. Sa suite était peu brillante et ne pouvait inquiéter les. populations qui se tenaient sur la défiance. La cérémonie du couronnement se célébra, suivant les rites prescrits, le dimanche 19 mars 1452. Elle n’eut rien de mémorable sinon qu’elle marqua la fin de l’union de l’empire et du pontife romain : jamais, depuis cette époque, elle ne se renouvela. Au reste, elle ne rapporta aucun avantage à Frédéric et ne rehaussa pas son autorité aux yeux de ses contemporains.

Pnstor, op. cit., t. ii, p. 131-153, et la 7e édition allemande, t. I, p. 494-512.

IV. Nicolas V et les États de l’Église. — Nicolas V eut le mérite incontestable de rétablir dans ses États l’ordre, la sécurité et la prospérité compromis gravement sous le pontificat d’Eugène IV. Par ses bonnes grâces, il se concilia les barons romains, turbulents par nature ; aux autres seigneurs il renouvela ou concéda des vicariats à Urbino, Pesaro, Rimini, etc., et racheta Jési tombé aux mains de Francesco Sforza. Rome et certaines villes de la marche d’Ancône reçurent des franchises ou la confirmation de leurs privilèges. Cà et là, s’élevèrent des forteresses destinées à contenir les instincts pillards des nobles. Les mercenaires, payés régulièrement, ne se livrèrent plus à la rapine, comme par le passé. Les mesures de prudence, adoptées par Nicolas V, lui procurèrent la joie de voir Bologne se soumettre à l’Église (24 août 1447). En l’occurrence, le pape fit preuve d’un esprit de conciliation peu commun et, moyennant la concession de privilèges, il réussit à s’attacher une population ombrageuse, fière de ses libertés et toujours prête à la révolte. Il est vrai qu’il eut soin de : ui choisir des gouverneurs habiles, dont Bessarion fut le meilleur (1450-1455).

Pastor, op. cit., t. ii, p. 57-07, et la 7e édition allemande, 1. 1, p. 422-431.

V. La conjuration d’Etienne Porcaro. — Lors du conclave de 1447, Etienne Porcaro avait vainement tenté de provoquer un soulèvement populaire à Rome. C’était un humaniste possédant le culte de l’antiquité classique, un patriote convaincu qui rêvait de libérer la Ville éternelle du joug pontifical. Nicolas V lui accorda généreusement son pardon, et lui confia même la charge de gouverneur de la Campanie et de la Maritime. Au lieu de témoigner de la reconnaissance à son bienfaiteur, Porcaro occasionna

dict. de théol. cath.

des troubles à la faveur du carnaval. Cette fois, le pape sévit et lui infligea la peine d’un doux internement à Bologne (1450). Là, Porcaro, reprit ses projets révolutionnaires et, trompant la vigilance du cardinal Bessarion, il quitta furtivement Bologne, le 26 décembre 1452, et rejoignit des allidés romains. Il fut convenu que l’insurrection éclaterait le G janvier ; pendant la célébration de la messe solennelle, le feu serait mis aux écuries pontificales. A la faveur de la panique qui ne manquerait pas de se produire, les rebelles s’empareraient des cardinaux et du pape. Chargé de chaînes d’or, Nicolas V comparaîtrait devant Porcaro, devenu tribun, qui statuerait sur son sort ; la République serait proclamée et la papauté exilée de Rome. Le plan ourdi n’avait qu’un défaut, celui de reporter l’exécution à une date trop éloignée. On l’ébruita bientôt, et Porcaro, arrêté, avoua son crime et subit le supplice de la pendaison le 9 janvier 1453.

Il n’y eut pas que Rome à pâtir de troubles révolutionnaires. A partir de 1454, une agitation inquiétante grandit dans les États de l’Église, principalement dans les Marches, dans le Patrimoine de Saint-Pierre, à Spolète, à Bologne. Tous ces tracas agirent sur la santé du pape qui s’éteignit dans la nuit du 24 au 25 mars 1455.

Pastor, op. cit., t. ii, p. 203-227, 293, et la 7e édition allemande, t. i, p. 571-593, 832-840 ; E. Rodocanachi, Histoire de Borne, de 1354 à 1471. L’antagonisme entre les Romains et le Saint-Siège, Paris, 1922, p. 250-261, 289-302 ; J. Guiraud, L’État pontifical après le Grand Schisme, Paris, 1896.

VI. L’humanisme et le culte des arts a la cour de Nicolas V. — Les humanistes italiens avaient naguère affiché des tendances plutôt païennes, et leurs écrits, trop souvent libertins, avaient semé le mépris de la religion et de la morale. Non moins admirateur qu’eux de l’antiquité classique, non moins lettré, Nicolas V entreprit de réconcilier le christianisme et l’humanisme. Sur son lit d’agonie, se remémorant les trésors d’art et de science qu’il avait amassés, il assura au collège cardinalice n’avoir agi « ni par orgueil, ni par amour du faste, ni par vaine gloire, ni par ambition d’assurer l’immortalité à son nom. » Son souci intime et unique avait été de faire de Rome la capitale du monde savant, lettré et artistique et, par voie de conséquence, de redonner au Saint-Siège le prestige momentanément perdu à l’époque du concile de Bâle, et aussi d’accroître son autorité aux yeux de ses sujets temporels.

L’activité déployée par le pape, pendant son court pontificat, justifie les paroles qui lui ont été prêtées. Non content de réparer une foule d’églises tombées plus ou moins en ruines, de restaurer les murs d’enceinte de Rome, les aqueducs et les ponts, de bâtir la fontaine de Trevi (1453), les architectes pontificaux, dont le plus célèbre fut le Florentin Alberti, décidèrent de créer un quartier neuf dans le Borgo, d’édifier un palais plus grandiose au Vatican, de renverser la vieille basilique de Saint-Pierre qui menaçait de s’écrouler et de reconstruire à sa place un vaste édifice affectant la forme d’une basilique à cinq nefs. Sans doute, ces projets grandioses ne furent pas réalisés du vivant de Nicolas V, mais ils marquèrent une ère nouvelle et s’imposèrent à ses successeurs : du moins, l’auguste pontife eut-il la joie de contempler les admirables fresques dont Frà Angelico décora les parvis de la chapelle de Saint-Laurent, au Vatican, et où se marient harmonieusement l’art chrétien et l’art païen.

Si les peintres italiens, allemands, espagnols, français et hollandais affluèrent dans la Ville Éternelle, le concours des lettrés et des savants ne fut pas moins empressé. S’y donnèrent rendez-vous le Pogge, Valla,

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